Mister Arkadin

AUDIOVISUEL PUBLIC ALÉATOIRE

20 Décembre 2008, 00:06am

Publié par Mister Arkadin

Une grande bataille parlementaire et médiatique a lieu en ce moment pour la "défense" de l'audiovisuel public. Comme souvent en France, à l'instar des manifestations sur l'éducation, elle se focalise sur les moyens et laisse au second plan leur adéquation avec les fins qu'on pourrait lui assigner. J'avouerais volontiers que si F2 n'était plus en mesure de payer aussi cher Drucker, Delarue ou Ruquier (même si ce n'est sans doute pas sur ce poste là que seront faites les économies), cela ne me chagrinerait pas outre mesure. Quant au cinéma, ce n'est pas demain qu'une émission du niveau de « Cinéma, Cinémas » sera à nouveau produite. En ce qui concerne les films proprement dits, n'en regardant plus guère à la télévision, des choix de programmation différents sur F2 ou F3 par rapport à ceux de TF1 ne me préoccupent pas beaucoup plus. Enfin, lire dans le dernier Télérama que, le dimanche 21 décembre, F2 dégaine Le Père Noël est une ordure pour contrer Les Bronzés sur TF1 (à moins que ce ne soit l'inverse) et que F3 lance le samedi 20 décembre un « nouveau rendez-vous cinéma », en deuxième partie de soirée (23h10 tout de même pour la diffusion du premier film, 2046), à la périodicité aléatoire et en version française, me rend quasi définitivement indifférent au sort de France Télévision.

Complément : D'après Télérama du 31 décembre 2008 (p.34), Arte n'aurait toujours pas assez de moyens pour proposer les films en version multilingue (cf. "VM : Arte ne tient pas ses promesses"). Elle en a en revanche pour recruter tel animateur infatué et zozotant, preuve de plus que l'argent ne fait pas la culture !

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LE JOUR ÒU LA CRITIQUE S’ARRÊTERA

19 Décembre 2008, 18:09pm

Publié par Mister Arkadin

Le Jour où la terre s'arrêtera a été unanimement salué par la presse comme un insurpassable navet (1). D'où vient que je ne puis me départir d'un certain penchant pour ce film dont je vois bien plus les défauts que des qualités que je ne saurai exprimer, malgré le recul. J'ai attendu deux à trois semaines pour voir si j'aurais quelque chose à en dire. Verdict : nada. Mais ce n'est pas parce que l'on a rien à dire que l'on devrait s'abstenir de le faire !


(1) Le film fait également quasiment l'unanimité sur Internet :

- http://www.chronicart.com/cinema/chronique.php?id=11201 ;

- http://www.critikat.com/Le-Jour-ou-la-Terre-s-arreta.html ;

- http://albertmontagne.blogspot.com/2008/12/la-dclaration-universelle-des-drotis-de.html

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CINÉMA ET RADIO : SEMAINE DU 20 DÉCEMBRE 2008

18 Décembre 2008, 18:02pm

Publié par Mister Arkadin

Rappels et rattrapages :

« Captive du lieu unique », France Culture (« Les Sentiers de la création), 20 et 25 novembre 2008 : Assia Djebar (écrivain et cinéaste), avec « L'écriture autobiographique dans la langue de l'autre », par Mireille Calle-Gruber (12 mars 2008), et « Aller à la rencontre d'Assia Djebar », à l'occasion d'une conférence de Bruno Blanckeman (professeur de littérature à l'université de Rennes 2), le 19 mars 2008

« Coup de projecteur », TSF Jazz, lundi 15, mardi 16, mercredi 17, jeudi 18 et vendredi 19 décembre 2008, à 8h30 - Rediffusions à 11h30 et 16h30 : Claude Pinoteau, assistant réalisateur sur le film de Jean Cocteau Orphée, qui sort en DVD (avec un commentaire audio de Claude Pinoteau) ; Agnès Varda (cinéaste), pour son film Plages d'Agnès ; Karin Albou (cinéaste), pour son film Le Chant des mariées ; Frank Cassenti (réalisateur et musicien), pour la sortie en DVD de deux de ses films (Novecento et L'Affiche Rouge) ; Bertrand Tavernier (cinéaste, historien du cinéma et éditeur), pour son livre Amis américains (Institut Lumière / Acte Sud)

« Esprit critique » (Vincent Josse), France Inter, lundi 15, mercredi 17, jeudi 18 et vendredi 20 décembre 2008, de 9h10 à 9h35 : Entretien d'Eva Bettan avec Agnès Varda (cinéaste) diffusé en feuilleton, toute la semaine, à l'occasion de la sortie des Plages d'Agnès ; Karin Albou (cinéaste), pour son film Le Chant des mariées ; conseils de coffrets DVD, par Eva Bettan ; La bibliothèque de Fabrice Lucchini (acteur)

« Rendez-vous » (Laurent Goumarre), France Culture, lundi 15 décembre 2008, de 19h15 à 20h00 : Bertrand Tavernier (cinéaste, historien du cinéma et éditeur), pour son livre Amis américains (Institut Lumière / Acte Sud)

« RTL Soir » (Nicolas Poincaré), RTL, mardis 2 et 16 décembre 2008, de 19h15 à 20h00 (« On refait le monde ») : « Valérie Lemercier, noire dans Agathe Cléry » ; « Largo Winch », avec Tomer Sisley

« Captives de la Cinémathèque française », France Culture (« Chemins de la création »), « Le ciné-club de Jean Douchet » (Cinémathèque française), mercredi 17 décembre 2008 : « Man on the Moon, de Milos Forman » (8 décembre 2008)

« Dare-Dare » (Martine Béguin), RSR, mercredi 17 décembre 2008, à 12h03 : « Le cinéma, un art de la vitesse et de la ruine ? », sur Alain Fleischer (entretien avec Nicole Duparc)

« Et pourtant elle tourne » (Bruno Duvic ; émission qui, malgré son titre, n'est pas spécialement consacrée au cinéma, ni même à Jane Birkin), France Inter, mercredi 17 décembre 2008, de 18h15 à 19h00 : Critique du film Le Bon, la brute, le cinglé et interview du réalisateur Kim Jee-Woon, par Eva Bettan

« Les Matins jazz » (Laure Albernhe), TSF, mercredi 17 décembre 2008, de 6h00 à 9h00 : Jean-Michel Frodon (critique de cinéma)

