Mister Arkadin

STALLONE, LA CRITIQUE ET LE "CINÉMA DES ANNÉES REAGAN/BUSH"

20 Mars 2008, 01:48am

Publié par Mister Arkadin

Contrairement à ce que j’annonçais dans mon article du 4 février, « Stallone et John Rambo », le dernier Stallone n’a pas fait l’objet d’une lecture idéologique aussi marquée que ses films des années 1980, volontiers considérés comme les représentants d’un "cinéma reaganien", revanchard, "sûr de lui et dominateur". John Rambo n’a guère été désigné comme l’équivalent pour les années 2000 (un "cinéma bushien" en quelque sorte), sinon par Antoine de Baecque, selon lequel il s’agirait de « jou[er] du muscle pour faire croire à la puissance américaine reconquise » (L’Histoire, n°328, février 2008, p.23), et par Clara Dupont-Monod (« "Pour Rambo, les choses se résument à une lutte du bien et du mal." On dirait du Bush ! », Marianne). À la dénonciation rituelle de l’anti-communisme primaire n’aura ainsi que marginalement succédé un anti-américanisme non moins réducteur. Selon une tradition bien établie de la critique française, c’est essentiellement la forme qui a retenu l’attention, notamment la radicalité dans la représentation de la violence, soit pour s’en plaindre (« Rambo vire au gore », d’après Marion Sauvion, Le Parisien, 6 février 2008, p.30), soit pour louer « un tel traitement de l’action, loin de toute aseptisation », notamment par le numérique, qui serait plus acceptable pour Hollywood (d'après Jean-François Rauger, Le Monde, 6 février 2008, p.24). Au moins le film n’a-t-il pas été traité par le mépris, ce qui confirme, toutes proportions gardées, que l’évolution de la réception en France de l’œuvre de Stallone ressemble de plus en plus à celle d’Eastwood, du dédain, voire du mépris, à la considération, voire à l’admiration (« Le genre de film qui se bonifie avec le temps », est-il significativement écrit, dans Télérama, pour le passage de Rambo à la télévision dimanche dernier).

Le-Cin-ma-des-ann-es-Reagan.jpgAyant moi-même participé à ce mouvement, par mon article sur « Les défis de Sylvester Stallone » (Jeune cinéma, n°310/311, été 2007, p.94-97), je ne puis que m’en féliciter, d’autant que John Rambo m’a paru un film presque aussi digne d’intérêt que Rocky Balboa, même si je ne saurais vraiment expliciter pourquoi. Mieux encore, j’ai eu le plaisir de découvrir depuis un fort sérieux et universitaire ouvrage collectif arborant Rocky en couverture (Le Cinéma des années Reagan. Un modèle hollywoodien ?, dir. Frédéric Gimello-Mesplomb, Paris, Nouveau Monde Éditions, janvier 2007, 366 p.). Plusieurs études y sont consacrées à Rambo et à Rocky, d’une manière assez proche de la mienne, puisque sont en particulier analysées « la mise en scène de l’action à travers le prisme de la télévision » dans « la série des Rocky » et « la réception française de Rambo II et Rocky IV ». Entres autres aspects très éclairants, Laurent Kasprowicz y décortique l’influence de l’esthétique du clip sur la mise en scène des Rocky (cf. un tableau comparatif des scènes de combats finaux, où la durée moyenne d’un plan diminue progressivement de 3,34 à 1,35 secondes !) et y démontre subtilement que les Rambo ne seraient pas nécessairement les films de propagande vilipendés à l’époque, en tout cas pas des films exempts de toute critique à l’égard de la politique reaganienne. Le livre regorge d’études tout aussi passionnantes et extrêmement documentées (les nombreuses sources et références étant aussi bien françaises qu’anglo-saxonnes, aussi bien livresques qu’issues d’Internet) sur Dirty Harry et le western urbain, sur La Fièvre au corps et le "thriller érotique" ou sur Terminator et « les craintes de l’information de la société », etc. Les esprits forts auraient tort de ricaner en voyant tant de science dépensée à propos de si vils "objets de cinéma". Au moins depuis Kracauer, nul n’est en effet censé ignorer que l’analyse des films à succès d’une époque n’est pas moins légitime que celle de ses chef-d’œuvres les plus consensuels.


Complément : une version remaniée du texte de Laurent Kasprowicz sur les Rocky (« Mise en scène de l'action et mise en abîme du spectateur dans Rocky (1976-2006) ») a paru sur Objectif-cinema.com.

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CHRONIQUE BUISSONNIÈRE DES ANNÉES 50

18 Mars 2008, 08:00am

Publié par Mister Arkadin

Philippe-d-Hugues.jpgAujourd’hui sort le nouveau livre de Philippe d’Hugues, mon "patron" et ami du "Libre journal du cinéma". Je reviendrai sans doute plus longuement sur cette Chronique buissonnière des années 50 (Éditions de Fallois, 198 p.) car une très large place y est faite au cinéma. D’ores et déjà, j’indique que l’auteur s’est déjà entretenu de son livre au micro de Radio Courtoisie, avec Hervé Coutau-Bégarie mardi dernier, et qu’il en sera probablement question au cours du prochain "Libre journal du cinéma" (auquel je ne participerai pas), jeudi 20 mars à midi. Il est également l'invité de William Leymergie sur Europe ("Viva quinquas", mercredi 19 mars, de 23h à 23h59).


Informations et liens complémentaires :

Philippe d’Hugues a présenté son ouvrage dans plusieurs émissions de radio :

-          Son propre Libre journal du cinéma, sur Radio courtoisie, le 20 mars : émission pouvant être récupérée ici ;

-          Le Libre journal de Philippe Maxence, sur Radio courtoisie, le 31 mars : émission pouvant être récupérée ici ;

-          Le Libre journal des Historiens, sur Radio courtoisie, le 3 avril : émission pouvant être récupérée ici ;

- Derrière la porte, sur Radio Bandera Nera, le 8 avril : émission pouvant être écoutée et récupérée ici.

- Libre journal d'Henry de Lesquen, sur Radio Courtoisie, le 9 juin : émission pouvant être récupérée ici.

- Libre journal de Jean Sévilla, sur Radio Courtoisie, le 20 juin : émission pouvant être récupérée ici.

- Au fil des pages, sur RCF, le 30 juin : émission pouvant être récupérée ici.

- Livres en poche d'Anne Brassié, sur Radio Courtoisie, le 31 juillet : émission pouvant être récupérée  ici.

 

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PALMARÈS 2007

17 Mars 2008, 11:13am

Publié par Mister Arkadin

Listes des meilleurs films sortis en 2007 pour les médias français :
 

Le Monde : Still Life ; Tout est pardonné ; La Graine et le mulet ; Boulevard de la mort / Inland Empire / 4 mois, 3 semaines, 2 jours / Election 2 / Ratatouille / Les Climats

 
Les Inrockuptibles :
 

1. rédacteurs : La Graine et le mulet ; Les Promesses de l’ombre ; Les Chansons d’amour ; Les Amours d’Astrée et de Céladon ; Still Life ; Avant que j’oublie ; Bug ; Paranoid Park ; Boulevard de la mort ; Syndroms of a Century / La nuit nous appartient

2. lecteurs : Paranoid Park ; Les Promesses de l'ombre ; Control ; Inland Empire ; La nuit nous appartient ; Les Chansons d'amour ; Boulevard de la mort ; Persepolis ; Still Life ; Zodiac
 

L’Express (Éric Libiot) : Les Chansons d’amour ; La Graine et le mulet ; Secret Sunshine ; Rue Santa Fe

 
Le Figaro Magazine :
 

1. rédacteurs : La Vie des autres ; La nuit nous appartient ; La Légende de Beowulf ; Les Promesses de l’ombre ; Le Dernier roi d’Écosse ; 4 mois, 3 semaines, 2 jours ; La Môme ; Le Scaphandre et le papillon ; Nocturna, la vie magique ; Ratatouille

 

2. lecteurs : La Vie des autres ; De l’autre côté ; Ratatouilleundefined

 

Jean-Louis Coy (L’Ours) : les films « dont nous nous souviendrons » - Ne touchez pas la hache ; Parnoïd Park ; De l’autre côté ; La nuit nous appartient ; Souffle ; I’m not there ; Nous, les vivants

 
Cahiers du cinéma :
 

1. rédacteurs : Paranoid Park ; Boulevard de la mort / Inland Empire / Still Life ; La France / Zodiac ; Les Amours d’Astrée et de Céladon / Honor de la cavalleria / Avant que j’oublie ; I Don’t Want to Sleep Alone / Ne touchez pas la hache / Syndromes and a Century

