Site personnel de Pascal Manuel Heu, consacré à ses publications, au cinéma et à la critique. Page complémentaire : https://www.facebook.com/Mister-Arkadin-1041074065975069/
Il y aurait des sorties en salle qui ne seraient que "techniques". Qu'est-ce à dire ? Il s'agit de films dont il n'est pas ignoré que peu de spectateurs viendront les voir en salles, mais qu'il faut tout de même sortir afin qu'ils obtiennent le label "cinéma", nécessaire pour l'accès à certaines sources de financement et surtout à certaines conditions de passage à la télévision. À l'inverse, il est manifestement des passages techniques sur les petits écrans, quand une chaîne se résout à diffuser un film en pleine nuit afin de respecter ses engagements vis-à-vis du cinéma français, qui figurent dans son cahier des charges. Ce fut indéniablement le cas de la programmation par TF1, dans la nuit du dimanche 26 au lundi 27 octobre, de Holy Lola, à 2 heures 55. On voudrait enterrer un film qu'on ne s'y prendrait pas autrement. L'ironie est que TF1, si je ne m'abuse, fait partie des producteurs du dernier film de Bertrand Tavernier, Dans la brume électrique, dont on annonce la sortie en France en 2009, dans une version montée par le réalisateur, alors que le montage final de la version qui sera projetée aux USA lui échapperait.
Si au moins ces petites misères faites à Tavernier, cinéaste estimable, me redonnaient l'élan nécessaire pour que j'achève les articles que j'avais commencé à écrire sur Holy Lola, mais aussi sur son non moins remarquable Laissez-passer (qui passe la semaine prochaine sur TPS Star), tous deux injustement étripés par une partie de la critique !
L'indigence de Siné-Hebdo s'étant amplement confirmée (1), il devient de plus en plus difficile de bénéficier du "bienfait collatéral" dont je m'étais réjoui le 10 septembre dernier (ici). Dépenser chaque semaine deux euros pour un canard aussi faiblard uniquement pour y lire Bouyxou et Godin, qui ne sont au demeurant pas présents dans chaque numéro, c'est un peu trop (2) ! Quand donc l'un ou l'autre de nos nombreux centres de documentation sur le cinéma reprendra-t-il le travail d'Auguste Rondel (3), qui, dans l'entre-deux guerres, non content d'établir des recueils de presse sur les films et les personnalités du cinéma, en établissait également par titres de journaux et noms de critiques ? Voici encore une lacune qui justifierait la création de l'institut Mémoires de l'édition et de la documentation cinématographiques (le "Médoc") que j'appelais de mes vœux le 21 octobre dernier (là).
À défaut de lire Jean-Pierre Bouyxou régulièrement dans Siné-Hebdo, il est possible de se consoler, amplement, en savourant le copieux dossier que la revue Lunatique (4) lui a consacré dans son numéro 78-79 (2008, p.192-317). Réalisé par Jean-Pierre Fontana, avec l'aide de Jean-Pierre Bouyxou, il comprend des textes de Nicole Brenez, Gudule, Brigitte Lahaie, Olivier Bailly, Christophe Bier, Jacques Boivin, Philippe Bordier, Laurent Chollet, Georges de Lorzac, Pierre Delannoy, Jean-Pierre Dionnet, Stéphane de Mesnildot, Yves Frémion, Noël Godin, Jacques Goimard, Bernard Joubert, Gérard Lenne, Roland Lethem, Yves-Marie Mahé, Raphaël-G. Marongiu, Alain Paucard, Alain Petit, Jean Rollin et Siné. Excusez du peu ! Même s'il y a du bon dans ces textes d'amis, voire du très bon (par exemple la reproduction des chroniques prononcées par Christophe Bier les 10 mars et 19 mai 2007 dans le cadre de « Mauvais genres », sur France Culture), c'est encore les parties autobiographique et bibliographique qui sont les plus passionnantes. Elles rendent pertinent le rappel par l'un des témoins, Philipe Bordier, d'une anecdote relative à Orson Welles. Celui-ci arrivant dans une salle assez peu remplie pour y prononcer une conférence aurait déclaré : « Je m'étonne que vous soyez si peu et que je sois si nombreux. » Bouyxou n'a tout de même pas autant de talent et de talents que Welles, mais il en a assurément assez pour pouvoir reprendre la phrase à son compte.