« Dossier du jour » (Bernard Thomasson), France Info, mercredi 17 décembre 2008, entre 17 et 18 heures : « Ces petits films qui font aussi bien que les grands », avec un reportage d'Alice Serrano et une réponse de Béatrice Toulon (directrice de Studio Magazine)

« Laissez-vous tenter » (Vincent Parizot), RTL, mercredi 17, jeudi 18 décembre 2008, de 9h00 à 9h30 : « Largo Winch, pari risqué mais réussi », avec Tomer Sisley (acteur) ; Dany Boon (acteur et réalisateur), à l'occasion d'un sondage du Parisien le désignant comme la personnalité de l'année en France

« Forcément sur Europe 1 » (Marc-Olivier Fogiel), Europe 1, jeudi 18 décembre 2008, de 8h49 à 8h57 : Thomas Langman (acteur, producteur et cinéaste)

« Café crimes » (Jacques Pradel), Europe 1, jeudi 18 décembre 2008, de 14h00 à 15h00 : Secret défense, avec Philippe Haïm (réalisateur du film) et Antoine Sfeir (Directeur des Cahiers de l'Orient)

« Culture vive » (Pascal Paradou), RFI, jeudi 18 décembre 2008, à 17h10 : Joana Hadjithomas et Khalile Joreigne (cinéastes et photographes libanais), pour l'exposition au musée d'art moderne du 12 décembre au 8 mars 2009 et le film Je veux voir

« L'humeur vagabonde » (Kathleen Evin), France Inter, jeudi 18 décembre 2008, de 20h10 à 21h00 : Reportage de Lucie Akoun au Mk2 bibilothèque à Paris, avec Olivier Pourriol (qui réalise le samedi des séances "cinéphilo"), Aurélien Férenczi (critique de cinéma à Télérama) et la petite Manon autour de la peur du noir au cinéma, dans le cadre d'une émission avec Michel Pastoureau, à propos de Noir, histoire d'une couleur

« Minuit-Dix » (Aude Lavigne ; « Le Magazine nocturne éveillé sur les pratiques contemporaines »), France Culture, jeudi 18 et vendredi 19 décembre 2008, de 00h10 à 01h00 : Documentaire et Cinéma d'animation, avec Lionel Rogosin (fils du réalisateur Michael Rogosin), pour le documentaire de son père On the Bowery, projeté au Forum des Images le 19 décembre, qui a inspiré le mouvement du "Free cinéma" dans les années 50, Muriel Dreyfus, programmatrice du cycle "Filmer New York" au Forum des images (Paris), IZM, l'un des scénaristes et l'une des voix de la série TV "Les lascars", et "El Diablo" (Boris Dolivet), un des auteurs scénaristes dessinateurs réalisateurs à l'origine de la série TV "Les lascars" ; Laurence Briaud (chef monteuse), à l'occasion de la sortie en DVD d'Un conte de Noël. Roubaix !, film d'Arnaud Desplechin


Émissions radiophoniques sur le cinéma de la semaine à venir :


« Vos plus belles années » (Patrick Sébastien), RTL, samedi 20 décembre 2008, de 11h30 à 12h30 : Gérard Darmon (acteur)

« Regarde les hommes changer » (Frédéric Taddéï), Europe 1, samedi 20 décembre 2008, de 11h00 à 12h00 : Bertrand Tavernier (cinéaste, historien du cinéma et éditeur), à l'occasion de la sortie de son livre Amis américains (Institut Lumière / Acte Sud)

« Soirée lyrique » (Jérémie Rousseau), France Musique, samedi 20 décembre 2008, de 19h30 à 23h00 : Idoménée (Wolfgang Amadeus Mozart), opéra en trois actes (livret de l'abbé Giambattista Varesco, d'après un opéra français de Campra et Danchet), donné le 29 novembre 2008 à la salle Pleyel à Paris (direction René Jacobs ; avec Richard Croft (Idomeneo), Alexandrina Pendatchanska (Elettra), Bernarda Fink (Idamante), Sunhae Im (Ilia), Kenneth Tarver (Arbace), Nicolas Rivenq (Gran Sacerdote), Luca Tittoto (la Voce), Rias Kammerchor et Freiburger Barockorchester) - ce programme n'a que peu à voir avec le cinéma, si ce n'est l'utilisation de la marche d'Idoménée par Kubrick dans Barry Lyndon, mais cela me plaisait de signaler mon opéra préféré !

« 42ème rue » (Laurent Valière), France Musique, dimanche 21 décembre 2008, de 12h00 à 13h00 : « Cocktail Disney : les comédies musicales de l'oncle Walt »

« Cosmopolitaine » (Paula Jacques), France Inter, dimanche 21 décembre 2008, de 14h05 à 16h00 : Werner Herzog (cinéaste)

« Ronde de nuit » (Olivier Le Borgne), France Vivace, nuit du dimanche 21 au lundi 22 décembre 2008, de 1h00 à 4h00 : « Chronique en musique des nouveautés DVD, Blu Ray Disc et livres de cinéma », notamment Amis américains (Institut Lumière / Acte Sud), de Bertrand Tavernier, et un coffret  ; « La bande originale de film du mois »

« La Fabrique de l'histoire » (Emmanuel Laurentin ; « Les usages politiques et sociaux du passé »), France Culture, lundi 22 décembre 2008, 09h05 à 10h00 : « Histoire d'"Un condé" ou les nuits sans sommeil de Raymond Marcellin », documentaire d'Anaïs Kien et Charlotte Roux, avec Yves Boisset (réalisateur), Véra Belmont (productrice), Jacques Genthial (commissaire de police en 1970), Henry Chapier (alors critique cinéma pour le journal Combat) et Yannick Dehée (historien et éditeur) - Rediffusion de l'émission du 21 octobre 2008

« La tête dans les étoiles » (Laurent Boyer), RTL, lundi 22 décembre 2008, de 14h30 à 16h00 : Mireille Darc (comédienne)

« Tout arrive » (Arnaud Laporte, « Le magazine de l'actualité culturelle »), France Culture, mardi 23 décembre 2008, de 12h53 à 13h30 : Antoine de Baecque (critique et historien du cinéma), pour son livre L'Histoire-caméra100 films pour une cinémathèque idéale (Cahiers du cinéma) (Gallimard), et Claude-Jean Philippe (animateur de cinéma), pour son livre