 

2. lecteurs : Still Life ; Paranoid Park ; Inland Empire ; Les Promesses de l’ombre ; Syndromes and a Century ; La Graine et le mulet / Lettres d’Iwo Jima ; Les Amours d’Astrée et de Céladon / Ne touchez pas la hache ; Boulevard de la mort / I Don’t Want to Sleep Alone / 4 mois, 3 semaines, 2 jours / Zodiac

 

Magazine Cut : La nuit nous appartient ; Boulevard de la mort ; Persepolis ; La Graine et le mulet / tout est pardonné / L’assassinat Jesse James par le lâche Robert Ford / 4 mois, 3 semaines, 2 jours

 

Positif (Michel Ciment) : Les Amours d’Astrée et de Céladon ; L’assassinat Jesse James par le lâche Robert Ford ; Les Climats ; Les Fontaines de Goya ; La Graine et le mulet ; I’m not There ; Lettres d’Iwo Jima ; La nuit nous appartient ; Les Promesses de l’ombre ; 4 mois, 3 semaines, 2 jours ; Secret Sunshine ; Still Life

 
Première :
 

1. rédacteurs : La Graine et le mulet ; L’Assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford ; 4 mois, 3 jours, 2 jours ; La nuit nous appartient ; Persépolis ; Ratatouille ; American Gangster ; Zodiac ; De l’autre côté ; Sunshine ; L’Avocat de la terreur ; Les Simpson, le film ; Les Climat ; 28 semaines plus tard ; Les Chansons d’amour

 
Studio :
 

1. rédacteurs : La Môme ; La Graine et le mulet ; Le Scaphandre et le papillon ; La Vie des autres ; L’Ennemi intime ; Les Chansons d’amour ; Exilé ; Persepolis ; Les Promesses de l’ombre ; 24 mesures ; Zodiac

 

2. lecteurs : La Vie des autres ; La Môme ; Les Chansons d’amour ; La nuit nous appartient ; Les Promesses de l’ombre ; Zodiac ; Ratatouille ; Persépolis ; Le Scaphandre et le papillon ; De l’autre côté

 

Trois couleurs (MK2) : La nuit nous appartient ; Paranoid Park ; La Graine et le mulet ; Les Promesses de l’ombre ; Persepolis ; Les Chansons d’amour ; 4 mois, 3 semaines, 2 jours ; Still Life ; Boulevard de la mort ; La France

 

Critikat.com : La Graine et le mulet ; 4 mois, 3 semaines, 2 jours ; Boulevard de la mort ; Bug ; Les Climats ; Persepolis ; Inland Empire ; Les Promesses de l’ombre ; Paranoid Park ; Les Témoins

 

Auditeurs du "Masque et la plume" (France Inter) :

 

1. films français : Persépolis ; Les chansons d’amour ; La graine et le mulet ; Les témoins ; Le scaphandre et le papillon ; Le fils de l’épicier ; Faut que ça danse ; L’avocat de la terreur ; Ceux qui restent ; Un secret

 

2. films étrangers : La Vie des autres ; De l’autre côté ; 4 mois, 3 semaines, 2 jours ; Les climats ; La nuit nous appartient ; Les promesses de l’ombre ; Inland Empire ; Control ; Lettres d’Iwo Jima ; Still life

 

Libre journal du cinéma" de Radio Courtoisie (Collaborateurs et amis) :

 

1. Philippe d'Hugues : Les Amours d’Astrée et Céladon ; La Vie des autres ; Mon frère est fils unique ; Miss Potter ; Still Life ; Secret Sunshine ; Le Rêve de Cassandre ; Nous, les vivants ; Roman de gare ; El Camino de San Diego / The Good German [les pires : 99 francs ; Une vieille maîtresse]

 

2. Philippe Ariotti : La Vie des autres ; Le Rêve de Cassandre ; Astrée et Céladon ; Persépolis ; Paranoïd Park ; Hairspray ; Eragon ; Blood Diamond ; Le Voile des Illusions ; Retour en Normandie ; L'Heure zéro

 

3. Alain Paucard : La Vie des autres / Boarding Gate ; London to Brighton / Mon frère est fils unique / Nous, les vivants ; Miss Potter / Entre adultes ; Contre-enquête / Le Mas des alouettes / Roman de gare / L’Heure zéro / Hollywoodland

 

4. Pascal Manuel Heu (meilleurs films et œuvres relatives au cinéma de 2007) :
- Films de fiction sortis en salles (138 films vus) : Apocalypto ; La Vie des autres ; Un baiser, s’il vous plaît ; Nue propriété / Ça rend heureux ; Die Hard 4.0 ; Planète terreur / Boulevard de la mort – Deux films Grindhouse ; 12 : 08, à l’est de Bucarest / 4 mois, 3 semaines et 2 jours ; Les Promesses de l’ombre / La nuit nous appartient ; Les Témoins
- Documentaires : Volem rien foutre al païs ; Sicko
- Reprise : L’Eventail de Lady Wintermere
- TV : La Prise de l’Elysée
- DVD : Coffret Atom Egoyan [plus mauvais : Indigènes]
- Coups de cœur : Rocky Balboa ; Je t’aime… moi non plus
- Meilleure bande-annonce : Paranoid Park
- Meilleur roman sur le cinéma : Un roman russe (Emmanuel Carrère) [plus mauvais : Baisers de cinéma (Eric Fottorino)]
- Hors concours : Federer / Nalbandian, en huitième de finale à Bercy
- Regrets (films ratés qui auraient pu figurer dans cette liste) : Les Amours d’Astrée et de Céladon ; Secret Sunshine ; L’Assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford ;
Honor de la cavalleria

 

5. Anne Brassié : La Môme ; Le Mariage de Tuya ; Le Dernier voyage du juge Feng ; Les Amours d'Astrée et Céladon ; La Vie des autres ; Dialogue avec mon jardinier ; Le Rêve de Cassandre ; My Blueberry Nights ; 99 frs

 

6. Marie-Noëlle Tranchant : Lettres d’Iwo Jima ; La Vie des autres ; Les Amours d’Astrée et de Céladon ; 4 mois, 3 semaines, 2 jours ; Ratatouille ; Le Mariage de Tuya ; Le Dernier roi d’Ecosse ; Les Trois brigands ; La Môme ; Le Fils de l’épicier + Actrices ; La Graine et le mulet ; Il était une fois ; El Camino de San Diego

 

7. Bernard Cohn : Nous, les vivants ; La Vie des autres ; Irina Palm ; Délice Paloma ; Rue Santa Fe ; 7h58, ce samedi là ; Ne touchez pas la hache ; L’Avocat de la terreur ; Belle toujours ; La Graine et le mulet ; 4 mois, 3 semaines, 2 jours

 

8. Laurent Dandrieu : La Vengeance dans la peau ; Secret Sunshine ; Mon frère est fils unique ; Golden Door ; Le Fils de l’épicier ; 4 mois, 3 semaines, 2 jours ; Persepolis ; La Vie des autres ; Raison d’État ; La nuit nous appartient

 

9. Nicolas D’Etiennes d’Orves : Les Promesses de l’ombre ; Lumières silencieuses ; La Part animale ; XXY ; La Chambre des morts ; Dark Horse ; Tête d’or ; Le Chaos ; Belle toujours ; Syndromes and Century

 

10. Arnaud Guyot-Jeanin : Les Amours d’Astrée et Céladon ; la Vie des autres ; Mon frère est fils unique ; Volem rien foutre al pais ; le Renard et l’enfant ; Danse avec lui ; Anna M.