Entre autres pages délectables et rappels de tous les hauts faits de Bouyxou, on lira bien sûr en priorité le récit de l'aventure Fascination et on appréciera qu'aient été repris les gouleyantes réponses de JPB aux questionnaires cinéphiliques de "Cinérivage" (les miennes, ici et là, font pâles figures à côté !). Le dossier renvoie également très judicieusement au long entretien donné à Stéphane de Mesnildot par Bouyxou, en huit parties (disponible sur Daily Motion).
Enfin, ce numéro de Lunatique a paru trop tôt pour qu'y soit annoncée la parution d'une « encyclopédie du cinéma érotique et pornographique français », baptisée Cinérotica, paraissant en kiosque depuis début octobre sous la direction de Christophe Bier (6) (24 livraisons mensuelles sont prévues ; espérons que les prochaines couvertures seront moins laides !). Le premier numéro, écrit par Italo Manzi, Frédéric Tachou, a fait l'objet d'un bon compte rendu par Albert Montagne. Quel rapport avec Jean-Paul Bouyxou, mis à part l'objet de cette publication (l'un de ses sujets de prédilection) ? Elle est accompagnée par un Dictionnaire du long métrage français érotique & pornographique. 16 et 35 mm, lui aussi dirigé par Christophe Bier et auquel collabore Jean-Pierre Bouyxou, où tous les films de ce genre sont recensés avec la plus extrême précision. Tant d'érudition pour un sujet que d'aucuns trouveront quelque peu frivole, cela donne le vertige ! Voilà au moins un travail bibliographique que n'aura pas à entreprendre le "Médoc"...
Note :
(1) Un exemple : l'éditorial de Siné paru dans le n°6 (15 octobre 2008), reproduit par Alain Soral sur son site le 20 octobre.
(2) Appel à mes quelques (généreux) lecteurs : s'ils vous arrivent d'acheter ou de trouver un numéro de Siné-Hebdo, prière de me le garder, que j'y prélève les chroniques des entartreurs : merci !
(3) La collection théâtrale Auguste-Rondel est conservée au Département des arts du spectacle de la Bibliothèque nationale de France.
(4) « Les Univers de l'imaginaire », Éditions Eons productions, Caëstre (59) ; www.eons.fr.
(5) La dernière partie de l'entretien revient elle aussi sur Fascination.
(6) Auteur du remarquable Censure moi. Histoire du classement X en France, Paris, L'Esprit frappeur, 2000, 208 p.
De la même manière que j'ai commencé une liste des cinéastes et films passant sur scène (« Cinéastes et cinéma sur scène »), voici une ébauche de liste d'expositions relatives au cinéma :
- « Fellini, rêves de Venise et autres songes », exposition au Musée Alexis Fogel (à Morges) - Cf. émission « Dare-Dare » (« L'actualité culturelle », Martine Béguin et Laurence Froidevaux), RSR, mardi 7 avril 2009, à 12h03, avec Gérald Morin (producteur et collectionneur)
- « Thiron fait son cinéma » (sur le polar), organisée notamment par Cinestudio, à La Grange aux Dîmes (Domaine de l'Abbaye), Thirons-Gardais (28), du 4 juillet au 4 octobre 2009
- "Lumière ! Le cinéma inventé", Salon d'Honneur du Grand Palais, Paris, 27 mars - 14 juin 2015, dimanche et lundi de 10h à 20h, du mercredi au samedi de 10h00 à 22h
- « Les cinémas de Paris. 1945-1995 », exposition conçue par Virginie Champion, Bernard Lemoine et Claude Terrdeaux, Délégation à l'action artistique de la Ville de Paris, Marie du sixième arrondissement, 1995