« La tête dans les étoiles » (Laurent Boyer), RTL, mardi 23 décembre 2008, de 14h30 à 16h00 : Gérard Darmon (acteur)

« Sur les docks, l'heure du documentaire » (Pierre Chevallier), France Culture, mardi 23 décembre 2008, de 16h00 à 17h00 : « Les quatre éléments - Rêve 2 : l'eau », documentaire de Michel Pomarède dans lequel il est question d'Histoire d'eau, court-métrage de 1958 tourné par François Truffaut et Jean-Luc Godard, avec Emmanuel Laurent (cinéaste)

« Rendez-vous » (Laurent Goumarre), France Culture, mercredi 24 décembre 2008, de 19h15 à 20h00 : Jacques Rémy Girerd, réalisateur de Mia et le Migou, actuellement en salle, et fondateur du studio Folimage

« Le fou du roi » (Stéphane Bern), France Inter, jeudi 25 décembre 2008, de 11h05 à 12h30 : Mireille Darc (comédienne)

« Sur les docks, l'heure du documentaire » (Pierre Chevallier), France Culture, jeudi 25 décembre 2008, de 16h00 à 17h00 : « Les quatre éléments - Rêve 4 : le vent », documentaire de Michel Pomarède dans lequel il est question d'Histoire de vent, film de Joris Ivens, avec Marceline Loridan, qui raconte comment on pose un micro face au vent divin

« Affinités électives » (Francesca Isidori), France Culture, jeudi 25 décembre 2008, de 21h00 à 22h00 : Werner Herzog (cinéaste), à l'occasion de la rétrospective qui lui est consacré au Centre Georges-Pompidou

« 2000 ans d'histoire » (Patrice Gélinet), France Inter, vendredi 26 décembre 2008, de 13h30 à 14h00 : « Walt Disney », avec Pierre Lambert, auteur de Walt Disney, l'âge d'or

« Médiagora » (Claude Carrez), RCF, vendredi 26 décembre 2008, de 21h00 à 21h55 - Rediffusion le dimanche à 3h00 : Agnès Varda, Les Plages d'Agnès


Rediffusion :

« Cinéma vérité » (Roger Régent, 4 mai 1968), France Culture (« Nuits »), nuit du dimanche 21 au lundi 22 décembre 2008, de 5h25 à 6h00 : Alain Resnais



Compléments et rappels :

- Grille des émissions de radio spécifiquement consacrées au cinéma (la grille de la saison 2008-2009 est en cours de préparation)

- Liste des émissions récentes de France Info sur le cinéma

- Liste des invités des émissions de radio d'information sur le site "Zapping du paf".


Avec la collaboration régulière de l'indispensable Desata, auquel je renouvelle tous mes chaleureux remerciements.


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LITOTE CRITIQUE

17 Décembre 2008, 21:30pm

Publié par Mister Arkadin

Le courant dominant de la critique de cinéma en France a pour habitude de privilégier outrancièrement la forme sur le fond. Il n'est donc guère étonnant qu'il se soit délecté de Je veux voir en félicitant les cinéastes d'avoir « fait politiquement du cinéma plutôt que du cinéma politique » (Les Inrockuptibles, n°679, 2 décembre 2008, p.47). Il y serait question, selon Serge Kaganski, du « village natal de l'acteur [Rabih Mroué], bombardé pendant la guerre de juillet 2006 ». Les quatre pages d'entretiens avec les auteurs du film sont tout aussi elliptiques sur ce point. Libération est encore plus expert en litote critique, la notice de ce film étant deux fois moins longue que celle des autres « choix de Libération » (17 décembre 2008, p.31) : « Deneuve visite un Liban dévasté après les bombardements de 2006. A voir. »

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EXIT L'EXPRESS

15 Décembre 2008, 12:48pm

Publié par Mister Arkadin

Je regrettais jeudi dernier qu'il ne soit presque plus possible de voir Sur ta joue ennemie dès sa deuxième semaine d'exploitation. Son sort est pourtant plus enviable que celui de Délire Express (Pineapple Express), qui a disparu de l'unique écran qui le projetait (à l'UGC Ciné Cité Les Halles) après une semaine, malgré le succès qu'a obtenu aux USA cette comédie burlesque l'été dernier et malgré les dithyrambes que persistent mystérieusement de susciter les films de la bande à Judd Appatow au sein d'une certaine presse (deux pages dans les Cahiers, une dans les Inrockuptibles) (1). C'était bien la peine que Jean-Marc Lalanne le recommande à la fin de l'émission du "Masque et la Plume" diffusée dimanche, alors que le film n'est plus visible qu'en vf dans une salle de Lille (deux séances au beau milieu de la journée) et en vo dans une salle de Lyon (une séance à 22 heures)... Cela en dit long, soit dit en passant, sur l'influence de la critique parisienne branchée sur la programmation ! (2)

Pendant ce temps, Quantum of Salace, après plusieurs semaines d'exploitation, continue de truster une bonne quinzaine d'écrans en région parisienne, deux cinémas le programmant encore dans deux salles.


(1) Ne comptons pas à ce propos la critique très favorable du plus enviable des critiques, Patrick Laurent, dans Rivarol
(2) Bizarrement, bien que Jacky Goldberg, dans le magazine Trois couleurs, distribué dans les cinémas Mk2, essaie lui aussi de nous faire croire, dans son numéro 66 (novembre 2008), que l'acteur Seth Rogen et le producteur Judd Apatow sont les nouveaux génies d'Hollywood, les salles de Karmitz ne passent pas le film.


PS (17 décembre 2008) : Je me rends compte que, dans Les Inrockuptibles, le critique ayant chanté les louanges de Délire Express est le même Jacky Goldberg, qui officie donc à la fois dans un hebdomadaire se prétendant indépendant et dans un mensuel corporatif.
PS 2 (26 décembre 2008) : Le film d'animation Igor n'est passé en vo que dans une seule salle parisienne, en soirée, pendant une semaine seulement.