 

11. Jean-Ollé Laprune : American Gangster ; L’Avocat de la terreur ; De l’autre côté ; Le Deuxième souffle ; I’m not There ; La nuit nous appartient ; Le Rêve de Cassandre ; Le Scaphandre et le papillon ; Un secret ; La Vie des autres

 

12. Vincent Pinel : La Vie des autres ; Les Climats ; Still Life ; 4 mois, 3 semaines, 2 jours ; Persépolis ; Irma Palm ; Les Amours d’Astrée et de Céladon ; L’Avocat de la terreur ; Jesus Camp ; Ne touchez pas la hache ; We Feed the World ; Le Fils de l’épicier ; Le Scaphandre et le papillon ; Le Rêve de Cassandreundefined

13. Jean Tulard : La Vie des autres ; Lettres d’Iwo Jima ; L’Assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford ; L’Illusionniste ; Ne touchez pas la hache ; Ratatouille ; Spider-Man III ; Apocalypto

14. synthèse (14 membres de l’équipe du LJC ou amis ; environ 90 films sur 546 films sortis en 2007) : La Vie des autres (13 citations) ; Les Amours d’Astrée et de Céladon / Le Rêve de Cassandre / 4 mois, 3 semaines, 2 jours (6) ; La nuit nous appartient / Mon frère est fils unique / Apocalypto / Le Fils de l’épicier (4) ; Nous, les vivants / L’Avocat de la terreur / Persépolis / Ne touchez pas la hache / Secret Sunshine (3) + environ 70 films cités une ou deux fois

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CINÉMA ET RADIO : SEMAINE DU 15 MARS 2008

13 Mars 2008, 11:30am

Publié par Mister Arkadin

Voici la liste des émissions radiophoniques sur le cinéma de la semaine à venir :

Samedi 15 mars, de 10h10 à 12h00, France Inter : « Eclectik » (Rebecca Manzoni), avec Josiane Balasko, pour le festival de Films de femmes de Créteil

Samedi 15 mars, de 11h00 à 12h00, Europe 1 : « Rencontre » (Isabelle Morizet), avec l’actrice Kristin Scott-Thomas, pour le film Il y a longtemps que je t’aime

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Samedi 15 mars, à 12h30, RTL : « Le journal inattendu » (Laurence Ferrari), avec Philippe Claudel et Elsa Zylberstein pour leur film Il y a longtemps que je t’aime

Samedi 15 mars, à 17h00, Europe 1 : « Quand j’étais petit » (Nathalie Saint-Cricq), avec Alexandre et Pierre Brasseur

Dimanche 16 mars, à partir de 19h00, TSF Jazz : « Jazz Fan » (Laure Albernhe ; rediffusion le jeudi 20 mars à 23h00) avec l’acteur Clovis Cornillac pour le film Le Nouveau protocole (Thomas Vincent)

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Nuit du dimanche 16 mars au lundi 17, de 4h00 à 7h00, France Musique (« Vivace ») : « BO à gogo ! », avec des musiques des films de Powell et Pressburger, un entretien avec Bertrand Tavernier et les Aventures de Robin des bois

Lundi 17 mars, de 11h05 à 12h30, France Inter : « Le fou du roi » (Stéphane Bern), avec les acteurs Clovis Cornillac et Marie-Josée Croze pour le film Le Nouveau protocole (Thomas Vincent)

Mardi 18 mars, de 14h30 à 16h00, RTL : « La tête dans les étoiles » (Laurent Boyer), avec le réalisateur Jean-Jacques Beineix, pour la sortie de Diva en DVD

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Mercredi 19 mars, à 17h10, RFI : « Culture vive », avec Philippe Claudel pour son film Il y a longtemps que je t’aime

Mercredi 19 mars, de 20h10 à 21h00, France Inter : « L’humeur vagabonde » (Kathleen Evin), avec Philippe Claudel pour son film Il y a longtemps que je t’aime

Vendredi 21 mars, de 9h10 à 9h35, France Inter : « Esprit critique » (Vincent Josse), en direct de l’Odéon, sur le Festival de Cannes et la politisation du cinéma (par Eva Bettan, dans le cadre d’une journée spéciale « Mai 68 a 40 ans en mars »)

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Liens et informations complémentaires :

Rappel : Grille des émissions de radio spécifiquement consacrées au cinéma

- Du 21 janvier au 13 avril 2008, Radio Classique présente « Les Élections de la musique de film », 60 musiques candidates étant classées par thématique (romance, road-movie, western...) et diffusées à l'antenne deux par deux, en confrontation

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HENRI TROYAT, OUBLIÉ DU CINÉMA FRANÇAIS

12 Mars 2008, 12:01pm

Publié par Mister Arkadin

Henri-Troyat-jeune.jpgIl y a un an disparaissait Henri Troyat. Voici une nécrologie rédigée en avril 2007, suivie de deux critiques de cinéma publiés par Henri Troyat en 1946 et 1948.


Tendre-et-violente-Elisabeth.jpg

Henri Troyat figure-t-il parmi les oubliés de l’histoire du cinéma français ? Nous n’entendons pas par là toutes les personnalités qui ont un jour ou l’autre été en rapport avec le cinéma, même de très loin, parfois même sans s’y intéresser vraiment. Car, à ce compte, vu le degré d’imprégnation du cinéma dans la société française, pratiquement tout le bottin de la vie artistique et intellectuelle du XXème siècle s’y bousculerait. Non, nous l’entendons au sens que Claude Beylie et Philippe d’Hugues ont donné à l’expression d’ « oubliés du cinéma français » dans le livre qu’ils leur ont consacrés en 1999 (Editions du Cerf). Il s’agit de personnalités mineures de l’histoire du cinéma, délaissées par les grandes synthèses historiques, ou de personnalités tellement plus connues pour d’autres aspects de leur œuvre qu’on en oublie la part qu’y prit le cinéma, même si cette dernière ne fut pas négligeable.

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Le cinéma n’ayant été évoqué par quasiment aucune des nombreuses nécrologies consacrées à Henri Troyat, né le 1er novembre 1911 à Moscou et mort le 2 mars dernier à Paris, la cause paraît entendue. Certes, quelques films ont été adaptés de ses romans (The White Mountain, par exemple, en 1955, d’après La Neige en deuil) ; certes, Troyat semble avoir lui-même collaboré, plus ou moins (difficile de statuer sur ce point), à l’écriture des scénarios et dialogues de quelques films (par exemple Le Château de la dernière chance [1946], Le Grand chef [1959], Tendre et violente Elisabeth [d’après son roman, 1960]). Mais, comparé à l’intense activité dont Troyat a fait preuve dans le domaine des Lettres, ce ne sont là que détails d’une carrière que presque rien ne relie donc au cinéma. Pas de quoi s’étonner par conséquent qu’une partie aussi mineure de son œuvre ait été passée sous silence et que même de fins limiers comme Claude Beylie et Philippe d’Hugues ne lui aient pas consacré de chapitre.

Le-Ch-teau-de-la-derni-re-chance.jpg

Cependant, dans leur avant-propos, Beylie et Hugues soulignaient que leur choix avait forcément été restreint et que bien des pans de l’histoire du cinéma français pourraient être éclairés par l’évocation d’autres oubliés du cinéma. Ils mentionnaient notamment Jean Benoit-Lévy, cinéaste dont le nom n’est pas inconnu des connaisseurs (1), mais dont les films sont très peu diffusés désormais et les écrits assez rares (Les Grandes missions du cinéma, livre publié à la Libération, vaut pourtant le détour). On retrouve Benoit-Lévy dans le chapitre consacré à Robert Lynen, le jeune acteur du Poil de carotte de Julien Duvivier (1932), dont la carrière fut interrompue par son exécution sous l’Occupation pour faits de Résistance (2). Philippe d’Hugues y rappelait que le dernier long métrage de Jean Benoit-Lévy, Feu de paille, sorti en mai 1940, était adapté de l’un des premiers romans de Henri Troyat, Grandeur nature (Plon, 1936). Or, Robert Brasillach, dans sa chronique littéraire du quotidien L’Action française (12 novembre 1936), avait fait jouer sa mémoire de critique et d’historien du cinéma pour faire le rapprochement entre le thème de Grandeur nature et l’histoire de Robert Lynen. Henri Troyat se serait inspiré du suicide du père de l’acteur, auquel la presse populaire avait donné un assez large écho. « M. Robert Lynen, le père du jeune artiste de cinéma qui joua "Poil de carotte" se tue en se jetant par la fenêtre – c’est la gêne qui le poussa à cet acte de désespoir », titra ainsi Le Petit parisien (27 mai 1935). Parmi les motifs qui furent invoqués pour tenter d’expliquer ce geste, Troyat ne retint pas le désespoir qu’aurait ressenti le père de Robert Lynen de n’avoir pu faire fructifier suffisamment le succès de son fils, dont la carrière connaissait un creux au milieu des années 1930. S’éloignant délibérément de l’histoire de Lynen, auquel il n’est pas fait explicitement référence dans Grandeur nature, Troyat préféra se concentrer sur le dépit que peut connaître un père exerçant une activité artistique (peintre pour Lynen) quand son fils réussit bien mieux que lui, qui plus est dans le même métier (acteur dans le roman). Il décrit le désarroi d’un père dont le prestige est éclipsé aux yeux de sa femme par la gloire naissante de son fils. Délaissé, courant le cachet et les emplois secondaires (dans la figuration et doublage notamment), alors que, parallèlement, son fils devient une vedette, le père en est réduit a accepter une tournée médiocre en province pour échapper tant bien que mal à son sentiment de déclassement. Le film de Benoit-Lévy, passablement oublié malgré une distribution attrayante (Lucien Baroux, Jean Fuller, Orane Demazis, Aimos, Jeanne Fusier-Gir), semble respecter assez fidèlement la trame du livre, à quelques détails près. La détresse du père y est ainsi rendue plus symbolique encore par le fait qu’il finit par entrer à la Comédie-Française « … mais comme souffleur d’une tournée pour y donner à d’autres les répliques de ses rôles favoris » : « Son ressentiment ne cessera qu’avec l’échec de son fils qui aura manqué un film », d’après le critique de La Liberté (2 mai 1940). Ce dernier soulignait aussi que « le public a toujours eu un goût marqué par l’envers du décor. » Or, même si le cinéma est loin d’être absent de la littérature de l’époque, Brasillach s’étonnait que le roman de Troyat fût « la première œuvre de valeur » à se situer presque entièrement dans le monde du cinéma et du théâtre. Pourtant, cet « univers aussi curieux et aussi riche » fascinait déjà depuis longtemps le public, comme en témoignent les nombreux reportages des années vingt et trente sur Hollywood, qui comportent presque tous une description de la foule des postulants au vedettariat, ou à défaut à la figuration, qui se pressaient aux portes des studios. Troyat réussit également à traiter adroitement, en se concentrant sur le personnage de l’acteur raté, proche de « la fin du jour », de la rivalité entre théâtre et cinéma.