- "Cinéma Premiers Crimes", Galerie des bibliothèques de la Ville de Paris (Paris 4e), 17 avril - 2 août 2015, du mardi au dimanche de 13h à 19h (nocturne les jeudis jusqu’à 21h ; gratuité pour tous les jeudi de 18h à 21h)
- « Arts et cinéma : les liaisons heureuses », Musée des Beaux-Arts, Rouen, 18 octobre 2019 - 10 février 2020 ; puis Fondation de l'Ermitage, Lausanne, 26 juin - 1er novembre 2020
- « Léger et le cinéma », organisée par les musées nationaux du XXe siècle des Alpes-Maritimes et La Réunion des musées nationaux - Grand Palais, Musée national Fernand Léger, Biot, 11 juin - 19 septembre 2022
- « Chantal Akerman : Travelling », Jeu de Paume (Paris), exposition organisée avec le Palais des Beaux-Arts de Bruxelles, la fondation Chantal Akerman et la Cinémathèque belge de Belgique, du 28 novembre 2024 au 19 janvier 2025
A noter, dans le numéro de juillet 2011 de Perspective, la revue de l'Institut national d'histoire de l'art, un débat sur le thème« Cinéma et musée : nouvelles temporalités » (p.532-534), avecErik Bullot, Angela Dalle Vacche, Philippe-Alain Michaud et Hervé Joubert-Laurencin.
-Venturi(Riccardo), « Écran et projection dans l’art contemporain », Perspective, 2013, n°1, mis en ligne le 1er juillet 2013, consulté le 3 mai 2014 ; http://perspective.revues.org/2004
L'invité principal était Alexandre Astruc, écrivain et cinéaste, venu présenter son dernier roman, Les Secrets de Mademoiselle Fechtenbaum.
Il a ensuite été question de l'actualité, des films (Le crime est notre affaire ; Home ; Un conte d'été polonais ; Magique ; Premières neiges ; En souvenir de nous), des rétrospectives ("L'Europe et la Grande guerre", Cycle de projections aux Invalides) et des publications (1940-1945. Années érotiques, Vichy ou les infortunes de la vertu, de Patrick Buisson).
« Esprit critique » (Vincent Josse), France Inter, mercredi 29 octobre 2008, de 9h10 à 9h35 : Ursula Meïer (cinéaste) et Isabelle Huppert (actrice), pour leur film Home
« Place de la toile » (Caroline Broué et Thomas Baumgartner), France Culture, vendredi 31 octobre 2008, de 11h00 à 12h00 : « La 3D sera-t-elle la 3ème révolution du cinéma ? », avec Lionel Bertinet (Directeur adjoint à la Direction du Multimédia et des industries techniques du CNC), Ben Stassen (réalisateur du film en 3D Fly me to the moon), Stéphane Faudeux (Directeur de la société Avance rapide, et fondateur de Dimension 3 expo, premier Forum international de l'image 3D-relief) et Luc Robert (Ancien chercheur à l'Inria, fondateur de Realviz, société spécialisée dans l'édition de logiciels pour le trucage numérique et la production en images de synthèse)
Émissions radiophoniques sur le cinéma de la semaine à venir :
« Questions d'éthique » (Monique Canto-Sperber), France Culture, samedi 1er novembre 2008, de 12h00 à 12h30 : « Etre enceinte, avorter, quel choix ? Quelles décisions de vie ? », avec Claire Simon (cinéaste), pour son film Les Bureaux de Dieu
« Regarde les hommes changer » (Frédéric Taddéï), Europe 1, samedi 1er novembre 2008, de 11h00 à 12h00 : Jean-Paul Rouve (acteur et réalisateur)
« Cosmopolitaine » (Paula Jacques), France Inter, dimanche 2 novembre 2008, de 14h05 à 16h00 : Marco Puccioni (cinéaste), pour son film Riparo
« Easy tempo » (L.Valéro et Thierry Jousse), France Musique, dimanche 2 novembre 2008, de 23h00 à 24h00 : « Génération Morricone (1) »