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DEUXIÈME SEMAINE, UNE SALLE, DIMANCHE, 11 HEURES

11 Décembre 2008, 00:02am

Publié par Mister Arkadin

Un réalisateur prestigieux (Jean-Xavier de Lestrade), dont deux documentaires (notamment Un coupable idéal) ont marqué les esprits dans les festivals et lors de leurs passages à la télévision (le deuxième, Soupçons, faisant l'objet d'un article de trois pages passionnantes dans le Télérama d'hier), son premier film de fiction (Sur ta joue ennemie) sorti il y a huit jours, avec deux jeunes acteurs au talent déjà épanoui (Robinson Stévenin et Fanny Vallette), une belle affiche, une critique plutôt favorable (1) : en deuxième semaine, une unique projection en région parisienne au Majestic Bastille (2), dimanche, à 11 heures 10. Les auditeurs du "Libre journal du cinéma" semblent parfois s'étonner que nous ne rendions pas compte de tous les films...


(1) DVDrama ; Le Monde.

(2) Onze salles sur l'ensemble de la France.

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CINÉMA ET RADIO : SEMAINE DU 13 DÉCEMBRE 2008

10 Décembre 2008, 15:44pm

Publié par Mister Arkadin

Rappels et rattrapages :

« Débats : après-midi » (Olivier de Lagarde ; « Un sujet d'actualité du jour mis en débat entre deux acteurs ou deux spécialistes de la question »), France Info, vendredi 5 décembre 2008, à 13h17 - Rediffusion à 16h47 : « Que vaut le dernier Chatiliez ? »

« Les Belles captives », France Culture (« Chemins de la création »), samedi 6 décembre 2008 : « Dire l'interdit (6) : le western, l'impuissance et la mort », par Bernard Jannin (Treizième rencontres d'Aubrac, 24 août 2008)

« Dossier du jour », France Info, lundi 8 décembre 2008, à 17h47 - Rediffusion à 20h17 et 22h17 : « "Les Bureaux de Dieu" censurés », avec un reportage à Lyon de Nicole Guillard et un entretien avec Claire Simon (cinéaste), suite à la déprogrammation, puis la reprogrammation de son film Les Bureaux de Dieu dans une salle de la région lyonnaise

« Captives de l'ENSAD », France Culture (« Les Sentiers de la création »), mardi 9 décembre 2008 : « Claire Denis, "Vers Nancy" » (rencontre avec la réalisatrice, 17 avril 2008)

« Un morceau de délice », France Culture ("Sentiers de la création"), mardi 9 décembre 2008, de 0h00 à 4h00 - plusieurs rediffusions : « Femmes de cinéma », sélection d'archives par Laurence Courtois (avec Hervé Evanno, de l'INA) - « Qui était Alice Guy ? Sur les traces de la pionnière du cinéma de fiction chez Gaumont » (1h26, 1975), « Nelly Kaplan et le regard Picasso. D'un jour à l'autre » (7 minutes, 1967), « Mag Bodard, portrait d'une productrice. Radioscopie par Jacques Chancel » (40 minutes, 1969), « Les femmes et le cinéma : Expériences de femmes cinéastes » (« Anna Karina, Agnès Varda, Michèle Rozier, Eliane Victor, Sali Faye, Nelly Kaplan... qui se racontent et qui débattent autour de Claire Clouzot » ; 1h, 1973), « Chantal Akermann 1975 » (rétrospective en son honneur à la Mostra de 1975 ; 30 minutes, 1975)

« Un morceau de délice », France Culture ("Sentiers de la création"), mardi 9 décembre 2008, de 20h00 à 0h00 - plusieurs rediffusions : « Radios de cinéastes, radio de femmes », sélection d'archives par Laurence Courtois (avec Hervé Evanno, de l'INA) - « 5 femmes, 5 cinéastes, 5 visions du monde, 5 façons de tenir le micro, 5 émissions de cinéastes sans images diffusées pour la première fois en juin 1976 » - « Nadine Trintignant : portrait de famille » (quarante-sept minutes), « Liliane de Kermadec : la rage de l'âge » (cinquante minutes), « Nina Companeez : les femmes sont-elles comiques ? » (quarante-huit minutes), « Marguerite Duras : l'argent et le vol » (quarante-huit minutes), « Agnes Varda : chacune de moi » (trente minutes)

« Minuit-Dix » (Aude Lavigne ; « Le Magazine nocturne éveillé sur les pratiques contemporaines »), France Culture, mardi 9 décembre 2008, de 00h10 à 01h00 : « Dessin animé », avec Jacques Rémy Rémy Girerd (réalisateur de Mia et le Migou qui sort actuellement en salle, fondateur du studio Folimage), Benoît Chieux (directeur artistique de Mia et le Miou), Laurence Rebouillon (réalisatrice de Dans le village) et Augustin Gimmel (réalisateur de L'Œil lourd du voyageur mécanique) dans le cadre du 10ème Festival des Cinémas différents du 9 au 14 décembre à l'archipel et à Mains d'œuvre, Saint Ouen

« Et pourtant elle tourne » (Bruno Duvic ; émission qui, malgré son titre, n'est pas spécialement consacrée au cinéma, ni même à Jane Birkin), France Inter, mardi 9 décembre 2008, de 18h15 à 19h00 : Burn after Reading (film des frères Cohen)

« L'humeur vagabonde » (Kathleen Evin), France Inter, mardi 9 décembre 2008, de 20h10 à 21h00 : Rencontre de Martine Abat avec Gabriel Le Bomin, réalisateur du film Les fragments d'Antonin, sorti en salles l'année dernière, maintenant en DVD chez MK2

« L'invité culture » (Jean-Luc Hess), Radio Classique, mercredi 10 décembre 2008 : Christophe Blain (bédéaste), sur le Western, à l'occasion de la parution du troisième tome de Gus

« Les Grosses têtes » (Philippe Bouvard), RTL, mercredi 10 décembre 2008, à 16h00 : Virginie Ledoyen (actrice)

« Nonobstant » (Yves Calvi), France Inter, mercredi 10 décembre 2008, de 17h05 à 18h00 : Rachida Brakni (actrice)

« Culture vive » (Pascal Paradou), RFI, mercredi 10 décembre 2008, à 17h10 : avec Jacques Rémy Girerd (réalisateur), pour son film Mia et le Migou

« Et pourtant elle tourne » (Bruno Duvic ; émission qui, malgré son titre, n'est pas spécialement consacrée au cinéma, ni même à Jane Birkin), France Inter, mercredi 10 décembre 2008, de 18h15 à 19h00 : Nanni Moretti (cinéaste et acteur), pour sa prestation dans le film Caos calmo