Osons une hypothèse : Troyat parvint à écrire un roman essentiel sur le cinéma français de l’entre-deux guerres parce que la vie par procuration et la "rivalité mimétique", sujets éminemment cinématographiques, étaient justement deux des thèmes privilégiés de son propre univers. Il les développa dans L’Araigne (Plon, 1938), dans lequel le personnage principal vit à la fois reclus sur lui-même et dans la constante volonté de maîtriser la vie de son entourage, dans une "volonté de puissance" sur les autres qui se retournera contre lui. La lecture du roman qui valut le Goncourt à Troyat confirme que ce dernier ne saurait décidément être réduit à l’auteur de grandes biographies et de romans historiques, genres auxquels il est un peu abusivement identifié. Il fut aussi un bon artisan du roman psychologique, sinon subtil, du moins habile, dans la veine d’un Jean-Paul Sartre. Nous pourrions tout aussi bien écrire : « dans la veine de l’époque », à laquelle appartenait également Jean-Paul Sartre. Ce rapprochement n’est pas fortuit, tant L’Araigne fait penser à La Nausée, presque constamment (Brasillach, déjà, avait comparé les deux auteurs, à l’avantage de Troyat, dans sa chronique de L’Action française du 17 novembre 1938), et particulièrement dans le passage suivant : « Le premier qui l’accoste est le bienvenu. C’est de propos arrêté qu’elle refuse de le voir dans sa laideur et dans son mensonge. Elle veut aimer, vite, n’importe qui, pour n’importe quoi, mais que ce soit de toutes ses forces. Le monde est grotesque, puant, méchant jusqu’à la nausée. N’est-il pas affreux de penser qu’après une longue visite d’un ami, d’une maîtresse, il faut tout de même ouvrir la fenêtre parce que la chambre sent mauvais ? Mais nul ne le remarque et n’en souffre. Il y a chez les hommes, chez les femmes, une immonde complaisance pour ce qu’ils ne peuvent éviter. Les odeurs, les besoins physiques, les maladies, ne tuent pas le sentiment. On ferme les yeux. L’expression est commode. Tout le monde fermait les yeux, autour de lui. Il avait l’impression, parfois, qu’on ne l’avait pas endormi pour subir l’interminable opération de la vie. Une anesthésie soigneuse émoussait les douleurs des autres. Lui seul était éveillé, lucide, les chairs et l’esprit à vif. Le moindre attouchement le faisait hurler. Oui, ce qui lui manquait pour accepter l’existence, c’était ce narcotique précieux dont ses "semblables" étaient saouls comme des brutes. Et ce narcotique était l’amour. L’amour seul pouvait provoquer leur soumission à toutes les hideurs, leur sommeil artificiel au centre du monde. » (L’Araigne, Le Livre de poche, 1967, p.201).

Aux « oubliés du cinéma » qui firent des films, Claude Beylie et Philippe d’Hugues n’adjoignirent pas, dans le livre cité plus haut, les « oubliés du cinéma » qui en parlèrent, bien qu’ils aient consacré de nombreux autres écrits aux critiques de cinéma, notamment ceux que l’histoire officielle de la critique, très parcellaire, a jeté aux oubliettes. Parmi ceux-ci, nous n’aurions pas non plus tiré Henri Troyat de l’oubli si une assez importante collection de La Bataille – Politique et Littéraire ne nous avait pas été donné récemment (3). Nous savions bien qu’une nouvelle génération de critiques avaient émergé dans l’effervescence de la Libération, que de nouveaux venus (Alexandre Astruc, Jean-José Marchand, Edgar Morin, Jean-Charles Tacchella, etc.), qui se firent ensuite un nom dans le cinéma ou dans d’autres domaines, avaient rejoint les critiques rescapés de l’Occupation, les anciens, restés actifs pendant la guerre (Charles Ford, René Jeanne, Nino Frank, Roger Régent) ou non (Georges Charensol et Jean Vidal, par exemple), ainsi que les nouveaux (entre autres François Chalais et France Roche). Nous nous doutions que les nouveaux journaux furent si nombreux que certains recrutèrent forcément des novices en critique de cinéma. Mais nous ignorions que, parmi eux, figurait Henri Troyat. Or, il fut le titulaire de la rubrique cinématographique de La Bataille pendant au moins deux ans, de manière assidue et assez originale. Les articles de Troyat contribuaient à la bonne tenue de « l’hebdomadaire de Paris » gaulliste dirigé par François Quilici, qui compta de très bons collaborateurs aussi bien en littérature (Jacques Perret notamment) que dans les domaines culturels, réguliers (Henri Sauguet pour la musique, Denis Marion puis Thierry Maulnier pour le théâtre, Max Favalleli pour les portraits d’acteurs) ou intermittents (Serge Veber, Françoise Giroud, Hugues Panassié sur le jazz), ainsi que d’excellents dessinateurs (Dubout, surtout, et Bib pour accompagner la rubrique de Troyat) et une courriériste du cœur épatante, dont se furent peut-être les dernières apparitions publiques (« Marguerite Moreno écoute vos confidences », du 2 juin au 7 juillet 1948 ; nécrologie signée Bernard Zimmer le 21 juillet).

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S’il ne fallait retenir qu’une seule qualité du Troyat critique de cinéma, ce serait une subjectivité nettement affirmée, qui donne à sa chronique une allure de journal d’un cinéphile. Plus que les avis d’un expert, Troyat donne des impressions écrites à la première personne du singulier. Il commence très souvent par indiquer qu’elles étaient ses a priori, ce qu’il attendait d’un film après la découverte de son titre et de l’affiche, de la publicité et de la distribution annoncée, du genre du film et de son histoire. Il compare son "horizon d’attente" avec sa perception du film lors de la projection. Très peu souvent satisfait par les films dont il est chargé de rendre compte (4), il les traite fréquemment avec ironie et se permet même parfois de suggérer comment il aurait fallu les traiter ou les réécrire pour les rendre plus attrayants. « Je rêve à un tout autre spectacle, illustrant un thème identique. », écrit-il ainsi le 14 juillet 1948 à propos de Honni soit qui mal y pense. Le romancier pointe ici le bout du nez, et l’on en vient à regretter qu’il ne se soit pas plus souvent mué en scénariste. A peu près dépourvu de l’auteurisme qui sévira ensuite (Troyat parle ainsi, sans mentionner Mankiewicz des « réalisateurs » de Mme Muir !), ses chroniques gardent ainsi un intérêt et une fraîcheur que l’on serait bien en peine de retrouver chez beaucoup d’autres critiques, d’hier comme d’aujourd’hui. Il serait dès lors bienvenu qu’un éditeur audacieux ait l’idée de reprendre une partie de ses critiques en volume afin que Henri Troyat ne soit plus l’un des plus illustres "oubliés du cinéma français".