« Le fou du roi » (Stéphane Bern), France Inter, lundi 3 novembre 2008, de 11h05 à 12h30 : Michel Boujenah (acteur)
« La tête dans les étoiles » (Laurent Boyer), RTL, lundi 3 novembre 2008, de 14h30 à 16h00 : Michel Boujenah (acteur)
« La tête dans les étoiles » (Laurent Boyer), RTL, mercredi 4 novembre 2008, de 14h30 à 16h00 : Claude Lelouch (cinéaste)
« L'humeur vagabonde » (Kathleen Evin), France Inter, mercredi 4 novembre 2008, de 20h10 à 21h00 : Claire Simon (cinéaste), pour son film Les Bureaux de Dieu
« Une vie, une œuvre » (Sophie Douek), France Culture, jeudi 6 novembre 2008, de 10h00 à 11h00 : Jacques Demy (cinéaste), avec Jean-Pierre Berthomé, Bernard Toublanc-Michel et Patrice Martineau (réalisateurs), Mathieu Demy, Rosalie Varda, Jean-Serge Pineau, Yves Aumont, Jean Coindet, Monique Crêteur, Louise-Françoise Hevieu et Agnès Varda
« À portée de mots » (François Castang), France Musique, jeudi 6 novembre 2008, de 12h07 à 13h00 : Philippe Collin (cinéaste)
« La tête dans les étoiles » (Laurent Boyer), RTL, vendredi 7 novembre 2008, de 14h30 à 16h00 : Jean-Pierre Darroussin (acteur et réalisateur)
« Le 20 heures » (T.Lebon), TSF, vendredi 7 novembre 2008, à 20h00 : Sortie du DVD de l'intégrale des films de Jacques Demy
Rediffusion :
« Mardis du cinéma » (Marie-Pierre Vettes, 7 juillet 1992), « Nuits » de France Culture, nuit du dimanche 2 au lundi 3 novembre 2008, de 1h00 à 2h35 : Le Cercle des poètes disparus (de Peter Weir)
Lu aujourd'hui dans la chronique que Philippe Lançon signe dans Charlie-Hebdo (p.13 : « Les héros sont répliqués ») : « Après tout, le cinéma sert aussi à ça : à négocier avec des héros, dans l'ombre, sa destinée. Il est toutefois permis de le préférer quand il crée ses propres légendes : Raging Bull est un bon film, mais le boxeur de cinéma, c’est Rocky. A Star is Born sera toujours plus réussi que la biographie d’une star ayant existé. »
Peut-être l’auteur n’approuverait pas mon interprétation si j’affirmais qu’il nous incite à préférer le film de Stallone à celui de Scorsese. Toutefois, le simple fait qu’un journaliste parisien réputé puisse comparer deux de leurs films sans rabaisser celui de Stallone montre la faveur critique dont celui-ci commence à être l’objet.
« Coup de projecteur », TSF Jazz, vendredi 24 octobre 2008, à 8h30, 11h30 et 16h30 : « Richard Fleischer et le film noir », avec Bertrand Tavernier (cinéaste et cinéphile), qui intervient sur un bonus d’un coffret DVD édité par les éditions Montparnasse
Émissions radiophoniques sur le cinéma de la semaine à venir :
« À quoi pensez-vous ? » (Brigitte Lefèvre), France Culture, samedi 25 octobre 2008, de 14h15 à 15h00 : Jean-Michel Ribes (homme de théâtre et cinéaste)
« C’est arrivé demain » (Dominique Souchier), Europe 1, dimanche 26 octobre 2008, de 09h00 à 10h00 : Kad Merad (acteur)
« Eclectik » (Rebecca Manzoni), France Inter, dimanche 26 octobre 2008, de 10h10 à 11h00 : Olivier Gourmet (acteur), pour le film Home, d’Ursula Meier
« Cosmopolitaine » (Paula Jacques), France Inter, dimanche 26 octobre 2008, de 14h05 à 16h00 : Tom McCarthy (cinéaste), pour son film The Visitor
« Le fou du roi » (Stéphane Bern), France Inter, lundi 27 octobre 2008, de 11h05 à 12h30 : Laetitia Colombani (cinéaste) et Dominique Besnehard (agent et acteur), pour le film Mes stars et moi