« Les Matins jazz » (Laure Albernhe), TSF, vendredi 12 décembre 2008, de 6h00 à 9h00 : Laurent Sapir sur Agnès Varda, à l'occasion de la sortie des Plages d'Agnès

« Esprit critique » (Vincent Josse), France Inter, vendredi 12 décembre 2008, de 9h10 à 9h35 : « La discothèque de Jeanne Balibar »

« Débats : après-midi » (Olivier de Lagarde ; « Un sujet d'actualité du jour mis en débat entre deux acteurs ou deux spécialistes de la question »), France Info, vendredi 12 décembre 2008, à 13h17 - Rediffusion à 16h47 : « "L'Emmerdeur" en débat »

« Et pourtant elle tourne » (Bruno Duvic), France Inter, vendredi 12 décembre 2008, de 18h15 à 19h00 : Olivier Bonamici, à Lisbonne, sur le Centenaire de Manoel de Oliveira

« Parking de nuit » (Sophie Loubière), France Inter, vendredi 12 décembre 2008, de 21h04 à 22h00 : « Moi, j'aime les bêtises », à l'occasion de la sortie du film de Joel Coen Burn after Reading 


Émissions radiophoniques sur le cinéma de la semaine à venir :

« Le Zapping » (Mathias Deguelle), France Inter, samedi 13 décembre 2008, de 15h30 à 17h00 : Claude Lelouch (cinéaste), à l'occasion de la sortie de son livre Ces années là (entretiens avec Claude Baignères et Sylvie Perez ; éditions Fayard) - une liste des interventions de Claude Lelouch dans les médias est donnée sur son site : Europe 1, dans l'émission de Michel Drucker, mardi 14 octobre 2008, de 9h30 à 11h00 ;  rance 2, « C'est au programme », jeudi 16 octobre 2008, à 10h ; RTL, « Les grosses têtes », vendredi 17 octobre 2008, à 16h ; France Infos, vendredi 17 octobre 2008, à 9h30 ; France 3, « Ce soir ou jamais », jeudi 23 octobre 2008, à 22h45 ; Europe 1, émission de Laurent Baffie, dimanche 2 novembre 2008, à 11h00 ; France 2, « Vivement dimanche prochain », dimanche 2 novembre 2008, à 19h00 ; RTL, « La tête dans les étoiles » (Laurent Boyer), mercredi 5 novembre 2008, à 15h00 ; France 2, « On n'est pas couché », samedi 22 novembre 2008 ; TF1n « A suivre » (Michel Field), à 23h50, date non définie

« Les Belles captives cinématographiques », France Culture (« Chemins de la création »), dimanche 14 décembre 2008 : « Le métier de cinéma de Christian Gasc, costumier, le dernier dandy à Paris » (Cinémathèque de Toulouse, 12 novembre 2008)

« Cosmopolitaine » (Paula Jacques), France Inter, dimanche 14 décembre 2008, de 14h05 à 16h00 : Joel Coen, pour la film de Joel Coen Burn after Reading

« Tout arrive » (Arnaud Laporte, « Le magazine de l'actualité culturelle »), France Culture, lundi 15 décembre 2008, de 12h53 à 13h30 : Abbas Kiarostami (cinéaste et photographe) et Christian Boltanski (écrivain et sociologue), pour leur livre Pluie et vent (Gallimard)

« Les Lundis du Duc » (Sébastien Vidal), TSF jazz, lundi 15 décembre 2008, de 18h00 à 19h00 : « Cassavetes et le jazz », avec Alain Corneau (cinéaste), Michel Boujut et Noël Simsolo (critiques), à l'occasion d'un coffret DVD rassemblant cinq films de John Cassavetes

« Le fou du roi » (Stéphane Bern), France Inter, mardi 16 décembre 2008, de 11h05 à 12h30 : Tomer Sisley et Mélanie Thierry (acteurs), pour le film Largo Winch

« L'invité classique » (Olivier Bellamy), Radio classique, mardi 16 décembre 2008, à 18h30 : Carole Bouquet (actrice)

« Culture vive » (Pascal Paradou), RFI, mercredi 17 décembre 2008, à 17h10 : Agnès Varda (cinéaste), pour son film Les Plages d'Agnès

« Et pourtant elle tourne » (Bruno Duvic), France Inter, mercredi 17 décembre 2008, de 18h15 à 19h00 : Nanni Moretti (acteur et cinéaste), pour son rôle dans le film Caos Calmo


Compléments et rappels :

- Grille des émissions de radio spécifiquement consacrées au cinéma (la grille de la saison 2008-2009 est en cours de préparation)

- Liste des émissions récentes de France Info sur le cinéma

- Liste des invités des émissions de radio d'information sur le site "Zapping du paf".


Avec la collaboration régulière de l'indispensable Desata, auquel je renouvelle tous mes chaleureux remerciements.


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DU BONHEUR DANS CHAQUE IMAGE

8 Décembre 2008, 22:04pm

Publié par Mister Arkadin

J'ai déjà noté ici que de belles découvertes en archives ou dans des collections de presse se font souvent en furetant un peu plus qu'il ne serait nécessaire pour la recherche que l'on a entreprise. Il est rare que le dépouillement de toute une bobine du microfilm d'un journal d'époque soit du temps perdu, même quand on n'avait souhaité la consulter que pour un article, une date précise. Ainsi suis-je avant-hier tombé sur un texte sur le bonheur signé Abel Gance, publié dans Paris-Soir fin janvier 1924, dans le cadre d'une de ces très nombreuses enquêtes qui paraissaient alors sur toutes sortes de sujet. Je doute que ce document mérite de rejoindre l'intégrale des écrits cinématographiques d'Abel Gance si elle est un jour éditée. En revanche, on y reconnaît aisément le style qu'il déployait pour parler de cinéma !