Notes :

(1) Ne serait-ce que parce que ce patronyme était également porté par son oncle, Edmond, dont Jean-Jacques Meusy a rappelé l’importance (« Qui était Edmond Benoit-Lévy ? », dans Les Vingt premières années du cinéma français, dir. Jean A. Gili / Michel Lagny / Michel Marie / Vincent Pinel, Sorbonne Nouvelle / AFRHC, 1995, p.115-143). Sur Jean Benoit-Lévy lui-même, lire : Vignaux (Valérie), Jean Benoit-Lévy ou le corps comme utopie. Une histoire du cinéma éducateur dans l’entre-deux-guerres en France, Association française de recherche sur l’histoire du cinéma, 2007. Et consulter le site http://www.jeanbenoitlevy.net/

(2) Pour plus de détails, lire l’enquête parue depuis : Charles (François), Vie et mort de Poil de Carotte. Robert Lynen acteur et résistant 1920-1944, Strasbourg, Éditions La Nuée Bleue / DNA, 2002, 222 p.

(3) J’adresse mes plus vifs remerciements au généreux donateur, l’écrivain et journaliste Jean-Paul Angelelli.

(4) Il est à cet égard dommage que Troyat n’ait, à notre connaissance, pas débuté dans la critique avant-guerre, le cinéma des années quarante lui semblant souvent bien plus fondé sur des effets appuyés, bien plus démonstratif que celui des années trente, de même que ses acteurs. Ainsi écrit-il sur Claude Jarman, à propos de Jody et le Faon : « Il joue, il charge, il appuie, il grimace. Et tandis qu’il se dépense et se détruit de la sorte, on songe avec tristesse à l’extraordinaire création de Robert Lynen dans Poil de Carotte » (29 janvier 1949).


Illustration : portrait de Henri Troyat paru dans Gringoire le 29 décembre 1938.


Deux articles du critique de cinéma Henri Troyat

La Bataille, 10 mars 1948, p.6 : La Dame d’onze heures
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Je m’apprêtais à voir un film policier du modèle courant, avec deux ou trois cadavres, une poursuite en auto, un détective à feutre mou et un assassin nimbé de circonstances atténuantes. Mais l’affiche portait ce sous-titre : « Le record du mystère » et j’eus le tort de ne pas lui prêter une suffisante attention. Elle ne mentait pas, l’affiche. Elle était même au-dessous de la vérité. L’œuvre de M. Jean Devaivre se révéla bourrée de mystère jusqu’à la gueule. Serrés côté à côté, comprimées dans un espace réduit, toutes les sortes d’énigmes se trouvaient représentées dans La Dame d’onze heures. On n’en avait pas oublié une seule. On les avait classées par taille, par espèce, par prix. L’ensemble faisait penser à la mallette d’échantillons d’un placier en sensations fortes.

Dès le début de la projection, pour affirmer le caractère original et terrifiant de son entreprise, M. Devaivre nous présenta pêle-mêle des ampoules aux liquides troubles, des masques grimaçants, des marionnettes balancées au bout de leur fil et la main crochue, osseuse, diabolique du montreur. Cette entrée en matière, dans le plus pur style des épisodiques de 1920, était visiblement destinée à préparer les nerfs du public. Pour ma part, j’eus plutôt envie de rire. Mais je n’étais pas seul dans la salle et me retins.

La suite dépassa tout ce qu’on pouvait craindre. Accablant de sa haine la famille de l’infortuné Pierre Renoir, un correspondant anonyme déversait sur la maison une pluie de lettres menaçantes et sibyllines. Les gens mouraient comme des mouches sans qu’il fût possible de déceler les causes exactes de leur décès. Et Paul Meurisse, détective par amour, arrivait, au prix de mille prouesses, à sauver de cette hécatombe la jeune fille chaste et pure dont il convoitait la main.

Pendant près d’une heure et demie, nous vécûmes ainsi dans un drame constamment renouvelé et rarement vraisemblable. Chaque fois qu’une porte s’ouvrait sur l’écran, je m’attendais à voir paraître dans l’embrasure la silhouette oblique d’un assassin. Lorsqu’un personnage tournait le commutateur en pénétrant dans une chambre, je me disais : « Il y a sûrement un mort ou deux sous le lit. » Il suffisait qu’une fenêtre fût entrebâillée pour que je redoutasse les développements mortels de cette imprévoyance. Si deux amis se serraient la main, je me demandais lequel des deux allait tuer l’autre. Les mots de : « Bonjour, comment allez-vous ? » devenaient une menace à peine déguisée. Et quand quelqu’un s’asseyait sur une chaise, je n’étais pas tranquille pour lui, car les meubles les plus inoffensifs, entre les mains de M. Devaivre, peuvent devenir des engins de destruction.

Je dois dire que les acteurs prenaient très courageusement leur parti de ces inconvénients quotidiens. Je n’ai jamais vu manier le revolver avec plus de désinvolture que par les protagonistes de cette sombre histoire. Le revolver faisait partie de leur toilette, comme la pochette ou le trousseau de clefs. On ne sortait pas sans son revolver : c’était une règle de bienséance en même temps qu’une précaution. A la longue d’ailleurs, les coups de feu ne troublaient plus personne. Ça pétait dans tous les coins. Pour un oui, pour un non, les balles pleuvaient. Et les héros passaient entre les gouttes.

Pour renouveler l’intérêt, M. Devaivre eut recours à d’autres stratagèmes. Nous eûmes la bombe à retardement, enveloppée dans un papier banal ; le poison microbien, dont l’écran nous révéla soudain le grouillement barbu et innombrable ; le médaillon à la pointe vénéneuse qui vous pique la main lorsque vous l’ouvrez et vous transforme instantanément en cadavre ; le petit chat victime de sa curiosité ; le juge d’instruction moustachu et idiot ; l’illusionniste qui lit dans les pensées et fait fleurir des boules entre ses doigts ; la visite au cimetière avec tombes fraîchement creusées et fossoyeur fruste et mélancolique ; la maison de fous avec camisoles de force et ricanements hystériques des pensionnaires ; le suicide en auto… J’en passe et des meilleurs !

A l’heure où j’écris ces lignes, je me demande encore comment M. Devaivre a pu faire tenir tant de « clous dramatiques » dans les limites forcément restreintes de son scénario. Sa virtuosité est comparable à celle des architectes de wagons-lits. Sans perdre un pouce de terrain, ces messieurs savent utiliser un placard pour y disposer deux couchettes, un lavabo, des commutateurs, des cintres. On ne peut faire un geste sans se cogner le coude ou le genou. Mais on a tout sous la main. Dans La Dame d’onze heures, nous avons, indiscutablement, tout sous la main. Cependant, rien n’est utile. Nous ne sommes pas émus un seul instant par ce festival de poisons et de revolvers. Nous suivons d’un œil froid les évolutions de ce ballet de victimes et d’assassins, ponctué de coups de feu, de coups de poing et coups de gueule. M. Devaivre a voulu trop bien faire. Il a passé la mesure. Or un film policier ne touche les spectateurs que pour autant qu’il sonne vrai. Ce n’est pas le nombre de morts qui importe, mais, si j’ose dire, la qualité humaine de leur exécution. Si nous ne croyons pas aux personnages, leur agitation sur l’écran nous laissera insensibles. Un simple fait divers, bien monté, bien photographié, portera mieux sur le public que ce feu d’artifice macabre, combiné selon les plus vieilles recettes du cinéma.

Pour animer ce film, qui se présente comme une récapitulation de tous les poncifs du genre, M. Devaivre a convoqué le ban et l’arrière-ban de tous les acteurs français. Rarement distribution plus éclatante fut mise au service d’une plus pauvre cause. Aux côtés de Paul Meurisse, de Jean Tissier, de Micheline Francey, de Junie Astor et de Pierre Renoir. Debucourt accepte de dire trois mots. Gilbert Gil se contente d’un rôle secondaire. A-t-on besoin d’un concierge d’hôtel ? on fait venir Palau. Pour camper la silhouette d’un jardinier, on dérange Sinoël. Cette grosse dame qui sanglote sur sa péniche sera Mady Berry. Devant cette débauche de comédiens célèbres employés à des tâches infimes, on s’étonne de ne pas voir Pierre Fresnay dans le rôle muet d’un balayeur de rues ou Edwige Feuillère mêlée à la troupe compacte des figurants. Mais peut-être se trouvaient-ils réellement dans le film et ne les ai-je point vus. Il y avait tant de monde sur cette barque en perdition !