« Le fou du roi » (Stéphane Bern), France Inter, lundi 27 octobre 2008, de 11h05 à 12h30 : Bertrand Blier (cinéaste)
« Découvertes » (Michel Drucker), Europe 1, lundi 13 octobre 2008, à 9h30 : 2008, à 9h30 : Olivier Weber (scénariste et réalisateur), pour son film La Fièvre de l’or
« Culture vive » (Pascal Paradou), RFI, mercredi 29 octobre 2008, à 17h10 : Raymond Depardon (cinéaste), pour son film La Vie moderne
« L’humeur vagabonde » (Kathleen Evin), France Inter, mercredi 29 octobre 2008, de 20h10 à 21h00 : Raymond Depardon (cinéaste), pour son film La Vie moderne
« À portée de mots » (François Castang), France Musique, jeudi 30 octobre 2008, de 12h07 à 13h00 : Simon Abkarian (comédien)
« Forcément sur Europe 1 » (Marc-Olivier Fogiel), Europe 1, vendredi 31 octobre 2008, de 8h49 à 8h57 : Dany Boon (acteur et cinéaste), pour la sortie en DVD de son film Bienvenue chez les Ch’tis
Dans le dernier numéro de la « revue des amateurs de cinéma », Cinéscopie (n°11, septembre 2008), particulièrement riche (avec, entre autres, un portrait du peu connu Albert E. Christie, par Georges D'Acunto, et un reportage de Michel Gasqui à l’Institut Lumière de Lyon, ainsi que ma brève note de lecture sur Jean Brérault, que j’avais publiée au préalable ici), c’est le très bel hommage de Pierre Guérin à « l’ami Roger », le collectionneur, historien et archiviste du cinéma émérite Roger Icart, dont j’avais signalé le décès en juin dernier, qui a le plus retenu mon attention. D’autant que Pierre Guérin propose également une bibliographie qui confirme que l’œuvre d’Icart est loin de se limiter à l’exploration des films et de la vie d’Abel Gance.
Il est d’autant plus dommage que la collection de films et les archives de Roger Icart aient été éparpillées entre quelques bouquinistes et marchands toulousains, au lieu d’être recueillies par une institution patrimoniale. Aurait pu être créé un fonds Icart, particulièrement précieux pour les historiens du cinéma, en plus de contribuer à perpétuer la mémoire de son œuvre.La Cinémathèque de Toulouse aurait été le lieu idéal, vu les liens qu’avait entretenus Roger Icart avec celle-ci, vu aussi la richesse de son centre de documentation, à laquelle il n’était d’ailleurs pas étranger, et la qualité des conditions de conservation et de consultation qu’elle garantit. Ce n’est hélas pas la première fois, et sans doute pas la dernière, que les bibliothèque et vidéothèque, ainsi que les archives d’un grand cinéphile (ou d’un grand cinéaste, Abel Gance le premier !) se retrouvent dispersées dans la nature, voire disparaissent. Loin de moi l’idée d’incriminer tel ou tel, que ce soient les héritiers (dont ce ne peut être la préoccupation majeure au moment où le malheur les frappe), les conservateurs d’institutions cinématographiques (qui croulent sans doute sous le travail administratif que génèrent désormais ces grosses maisons, ce qui expliquerait leur manque de diligence) ou les bouquinistes (dont il serait malvenu d’assimiler l’opportunisme à de la cupidité, vu que c’est leur métier et que leur intervention permet parfois de sauver l’essentiel), voire les personnes qui sentent la mort venir, dont on peut aussi concevoir qu’elles n’aient plus alors le souci ou la force d’assurer la pérennité de leurs collections.