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CINÉMA, POÈTE MALGRE LUI

7 Décembre 2008, 00:03am

Publié par Mister Arkadin

Je me suis réjouis que l'on retrouve plusieurs fois la signature d'Alain Virmaux dans le dernier numéro de Jeune cinéma. Même sur un sujet que l'on croit connaître, Monsieur Virmaux arrive à surprendre presque immanquablement par la justesse de ses analyses et par sa capacité à fournir au moins quelques renseignements que l'on peut être sûr de n'avoir jamais lus ailleurs. Il l'a surtout fait cette fois en m'apprenant l'existence du numéro 9 d'Aujourd'hui Jean Prévost (le bulletin des Amis de Jean Prévost, printemps-été 2008) sur les rapports de cet écrivain et du cinéma. Cette question m'intéresse depuis des années puisque j'avais consulté les chroniques cinématographiques que Prévost publia à partir de la fin des années 1920 (notamment dans les Nouvelles littéraires et la NRF) pour préparer mon ouvrage sur les origines de la critique de cinéma en France (plus de détails ici et ). J'y avais d'ailleurs cité les textes des pages 11 (passage sur Vuillermoz), 12 et 19 (à propos des controverses sur Charlot) du bulletin.http://www.zulma.fr/datas/images/personnes/personne_75.png

C'est donc avec ingratitude que je ne regretterai que la limitation du corpus, due à la minceur de ce bulletin, qui réussit tout de même, en vingt pages format A4, à présenter à la fois plusieurs textes de Prévost, un de Louis Daquin (sur son adaptation des Frères Bouquiquant) et des études d'Emmanuel Bluteau, Mireille Brangé et Michel Leforestier. La place étant limitée, il a fallu choisir. Espérons qu'un autre numéro d'Aujourd'hui Jean Prévost (1) ou un petit volume (encore faudrait-il trouver un éditeur courageux...) permettra de relire d'autres textes de Prévost sur le cinéma, parus notamment dans Le Crapouillot (dans les numéros spéciaux de 1927 et 1932) et dans Vu (numéro spécial de 1931 sur Charlot), ainsi que ceux parus pendant l'Occupation (« Le cinéma poète malgré lui », « L'avenir du cinéma »). Les fonds d'archives Jean Prévost (de la BnF et de Grenoble) comportent peut-être des inédits que l'on aurait plaisir à découvrir.

En attendant, je prends la liberté, afin de susciter la curiosité et l'envie de poursuivre le travail, de reproduire ci-dessous une longue étude de Jean Prévost parue à Lyon quelques mois avant son décès (texte que j'espère pouvoir reprendre dans l'anthologie dans j'ai déjà parlé ici).


(1) Ce bulletin confirme que les publications non cinématographiques, en particulier celles qui émanent des associations d'amis d'écrivains, sont une source essentielle pour l'histoire du cinéma. À signaler également dans ce domaine la parution récente d'un dossier sur le cinéma dans les Cahiers Marcel Aymé.

« Cinéma poète malgré lui », par Jean Prévost, Confluences, Lyon, n°20, juin 1943, p.495-500

Pour nous, nés avec ce siècle, le cinéma représente une part de nos espoirs qui n'est pas entièrement morte. Le laboureur jette un grain pour en récolter cent. L'artiste ou l'écrivain, au contraire, sur cent graines qu'il sème ou voit semer, s'estime heureux s'il peut en voir une seule échapper aux gelées, à la sécheresse, aux bêtes, et mûrir.

Je me rappelle avoir souvent débattu ces espérances sur l'art de l'écran, avec deux des hommes que je respectais et aimais le plus au monde : Alain et Georges Duhamel. Pour eux, le cinéma n'était qu'un fragment de ce vaste univers moderne tout standardisé, tout mécanique, qu'ils tentaient de rejeter en bloc. Et j'ai toujours été d'accord avec eux sur le fond des choses : tout le progrès matériel n'est rien, moins que rien, s'il n'est pas la condition d'un progrès spirituel. J'essayais de trouver dans quelles conditions le cinéma pouvait devenir une chance de progrès, d'art neuf. Je sentais qu'il est toujours vain de lutter contre l'inéluctable et que mieux vaut s'en servir - comme le skieur ou le plongeur ne doivent jamais contrarier le hasard qui le pousse en avant, - mais continuer l'élan toujours.

Nous nous flattions aussi, des amis comme Alexandre Arnoux ou moi-même, de deviner l'avenir d'un art neuf, d'être ceux qui, penchés sur l'épaule de Giotto, auraient pu deviner à l'avance Léonard de Vinci, Michel-Ange ou Raphaël.

Le cinéma n'a pas encore donné ses chefs-d'œuvre. Il n'a rien fait d'immortel ; il nous laisse toujours en attente. On peut déjà voir en quoi et pourquoi il ne nous a pas déçus.

Il y a un mot de Valéry (un diamant taillé dans les pierres d'Auguste Comte) :

- L'homme est stupide par ce qu'il cherche, et grand par ce qu'il trouve.

La peinture l'a vérifié autrefois. Elle a, pendant des siècles, essayé d'être la photographie, pour comprendre enfin, quand la photographie a existé, que peindre c'était créer. Le film, lui aussi, n'a donné naissance à un art qu'en ayant l'air d'oublier les prodigieux moyens qu'apportait sa machine.

Car on a bien cru, d'abord, que c'était une machine à montrer les choses en mouvement, et qu'il garderait toujours toute la puissance des choses elles-mêmes. A la fin du siècle dernier, à la présentation d'Un Train entre en gare, tous les spectateurs d'un mouvement instinctif, en voyant arriver sur eux la locomotive, reculaient vers le fond de leur siège. Et le cinéma en relief nous donne aussi, pour un quart d'heurs, les mêmes naïves émotions.

Dans les plus anciens films d'avant-guerre, on sent l'enivrement de cette puissance, le désir d'en abuser. Tout ce qui peut se montrer de plus effrayant, tout ce que le drame, le mélodrame ou le fait-divers ont d'horrible, toutes les émotions qui peuvent bouleverser l'homme jusqu'à la convulsion, y sont candidement étalés. Cette force était illusoire. Ces films n'ont pas ému longtemps. Aujourd'hui à peine s'ils nous font rire. En quelques séances, le naïf public avait pris l'habitude de l'image.

On s'aperçut bien vite que cet art de montrer avait d'étroites limites. Le truquage lui-même, après avoir un instant réussi, arrivait à faire douter des images prises sur le vif. On dut s'apercevoir, par exemple, que le cinéma ne peut pas donner l'impression de grandeur en photographiant de très grands objets. À l'époque du télé-objectif, je dis à René Clair :

- Vous aurez un sujet magnifique avec la Descente dans le Maëlstrom d'Edgar Poe. Le télé-objectif vous donnerait le gouffre.

