Mister Arkadin

ON NE PRÊTE QU'A DURAS, MAIS SANS DONNADIEU

23 Septembre 2012, 23:03pm

Publié par Mister Arkadin

Lors d’une conversation récente, JL (1) m’a dit sa colère en découvrant la présentation, dans la récente Pléiade Duras (volume 1/2, 1943-1973), d’Hiroshima mon amour comme du premier scénario publié (ce qui aurait été inédit à l’époque).

J’ai partagé cet étonnement, teinté de désabusement dans mon cas en constatant soit la puissance d’intimidation de Gallimard pour réussir à faire passer auprès de la presse "informée" une telle ânerie comme argument publicitaire, soit l’ignorance sans cesse affichée par les journalistes, qui ont laissé le responsable de cette édition, Gilles Philippe, la débiter sans être contredit (par exemple dans Libération, 20 octobre 2011, p.III [« Le cinéma fait son entrée dans la Pléiade » « pour la première fois » - textes de scénarios (Hiroshima et Une aussi longue absence)] et Le Figaro, 20 octobre 2011, p.32).

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Ce n’est toutefois pas la moindre entourloupe de cette édition à être passée comme une lettre à la poste. Intimidation ou ignorance, je ne saurais dire, mais je n’ai lu personne protester que l’on se foutait du monde en parlant d’"Œuvres complètes" de la dame, qui commenceraient en 1943 ! Malin, Gilles Philippe, dans certains entretiens, a anticipé les objections, sans pour autant préciser pourquoi il ajoutait… « sous son nom de plume » (2) ! La consultation de la fiche Wikipedia de MD aurait suffi aux journalistes pour lui rétorquer que c’était tout de même une façon un peu facile de s’en tirer à bon compte.

http://www.histoire-memoires.com/img/politiques-autres/duras-marguerite/empire-francais-duras-roques.jpg


Notes :

(1) Auteur de l’une des Bibles de la cinéphilie française, avec le JPC/BT, le PV, l’AH/FT, le CB, l’EV que je prépare.

(2) La jobardise des journalistes officiant dans la presse "branchée" est sans limite, certes. On admira tout de même le papier publié le 13 juillet 2012 dans le magazine bancaire Les Inrockuptibles (p.99), sous le titre « renommer, fit-elle », où la volonté de se déprendre de la figure paternelle semble avoir été la seule raison, pour Duras, d'effacer Donnadieu.

 


Complément (19 décembre 2012) : Duras fait partie de ces élus dont la moindre parole est recueillie pieusement, les éditeurs faisant tous les fonds de tiroir possibles pour ajouter un titre d'Elle à leur catalogue. Viennent d'être publiées trois "bonnes feuilles exclusives" reproduisant des extraits d'un entretien réalisé par une journaliste italienne, qui va paraître sous le titre La Passion suspendue (Le Nouvel Observateur, n°2511, 20 décembre 2012, p.144-146, « La confession secrète de Duras »). Entre diverses banalités et incongruïtés, on remarque la question suivante, aussi indiscrète que pointue : « Votre premier livre, "Les Impudents", date de 1943. Vous aviez 29 ans. »