La Bataille, 15 janvier 1946, p.5 : « Un film vu par Henri Troyat. Dans "Duel au soleil" c’est le bon goût qui est tué »

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Le vieux sénateur, à l’œil de poule courroucée, au sourcil hirsute, à la moustache tombante, régnait dans son fauteuil de paralytique, sur le plus vaste ranch du Texas. Hommes et bêtes tremblaient devant sa loi. Sa femme se liquéfiait en sa présence. Et, de tous les être vivants, seuls ses deux fils trouvaient grâce devant ses yeux. L’un, Jesse, était un grand garçon, blond et bon, rose et cultivé ; l’autre, Lewt, brun, basané, cynique, cruel, querelleur.

Les deux frères ne s’aimaient pas, mais auraient continué à vivre pacifiquement, côte à côte, si une jeune orpheline, recueillie par leur mère, n’était venue s’installer au ranch. Elle s’appelait Pearl et avait du sang indien dans les veines. Belle, souple, le cheveu noir, le sein agressif, la croupe éloquente, la lèvre comestible, ses moindres gestes semblaient commandés par l’amour. Son œil s’allongeait, glissait, faisait roue libre. Son visage, mystérieusement traité par le technicolor, était, selon les jours et les sentiments, tantôt orange vif, tantôt jaune citron, tantôt roux limace et tantôt pain d’épice. Il émanait de toute sa peau une radiation aphrodisiaque qui provoquait des ravages dans les cerveaux masculins. L’honnête Jesse et le crapuleux Lewt éprouvèrent, chacun pour son compte, les effets de cet enchantement. Mais Jesse prodigua à la métisse des paroles tendres et dignes qui firent monter les larmes à ses paupières, et Lewt, plus pratique, déchira sa bouche d’un baiser volumineux et goulu.

Cependant, des événements d’une extrême importance se déroulaient aux frontières du ranch. Le gouvernement des États-Unis avait résolu de pousser une ligne de chemin de fer à travers les territoires du sénateur. Le sénateur voulut s’y opposer par la force. Alors, Jesse, qui était pour le progrès, se rangea aux côtés des troupes gouvernementales. A la vue de la bannière étoilée, le père versa une larme et renonça pathétiquement à défendre l’inviolabilité de son sol. Mais, pour punir son fils de lui avoir tenu tête, il le traita de renégat et le chassa.

Jesse parti, Pearl sombra dans la luxure et le désespoir. Elle regrettait Jesse. Mais elle ne pouvait se passer de Lewt. Vêtue de robes toujours plus légères, plus collantes, plus transparentes, elle s’adonnait à « l’amour-vache » avec toute l’ardeur de son sang. Ce n’étaient que baisers aspirants, morsures délicieuses, coups d’ongles parallèles, gifles étourdissantes, extases humides, baignades impudiques et cris rauques au soleil couchant. Lorsqu’elle apprit que Jesse avait obtenu une situation considérable dans les chemins de fer et songeait à se marier, elle voulut se marier à son tour. Lewt, ensorcelé par ses manières de goule, lui promit, en effet, de l’épouser. Mais, le soir même, devant le mécontentement de son père, il révisa son jugement et rompit ses fiançailles. Folle de rage, Pearl se lance à la tête du premier venu : le régisseur du ranch lui proposa d’être sa femme. Elle accepta, bien que l’homme lui fût indifférent de la tête aux pieds. Et Lewt, hors de lui, tua le prétendant. Après quoi, il se présenta, de nuit, chez l’infortunée jeune femme. Pearl, la bave aux lèvres et le croupion palpitant, sortit un pistolet automatique et le braqua, tout net, sur l’assassin. Négligeant cette menace, Lewt s’avançait pas à pas vers la métisse. En fin de compte, cédant à l’incendie qui lui dévorait les entrailles, elle lâcha son arme, fit un hurlement de chienne et croula d’une seule masse dans les bras de son fol amant. « Je te déteste, je te hais. Tu mérites la mort », criait-elle. Et, entre deux injures, elle lui avalait la moitié du visage dans un baiser vorace. Mais la police recherchait le misérable. Après avoir goûté aux caresses démoniaques de la jeune femme, il s’enfuit en lui promettant de la revoir bientôt.

Sur ces entrefaites, la mère mourut et le bon fils proposa à Pearl de venir habiter chez sa fiancée. Mal lui en prit, car Lewt, averti de cette circonstance et n’écoutant que la voix de la jalousie, quitta sa retraite, se rendit en ville et déchargea un pistolet contre la poitrine de son frère. Heureusement, Jesse, qui avait une santé robuste, guérit de ses blessures. Quant à Pearl, outrée par les procédés de son amant, elle sella un cheval et partit à sa recherche, avec l’intention de le massacrer. Elle chevaucha longtemps dans la clarté d’un soleil couchant rouge cerise. Enfin, elle atteignit le repaire rocailleux où se cachait Lewt. Dès qu’elle le vit, très loin encore, elle épaula son fusil et tira. Il s’écroula en jurant : « Garce, je suis touché. » Puis, ramassant ses dernières forces, il brandit un revolver et le déchargea, à trois cents pas. « Tu m’as tuée, monstre », glapit la jeune femme, le ventre troué. Elle fit feu encore cependant, et il lui répondit, du tac au tac. Bientôt il furent percés tous deux comme des écumoires. Inondés de sueur et de coulis de tomates, ils se tortillaient à une grande distance l’un de l’autre, sur la pierraille. Sûrs de mourir chacun de son côté, ils ne songeaient plus qu’à se rejoindre, car ils ne s’étaient jamais tant désirés.

La légende raconte qu’une fleur mystérieuse poussa à l’endroit même où furent retrouver leurs corps : une fleur pâle, aux pétales tourmentés, que les indigènes n’avaient encore jamais vue. Pour moi, j’ai tout de suite reconnu en elle la fleur blanchâtre du navet.

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« Comme une parodie »

Ce film tragique, bruyant, coloré, violent, est incontestablement l’un des plus drôles qu’il m’ait été donné de voir sur les écrans parisiens. On dirait une parodie magistrale des grandes productions américaines, une apothéose sensationnelle du mauvais goût hollywoodien. Le sujet, les acteurs, les couleurs, évidemment choisis pour nous émouvoir, concourent, en fait, à nous égayer. Les sanglots hystériques de Jennifer Jones (ex-Bernadette Soubirous) et son travail du buste et de l’arrière-train méritent, à eux seuls, le dérangement. Les sottises du texte, les effets comiques du doublage sont un régal pour les amateurs. Quant aux nuances de la pellicule, elles dépassent en fausseté et en prétention tout ce qui a été tenté jusqu’à ce jour. L’horizon est continuellement rouge vif ou jaune citrouille et les visages sont souvent bleus. Je recommande particulièrement le passage où le vieux sénateur, qui baigne tout entier dans la clarté sang de bœuf du soleil, déclare d’un petit air méfiant : « Il y a d’étranges lueurs dans le ciel. » Et les débauches de peinture vermillon sur les habits et sur les mains des deux amants qui s’entretuent ! Si seulement ce Duel au soleil avait pu être un duel à l’ombre ! Mais King Vidor ne nous aura rien épargné. Ajoutons, pour être juste, que les chevaux et les vaches du film jouent leur partie avec une louable conviction.

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PAS DE MEILLEUR RÉACTIONNAIRE QU’UN VIEUX GAUCHISTE

10 Mars 2008, 15:01pm

Publié par Mister Arkadin

« Loin de la vision conservatrice que cette fidélité pourrait suggérer, Assayas, comme Walter Benjamin, pense sans doute que quelque chose du passé doit rencontrer notre présent pour que l’humanité garde une chance d’inventer son avenir. » Ouf ! Que de contorsions et de balancements ne faut-il pas à Jean-Luc Douin, dans Le Monde du 5 mars 2008 (p.24), pour laver Olivier Assayas du soupçon de conservatisme, autant dire d’infamie. Or, après bien d’autres (notre prédilection va pour un autre grand cinéphile, Dominique Noguez, l’auteur de La Colonisation douce — Feu la langue française ? et de l’hilarant Comment rater complètement sa vie en onze leçons), Assayas démontre dans son dernier et admirable film, L’Heure d’été, que les vieux gauchistes, pour autant que leur culture ne se limite pas à Guy Debord et à Alain Badiou, font les meilleurs réactionnaires. Et comme les cinéastes réactionnaires font souvent les plus beaux films, Assayas talonne désormais Rohmer parmi les derniers bons cinéastes français en activité.undefined

 

C’est un peu court et péremptoire comme critique ? Certes, mais précipitez-vous donc voir L’Heure d’été, cela vous lavera les yeux et les oreilles !