- J'obtiendrais le même effet, me dit-il en riant, avec un tourbillon au fond d'une baignoire.

Ce qui poussait aussi le cinéma naissant à forcer l'expression des émotions, c'est qu'il se servait des acteurs et des gestes de théâtre. Un acteur de théâtre, obligé de faire comprendre, par ses gestes et son expression, ses émotions jusqu'à 50 mètres (distance du fond du poulailler) est obligé de forcer cette expression de la styliser. Son génie consistera à retrouver un naturel dans cette outrance inévitable. Au cinéma, au contraire, le spectateur est, par les gros plans, aussi proche qu'on veut de l'acteur. Vous découvrez l'outrance dans d'expression, plus nettement que dans la réalité.

Ni les metteurs en scène ni les acteurs ne réfléchissaient si loin. Je crois que ce qui a sauvé l'expression, dans les films, de l'imitation servile du théâtre, ce fut le caractère international du nouvel art. Le Français, l'Anglais, l'Allemand, l'Oriental peuvent bien subir les mêmes émotions, ils n'ont pas la même manière de faire les gestes. Le mouvement qui est dramatique pour l'un est bouffon pour l'autre. Et pourtant, il fallait vendre des films outre-mer. On s'aperçut bien vite que les acteurs les plus sobres de gestes étaient ceux qui rendaient le mieux leurs émotions contagieuses en tous pays. Le froid Anglo-Saxon ou l'Oriental impassible l'importaient haut la main sur les sociétaires de la Comédie Française. Le grand public français, au lendemain de la dernière guerre, eut, avec Forfaiture et le jeu de Sessue Hayakawa la révélation de cette sobriété.

Le cinéma muet se trouvait donc enfin mis sur sa vraie voie. Il comprenait les difficultés qu'il avait à vaincre. Il devinait que l'art ne consiste pas à montrer, mais à suggérer.

Le personnage de Charlot, malgré les outrances et les bouffonneries volontaires, est la plus sûre confirmation de cette tendance de l'art. Avec des gestes forcés, soulignés encore par les gros souliers ou la canne qui faisaient de ses membres comme des branches d'un sémaphore, Charlot semblait comique. Mais la vérité de son rôle, touchante, humaine, sentiment pudique de vagabond, cette fragilité invincible, aucun de ses gestes ne les exprimait, tout son rôle le suggérait. Il n'était pas comique et touchant, mais comique pour être touchant. Il niait le réel. Il symbolisait tout. Et la « danse des petits pains » au bout d'une fourchette (symbole élégant de ses illustres grands souliers), résume toute sa puissance, tout le sens de son art.

Chaplin, metteur en scène, eut quelques hasards qui firent beaucoup avancer l'art du film. Ces hasards ne pouvaient servir qu'un homme d'esprit. Dans l'Opinion publique (où il ne jouait pas), un acteur ne savait pas bien mourir. La chute de sa pipe, un peu de cendres sur le tapis, se trouvèrent faire l'affaire bien mieux que le cadavre. Pour filmer un départ, on manquait de wagon français : on se contenta de filmer l'ombre en marche du train partant sur le visage de ceux qui restaient, et l'effet se trouva plus puissant que celui du train.

A ce moment, ce premier grand moment du film muet, tous les écrivains se sentirent comme remis en selle ; beaucoup se mirent à inventer de ces effets, à les organiser en scénarios. Pourquoi la plupart d'entre nous n'ont-ils jamais réussi à faire donner à leurs films le premier tour de manivelle ? C'est que l'écran subit une autre servitude que celle de son outillage. La servitude de l'argent, le besoin de plaire aux bailleurs de fonds, m'ont toujours, je l'avoue, rejeté vers la littérature, et je n'ai pas été le seul. Quand j'allais aux répétitions générales de René Clair, je regardais les dos redoutables des bailleurs de fonds, de distributeurs de films, de tous les obtus qui représentaient le goût du public et auxquels il fallait plaire. Le dandinement de leur râble, les secousses du rire au niveau de leur nombril, les gestes de ses doigts pareils à des harpons, me faisaient trembler pour René Clair. Incomparable équilibriste, il réussissait toujours à leur plaire, en se cachant de faire une œuvre d'art.

La seule fois, pourtant, qu'il put s'affranchir de l'esclavage de l'argent, dans « Entracte », il réussit l'une des plus belles expériences que l'art muet ait jamais faites. Le ralenti, ressource scientifique pour voir dans le détail un mouvement trop rapide (l'Institut Marey nous a montré jusqu'au trajet d'une balle de pistolet) devenait là l'un des plus parfaits instruments du rêve ; il délivrait l'acteur et le spectateur du poids de la matière, de la tyrannie du temps. Il nous faisait entrer dans le monde infiniment léger, dont les moments pouvaient se resserrer ou se dilater à notre guise. Par la variété et le rythme de ses prises de vue d'un même personnage, il arrivait à égaler les effets de la musique, à atteindre le rythme pur, qui fit oublier le travail des pieds et des jarrets, la danseuse elle-même. C'est là que j'ai compris le mot de Mallarmé devant une danseuse accomplie : « Ce n'est pas une femme et elle ne danse pas ».

Art de suggérer, finesse d'expression arrivaient à remplacer le langage. La science du rythme semblait enfin accomplir l'art nouveau, quand déferla la marée du cinéma parlant, qui semblait d'abord fait pour anéantir toutes les découvertes de l'art muet. Car ces découvertes ne semblaient faites à nos yeux, que pour remplacer la parole.

Dès le premier film parlant que je pus voir (c'était « La Mégère apprivoisée »), je cessai d'avoir peur. Je compris que la parole allait dispenser le film de toutes les corvées inévitables : de l'explication du sujet, des sous-titres, des lettres à lire, etc... Et je devinai aussi que la fortune du cinéma parlant serait d'être sobre de paroles ; que la voix, comme quinze ans plus tôt les gestes, cesserait de déclamer.

De même qu'il montre de tout près, le film désormais fait entendre de tout près. Il pourrait, s'il le voulait, nous faire entendre, comme dans « Le Cœur révélateur » d'Edgar Poe, ce rythme intérieur de l'homme, ces deux battements alternés « pareils au bruit d'une montre enveloppée dans du coton ».

Les moindres altérations de la voix et du souffle allaient donner à l'émotion plus de puissance que les cris.