Je ne puis cependant que regretter de ne pas m’être montré quelque peu "charognard" en n'osant m'enquérir auprès de ses proches, dès l’annonce du décès de Roger Icart, de ce qu’allaient devenir ses archives. J’espérais, dans la nécrologie que j’ai publiée sur le présent site, que le manuscrit du dernier livre qu’écrivait Icart pourrait ressurgir un jour, au mieux sous forme de livre, ou au moins dans une série d’articles. Aurait été tout aussi indispensable la préservation des collections de publications anciennes, étrangères aussi bien que françaises, et pas seulement cinématographiques, mais aussi des notes et fiches que préparait Roger Icart pour la rédaction de ses ouvrages. Je me souviens par exemple avoir échangé des informations avec lui sur la critique de l’Occupation (lui pour son livre sur la période, moi pour l’anthologie que je prépare, déjà mentionnée là). Il m’avait, entre autres, donné copie de son inventaire des critiques cinématographiques publiées par Carlo Rim dans D.I. (Dimanche Illustrée, Marseille), hebdomadaire dont même la Bibliothèque nationale de France, si je ne me trompe, ne possède la collection. Combien d’autres inventaires, fiches d’information et revues de presse résultant d’une somme de travail et de connaissances considérable comprenaient les papiers de Roger Icart ? Quand on sait la richesse d’information et de documentation que contiennent certains fonds de critiques conservés à la Cinémathèque française ou au Département des Arts du Spectacle de la BnF, en particulier dans la collection théâtrale Rondel (je pense notamment au fonds Marcel-Lapierre), on ne peut que déplorer qu’un fonds Icart n’ait pu être constitué. Qu’en est-il des autres grands cinéphiles disparus cette année ? La mémoire de Lo Duca, de José Baldizzone, de Henri Agel (et de sa femme Geneviève, toujours bien vivante, si mes informations sont exactes) et de Claude Baignères, ainsi que l’histoire de la cinéphilie, ne mériteraient-elles pas que leurs archives puissent être consultées par leurs successeurs en cinéphilie et par les historiens de la culture ?
Francis Lacassin avait pour sa part pris soin de déposer une bonne partie de ses archives à l’Institut Mémoires de l’édition contemporaine. Sage précaution ! Les collections de l’Imec concernent essentiellement les « principales maisons d'édition », les « revues » et « différents acteurs de la vie du livre et de l’édition ». Ne serait-il pas plus que temps que les historiens, chercheurs en cinéma, amateurs éclairés et cinéphiles s’associent, par exemple sous l’égide de l’Association française de recherche en histoire du cinéma (Afrhc), pour créer un Institut similaire, une sorte d’institut "Mémoires de l’édition et de la documentation cinématographiques" ("Médoc") (1) ?
(1) Les professeurs Marc Cerisuelo et Hervé Joubert-Laurencin ont créé, au sein de l’Université de Paris VII, un groupe de recherche Documents et Ecrits de Cinéma : Littérature, Interprétation, Critique (DECLIC), qui, en plus de séminaires sur le sujet, se proposait de constituer des archives de la critique de cinéma. Je ne crois cependant pas qu’à part la gestion d’un fonds André-Bazin et des collections de l'association « L'Image et la Mémoire », ce groupe ait entrepris la collecte, aussi systématique que possible, de fonds d’archives cinéphiliques.
De même qu’une femme dénudée sert fréquemment d’argument de vente pour des automobiles, le cinéma est jugé suffisamment "vendeur" par les publicitaires pour être mis en avant à propos de tout et n’importe quoi. Combien de numéros arborant un « spécial cinéma » en couverture alors que le contenu des magazines n’a souvent que peu à voir avec le septième art ?
Voici que les éditions Autrement, autrement sérieuses d’ordinaire, s’y mettent. Pour illustrer un volume sur la guerre d’Algérie, La France en guerre 1954-1962, « résultat d’une recherche qui a été menée pendant quatre ans à l’Institut d’histoire du temps présent (IHTP / CNRS) et au Centre d’histoire sociale du XXe siècle (UMR 8058) » (si ce n’est pas sérieux, ça !), elles exhibent la Brigida en couverture. J’ai fini par découvrir le titre sur la gauche évoquant le sujet traité par l’ouvrage. Ce n’est assurément pas ce qui saute immédiatement aux yeux !
A mon tour, je saisis ce prétexte pour publier une galerie de photos en rapport avec ce livre résultat d’une recherche du CNRS et de l’UMR 8058.