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LAETITIA MASSON S.D.F. DU CINÉMA

9 Mars 2008, 20:27pm

Publié par Mister Arkadin

De forts vilains esprits ont suggéré aux vedettes du cinéma qui clament périodiquement devant toutes les caméras leur amour des S.D.F. et s’indignent à tous les micros du scandale que représente la condition des vagabonds dans les rues de Paris (1), de donner l’exemple en en accueillant dans leurs humbles demeures, sans doute assez vastes pour en abriter quelques-uns sans trop avoir à se serrer. C’est médire, assurément. Ainsi Laetitia Masson ne le pourrait-elle pas, puisque elle-même aurait déclaré à Pascal Mérigeau, qui dresse le portrait d’ « une cinéaste qui n’en fait qu’à sa tête » (« L’obstinée », Le Nouvel observateur, 21 février 2008, p.126) : « Nous sommes les SDF du cinéma. » Que le lecteur se rassure ; je pense pouvoir lui certifier que les échecs de ses derniers films n’ont pas obligé la réalisatrice à se transformer en maçon pour se construire un abri sous un pont. Il s’agit d’une analogie, Laetitia Masson attendant que l’avance sur recettes l’aide à financer son prochain film, à l’heure où son dernier, Coupable, sort en salle. undefinedQue le lecteur ne s’offusque pas de cette comparaison en réclamant les coordonnées (du domicile et des comptes en banque) de Masson ! Car, si elle peut paraître quelque peu indécente, elle a au moins l’avantage de dévoiler explicitement le rapport qu’un certain nombre de cinéastes français entretiennent avec l’État : un rapport de mendicité, tant il est devenu indispensable pour eux que l’État se porte à leur secours, les citoyens ne mettant que peu la main à la poche, du moins pour aller voir leurs films, puisqu’ils la mettent tout de même un peu quand ils vont en voir d’autres – par le biais des taxes sur les billets (quelle que soit la nationalité du film).
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C’est flagrant dans le cas de Masson, dont j’avais apprécié en 1996 En avoir ou pas, le type de film dont on dit qu’il est prometteur (en plus d’avoir été plutôt un succès public - 213 506 entrées dans l’Europe des 25, d’après la base Lumière). En l’occurrence, c’est peu dire, à mon avis, que les promesses n’ont pas été tenues, puisque j’ai commencé à décrocher dès le film suivant, À vendre, son plus gros succès à ce jour (parions qu’il le demeurera, tant elle semble depuis vivre sur cet acquis ; 468 522 entrées). Laetitia Masson, qui avait beaucoup contribué à la carrière de Sandrine Kiberlain, s’est ensuite trouvée une prédilection pour les acteurs vieillissants (Adjani, Johnny), pour les écrivains qui n’ont jamais été jeunes (Angot, Daenincx) et dont le point commun est de se prendre très au sérieux, et pour les intrigues alambiquées. Cela a donné Love Me (sorti en 2000 ; 59 020 entrées, dont 53 377 entrées en France et 5 653 dans cinq autres pays), puis La Repentie (2002, 124 985 entrées) et Pourquoi le Brésil ? (2004, 11 657 entrées), qui (faut-il s’en étonner ?) n’ont plus été distribués qu’en France. undefinedLa présence d’une star ne prémunit pas Masson contre la défaveur publique, La Repentie et Love Me étant de loin les plus gros bides depuis des années d’Adjani (même Adolphe a fait presque deux fois plus d’entrées…) et de Johnny (tous ses films ayant fait au moins six fois plus d’entrées depuis 1996, sauf Quartier V.I.P., qui dépasse tout juste Love Me). Il lui faut dès lors avoir recours à la faveur publique, comme ce fut le cas pour Pourquoi le Brésil ? (cf. le site du CNC) dont on se permettra de douter que les recettes aient permis de rembourser l’avance que la réalisatrice espère aujourd’hui pour son prochain film.

 
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Loin de moi l'idée de dénigrer le système français de financement, qui permet par exemple à un Manuel Poirier de tracer son chemin, parfois pour le meilleur (Les Femmes ou les enfants d’abord, 2002 ; 407 537 entrées, dont près de 100.000 à l’étranger), malgré l’échec de Te Quiero (33 810 entrées en 2000), après le triomphe de son pire film en 1998 (Western ; 1.292.842 entrées). De même pour un Eric Barbier, qui a pu relancer, avec un Serpent (2006) d’honnête facture, une carrière qui aurait pu être sabordée par une grosse, puis une plus petite production (Le Brasier, passé le mardi 4 sur France 3 à 23h15 ; Toreros, 4 303 entrées en 2000) qui furent des échecs publics (aussi bien que critiques, si mes souvenirs sont bons). Bref, il est réjouissant que la capacité des réalisateurs français à persévérer et à trouver des financements ne dépende pas uniquement du box-office.

 

Toutefois, quand les échecs (à mon avis aussi bien du point de vue artistique que financier) se suivent de façon aussi constante que dans le cas de Laetitia Masson depuis quelques années, ne reste en effet qu’à faire la manche. Par générosité, et aussi parce que je n’adore rien moins que me déprendre d’un préjugé défavorable envers un cinéaste, je suis passé à la caisse d’un cinéma du Quartier latin et suis entré dans la salle pour voir Coupable. Ma B.A. accomplie, j’ai patiemment attendu que l’ennui me submerge et n’ai pas poussé le zèle jusqu’à rester jusqu’au bout, sans pour autant me sentir autrement coupable. Car, une fois n'est pas coutume, je me range à l'avis de Vincent Ostria (L'Humanité, 27 février 2008, p.22) : « On reste abasourdi devant autant de pose et aussi peu de substance. »

 

 

Notes, liens, informations et commentaires complémentaires :

 

(1) Si possible la semaine précédant la sortie de leur dernier film – telle Josiane Balasko, récemment, juste avant d’être reçue dans toutes les émissions de divertissement pour faire la réclame de L’Auberge rouge.

 

- Les chiffres que nous donnons sont tirés de la base Lumière, recueil des « données disponibles sur les entrées réalisées par les films distribués en salles en Europe depuis 1996 ».

 

- J’imagine qu’il doit exister des études sur l’avance sur recettes. Mais, mises à part celles du Centre National de la Cinématographie (C.N.C.), dont elle dépend, et peut-être quelques études universitaires peu distribuées, il serait instructif qu’une étude d’envergure soit un jour publiée sur cette institution clé de la vie cinéphilique française. Serait particulièrement bienvenu un chapitre sur l’influence que ses compositions et positions, ainsi que celles d'autres institutions de financement du cinéma français (émanant principalement des chaînes de télévision) ont pu avoir sur le parcours de certaines personnalités françaises, par le bénéfice que ces dernières ont pu en tirer (Bernard-Henri Lévy par exemple) ou par le ressentiment qu’elles ont engendré chez d’autres (Dieudonné, par exemple, suite au refus de financement de son scénario sur le Code noir).

 

- Dans « French Kiss-Off. How protectionism has hurt French films », point de vue anglo-saxon sur le système de préservation du cinéma français, intéressant, quoiqu’un peu systématique, Tyler Cowen fait une proposition judicieuse pour voir si les films français qu’il exècre serait capable de survivre s’ils n’étaient protégés comme une espèce précieuse et en voie de disparition que l'Unesco devrait classer au Patrimoine de l'humanité. Puisque le système d’aide serait destiné à aider des films "difficiles" ou "d’auteur" qui ne pourraient trouver leur public à cause du matraquage publicitaire qui ne bénéficierait qu’aux mastodontes américains (et français d’ailleurs), pourquoi l’aide accordé par l’Etat ne porterait pas sur la publicité (ou pourquoi ne restreindrait-on pas la publicité des films américains ?) ? Ainsi le public serait-il aussi informé de la sortie de Coupable que de John Rambo, ses deux films partant sur un pied d’égalité et connaissant dès lors sans doute la même fortune…
Alain Soral remarque perfidement que les cinéastes français, de Desplechin à Tavernier, sont à la fois les plus chauds partisans de l'ouverture des frontières, de l'accueil de tous les damnés de la terre, du laissez-passer le plus total en matière d'immigration, et les plus ardents défenseurs du protectionnisme en ce qui concerne leur corporation (
"Cinéma. L'immoralité de l'exception culturelle", Jusqu'où va-t-on descendre ? (Abécédaire de la bêtise ambiante), Paris, Éditions Blanche, 2002, p.69-70).