Le texte allait pouvoir servir à un nouvel usage. Du moment que tout était facile à expliquer, on allait pouvoir poétiser. Tel a été, en effet, la seconde carrière de René Clair.

Je lui disais :

- Pourquoi ne mettez-vous pas en scène les comédies d'Alfred de Musset ? Cela vous ressemble par les sentiments, par la grâce, par le goût, par le style : c'est fait pour vous.

Mais René Clair a mis Labiche à l'écran, et il a eu raison. Peut-être a-t-il craint de braquer sur la poésie de Musset le gros œil vitreux du bailleur de fonds. Mais cette crainte l'a bien servi. En gardant l'intrigue et presque le texte de Labiche, il a donné aux images ces fines lumières, aux personnages cette touche délicate de ridicule, aux vêtements ce désuet délicieux que enchante le sens, qui nous emmène dans un univers plus limpide, plus léger, que jamais n'avait connu Labiche. Dans « Le Chapeau de paille d'Italie » ou « Les deux Timides », le texte est dépassé sans cesse ; parfois même l'émotion et la tendresse arrivent sans être attendues. Les « Noces de Figaro » chantées par Mozart, au lieu d'un vaudeville satirique, étaient devenues un poème d'amour. De même, René Clair a pris du Labiche et l'a amené au niveau de Musset.

Si le film a un avenir dans l'épopée, nous savons que c'est aux figurants qu'il le devra. A des figurants qui sauront jouer ensemble, qui croiront à leur art, et qui sauront tous éprouver en même temps les mêmes émotions. Le chef-d'œuvre du film épique, jusqu'à ce jour, c'est « Verts Pâturages ». Est-il besoin de dire que le texte, qui ne pouvait prétendre égaler la Bible, avait bien raison de se simplifier à l'extrême ? La plus belle scène de « Verts Pâturages » aurait été possible dans un film muet. C'est celle où Moïse, assis et aveugle, dit adieu à son peuple ; chacun à son tout lui pose la main sur l'épaule, et il caresse leurs mains doucement, jusqu'au moment où le vieillard, dépassé par tous, qui va mourir, pose enfin sur son épaule sa main solitaire - Image simple et poignante, qui mériterait d'être immortelle - mais le film, sauf les actualités, n'admet nulle part les morceaux choisis.

Que la tâche essentielle du cinéma ne soit pas de montrer, mais de créer, c'est ce que vient de créer, c'est ce que vient de prouver avec éclat la grande revanche du dessin animé sur le film purement photographique. Sans doute, il a fallu commencer au niveau des enfants ; mais ce n'est pas une mauvaise condition pour un art dans l'enfance.

J'ai parlé ailleurs de cette vie sans enfance qui a été celle de Walt Disney, du gosse de l'école primaire forcé de gagner sa vie, à 3 heures1/2 du matin ou à 10 heures du soir, en vendant des journaux. J'ai conté comment, à 15 ans, marchand de sucreries dans les trains, il avait fait faillite en mangeant son fonds ; comment en 1920, seules l'extrême économie de ce procédé, la facilité d'employer de vieux appareils, l'avaient d'abord amené, pour la publicité et pour des bandes à court métrage, au dessin animé. J'ai dit comment sa première invention, le lapin Oswald, lui avait été prise par de peu scrupuleux trafiquants. Et aussi comment s'étant fait un jouet d'enfant avec une petite souris grise, cette souris, d'abord Mortimer, puis rebaptisée Mickey, lui avait, après vingt-cinq ans de misère, apporté la fortune.

Ce qu'il faut répéter surtout, comme l'un des plus frappants caractère du génie de Disney, c'est le don qu'il a de traduire toute musique en dessins et en mouvements visibles. Dans ses premières Soties symphoniques, conçues au rythme des blues, au lieu de montrer des danseurs, il faisait danser des arbres, des maisons, des îles, tout l'univers. Quand Disney n'est pas enfantin, il a la sombre imagination du Nord. Aussi sa « Danse macabre », l'une des  plus anciennes Soties symphoniques, est-elle peut-être restée son chef-d'œuvre. Tous les os de notre squelette, jeu de dominos, jeu de piano, enfin jeu de jonchet, accompagnant la musique de Saint-Saëns. Cette musique lui facilitait la tâche : c'est l'une de plus mimiques et des plus visuelles qui soient. Inutile de parler ici de « Blanche -Neige », première ébauche de ce que sera l'opéra moderne. « L'Apprenti Sorcier » résume mieux Disney. Mickey y figure, de plus en plus simple de forme : suggéré, non montré. La terrible Aventure du manche à balai qui consent, sous l'incantation, à porter des seaux d'eau et qui ne sait plus s'arrêter et devient déluge, est aidée ici par la musique de Paul Dukas. Mieux qu'aucun documentaire, elle résume et symbolise le le drame du monde moderne, capable de déchaîner la machine et incapable de la dominer ; drame de la surproduction, de la crise, de la guerre peut-être.

Le cinéma, sans doute, rapetisse tout ce qui est grand. Il lui suffit d'un homme de génie pour grandir ce qui est petit, pour faire de Mickey-la souris le symbole d'un monde.

L'art de l'écran n'a pas été tué par la parole. Il résistera à la couleur, il résistera aux reliefs. Et ce sera de la même manière. Il s'apercevra vite que, là encore, il est vain de tenter de produire et qu'il vaut mieux suggérer. L'effet criard des premiers films en couleurs se trouvera bientôt moins puissant que l'effet des nuances, que le camaïeu délicat dont pas un metteur en scène n'a encore fait l'essai. Et le relief lui-même, ce barbare, si l'on sait en adoucir les effets au lieu de les exagérer, deviendra une caresse pour les yeux.

Tout ce que nous avons vu, encouragé, aimé, ne sera donc plus qu'un art de précurseur ? Peut-être. Dans son roman sur le cinéma, « Adams », œuvre manquée mais pourtant grand poème, Clair concluait :

- L'œuvre du cinéaste est mortelle. La pellicule, hélas, se détache de son support de celluloïd.

Cet art a cherché, jusqu'à présent, tous les progrès techniques possibles, sauf la durée. Il la trouvera, par les jeux aveugles de l'ambition et de l'argent, dès qu'il l'aura méritée. J'attends patiemment la bande indestructible. Ma seule crainte est qu'elle ne devance le premier film qui méritera d'être immortel.

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