 

Je laisse la parole à Tyler Cowen : « Advocates of cultural protectionism often portray consumer sovereignty as a myth. According to this view, oligopolistic American distributors create demand for their movies through advertising. The sheepish public, in turn, responds passively to whatever is offered.

 

 » If this view were correct, supporting European cinema would be easy. The government need not subsidize filmmaking, or even place limits on American film imports. All the government need do is subsidize advertising for native films, or perhaps restrict advertising for American movies. But such policies obviously would not work. It is the European movies that fail to draw customers, not the European advertising campaigns.

 

 » When European audiences do not like the content of American products, they have proven remarkably resistant to them, no matter how heavy the marketing. Few American exports to Europe have been supported by as much hype and advance publicity as EuroDisney. One fearful critic called the park "a terrifying step towards world homogenization." Yet when EuroDisney opened, the French didn't like it. French culture has so far survived. »


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QUE RESTERA-T-IL BIENTÔT DE TEX AVERY ?

7 Mars 2008, 10:58am

Publié par Mister Arkadin

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Je ne saurais me dire un intellectuel, puisque j’hésite toujours longuement avant de signer une pétition, ce que je ne finis par faire que rarement. Toutefois, l’annonce de la célébration du centenaire de Tex Avery me rappelle que j’avais signé la pétition « Tex Avery en intégralité », en janvier 2004, pour protester contre la publication d’une édition soi disant complète des Tex Avery de la MGM, amputée de deux films, Half-Pint Pigmy et Uncle Tom's Cabana, pour cause d’anti-racisme. Je m’étais également abstenu d’acheter ce coffret, malgré l’envie de revoir les films restant à volonté et dans de bonnes conditions.

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Patrick Brion nous apprend, dans un entretien donné au Figaro du 28 février (p.28) et sur son blog du « Cinéma de minuit », que deux autres films ne peuvent plus être diffusés, The Isle of Pingo Pongo et Johnny Smith and Poker Huntas. Heureusement que nous restent nos vieilles vhs ! Cela nous évitera de faire la fortune de petits malins qui exploitent le filon en éditant des DVD pirates de "Banned Cartoons" (auxquels je m’empresse cependant d’emprunter moi aussi des photos de films interdits) (1).Banned-Cartoons.jpg

Seule consolation : cela risque de faire plus parler de Tex Avery, ce dont on ne saurait se plaindre !

Complément :
(1) Il était à prévoir que les deux dessins animés censurés referaient surface en ligne, par exemple ici.

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LES HISTORIENS EXPERTS DU CINÉMA

6 Mars 2008, 17:57pm

Publié par Mister Arkadin

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« Depuis sa sortie, Histoires à ne pas dire suscite la polémique. Ce film concentre les critiques d’historiens de la guerre d’Algérie. » Ainsi commence l’article sur le film de Jean-Pierre Lledo, en page 12 du numéro de Télérama paru hier. De fait, l’article est au deux tiers constitué par quatre longues citations, Thierry Leclère ne faisant qu’en reprendre, dans le reste de l’article, les arguments et termes (comme le titre de l’article, « La guerre des mémoires », repris de la dernière citation), de sorte qu’il aurait tout aussi bien pu publier son papier sous forme d’un entretien avec les historiens rencontrés. Les historiens ? Ceux qui auraient donc concentré leurs critiques sur Histoires à ne pas dire. À y regarder de plus près, on se rend vite compte que, si concentration il y a, c'est parce que les historiens en question se réduisent au seul Benjamin Stora, Monsieur-Guerre-d’Algérie en France, presque systématiquement interrogé sur la question. De là à ce qu’il devienne les « historiens », il y avait un pas que les médias dominants n’avaient pas tout à fait encore franchi. Je ne nie pas que Benjamin Stora puisse être un universitaire ayant un avis digne d’intérêt, mais qu’il ait fini par être érigé en arbitre suprême, en autorité officielle chargée de dire la vérité historique m’inquiète quelque peu, d’autant qu’il ne manque pas d’historiens pour avoir des avis différents des siens, contrairement à ce que l’on semble chercher à nous faire accroire.

 

Il faudrait étudier un jour plus en détails la façon dont les historiens sont convoqués par les médias pour commenter les films, comment, la plupart du temps, ils sont choisis en fonction de l’avis préalable que le journal se fait du film en question, sur des critères au moins autant idéologiques que scientifiques. Ce fut particulièrement flagrant lors de la sortie du film de Tavernier Laissez-passer. Mais l’intervention des historiens (et plus largement des "savants", universitaires ou "experts") dans la réception critique des films mériterait d’être analysée en ce qui concerne bien d’autres, d’Amen à La Passion du Christ, de L’Anglaise et le duc à La Chute. Ce sera l’objet d’un prochain ouvrage, comme aurait dit Jean-Paul.

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Complément (15 juillet 2015) : Extrait du bulletin de ré-information de Radio Courtoisie du 23 avril 2015 (« Le bobard historique du jour ») :

« Le 17 avril dernier sur Europe 1, dans un débat sur les massacres d’Algériens à Sétif, le 8 mai 1945, le journaliste Serge July a évoqué la responsabilité « des fascistes et de Vichy », oubliant que le régime de Vichy n’existait plus depuis 9 mois et que le chef du gouvernement était alors le général de Gaulle.

Persistant dans son ignorance, Serge July parle de « dizaines de milliers de morts » alors que la plupart des estimations ne dépassent pas plusieurs milliers. 

Présent à cette émission, Benjamin Stora, historien pourtant spécialiste de cette période, n’a pas relevé la libre multiplication par dix du nombre de répressions françaises. Tout comme on parle de 6 000 morts, en 1946, à Haiphong alors qu’il y en a eu 600.historiens »

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CINÉMA ET RADIO : SEMAINE DU 8 MARS 2008

6 Mars 2008, 17:21pm

Publié par Mister Arkadin

Voici la liste des émissions radiophoniques sur le cinéma de la semaine à venir :

 

Dimanche 9 mars, à 22h30, France Culture : « ACR » (« Atelier de création radiophonique »), avec « Marcher à côté de ses lacets dans un frigidaire vide » (11’ min.), bande-son de l’installation de Chantal Akerman en 2004 à New-York

 

Dimanche 9 mars, à 12h05, Vivre FM (« radio associative destinée aux personnes handicapées et à tous ceux concernés par le handicap et l’exclusion ») : « Le 6e sens » (Mathieu Simonet), avec Claire Vassé, pour son livre Le Figurant (Editions Panama)

 

Lundi 10 mars, à 21h04, France Inter : « Sur la route » (L.Lavige), sur le film Je t’aime, moi non plus de Serge Gainsbourg

 
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Mardi 11 mars, de 19h15 à 20h00, Radio Classique : « Hees bien raisonnable » (Jean-Luc Hees), avec le cinéaste Olivier Marchal et l’actrice Catherine Marchal pour le film MR 73

 
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Mardi 11 mars, de 15h00 à 16h00, Europe 1 : « Regarde les hommes changer » (Frédéric Taddéï), avec l’acteur François Berléand

 

Mercredi 12 mars, à 17h10, RFI : « Culture vive », avec Éric Zonca pour son film Julia

 
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Jeudi 13 mars, de 11h00 à 12h00, France Culture : « La Société des Nations » (Madeleine Mukamabano), en direct de la Maison des Arts du Grütli à Genève, pour le Festival international du film et forum sur les Droits humains

 

Jeudi 13 mars, de 16h00 à 17h00, France Culture : « Sur les docks, l’heure du documentaire » (Pierre Chevalier), dans le cadre de la série « Israël : Nouvelles vagues » (Joseph Confavreux), quatrième volet sur « Le printemps du cinéma israélien », avec Tawfik Abu Wael, Shira Geffen et Etgar Keret, Raphaël Nadjari, Mushon Salmona, David Volach, réalisateurs, Ronit Elkabbetz, actrice et réalisatrice, Ariel Schweitzer, professeur de cinéma

 

Jeudi 13 mars, de 19h15 à 20h00, Radio Classique : « Hees bien raisonnable » (Jean-Luc Hees), avec l’actrice et réalisatrice Maria de Medeiros
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Liens et informations complémentaires :

 

Rappel : Grille des émissions de radio spécifiquement consacrées au cinéma

 

- Du 21 janvier au 13 avril 2008, Radio Classique présente « Les Élections de la musique de film », 60 musiques candidates étant classées par thématique (romance, road-movie, western...) et diffusées à l'antenne deux par deux, en confrontation

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