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LIBRE JOURNAL DU CINÉMA DU 20 OCTOBRE 2022 : ACTUALITÉ DES FILMS ; ROBERT LE VIGAN

20 Octobre 2022, 00:35am

Publié par Mister Arkadin

Au programme du "Libre journal du cinéma" de 20 octobre 2022 :

  • Actualité des films, avec Jean-Max Méjean (critique à Jeune cinéma et à "iletaitunefoislecinema.com" ; dir. Pasolini), notamment à propos de Sans Filtre, film suédois de Ruben Östlund ayant obtenu la palme d’or au dernier festival de Cannes (mai 2022, dont il a rendu compte au jour le jour), Rifkin's Festival (Woody Allen), La Nuit du 12 (Dominik Moll), Avatar (James Cameron), Simone, le voyage du siècle (Olivier Dahan), Ariaferma (Leonardo Di Constanzo), Ticket to Paradise (Ol Parker), etc.

Sera aussi rendu hommage à l’historien du cinéma d’animation Sébastien Roffat.

 

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VIEUX GENRE

7 Janvier 2015, 18:49pm

Publié par Mister Arkadin

Nous y sommes, les "vieux-films" constituent un genre en soi, à l'instar des films d'arts martiaux ou des thrillers, d'après la nomenclature d'un site proposant des films en ligne :

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(tout serait à commenter, par ailleurs, dans cette liste passablement hétéroclite, la présence de "Concert", la dissociation entre un film de "Walt Disney" et un film d'"animation", l'absence de la catégorie "Erotique", voire "Pornos", etc.).

 


Même "catégorie" sur un site du même type, où toutes les années antérieures à 1950 constituent l'une des huit périodes proposées :

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INÉDIT, A DEMI, ENTIERE SPLENDEUR

16 Décembre 2011, 00:05am

Publié par Mister Arkadin

Prière de ne pas se laisser embobiner par la "grande presse", qui prétend à coups de pleines pages de publi-rédactionnel que les événements cinématographiques de la semaine seraient deux grosses machineries hollywoodiennes. Le film à voir en priorité est The Terrorizers, une merveille réalisée par Edward Yang en 1986.

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Aussi bien Positif que les Cahiers du cinéma, dans leur numéro de décembre, ont salué ce film « jamais sorti en France », comme le rappelle Joachim Lepastier. Il convient cependant de rappeler qu’en plus d’avoir été projeté occasionnellement, à la Cinémathèque française (rétrospective Edward Yang de décembre 2010, que j’avais pour ma part manquée pour cause de neige) et probablement au centre culturel de Taïwan, il fit l’objet, il y a une bonne dizaine d’années, d’une diffusion sur Arte. Cette chaîne a si souvent déçu qu’il ne fallait rater l’occasion de rappeler qu’elle sauve tout de même l’honneur de la télévision française et qu’elle seule justifie qu’une redevance soit exigée des contribuables français !


Complément : J'avais écrit ce billet avant de découvrir que Jean-François Rauger, dans Le Monde du 15 décembre 2011 (p.31), saluait la « sortie trop discrète d'un film inédit d'Edward Yang », qu'il qualifie d'"événement" (il ne signale toutefois pas que le film n'est pas tout à fait inconnu du public français).

http://s1.lemde.fr/image/2011/12/02/678x339/1612912_3_ee85_une-scene-du-film-taiwanais-d-edward-yang-the.jpg

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"IMAGES D’HIER" À VENIR

14 Novembre 2011, 14:58pm

Publié par Mister Arkadin

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Faisant à la fois partie des critiques de Jeune cinéma invités à présenter des films au Champollion, dans le cadre de la programmation "Images d’hier" (Le Cri de la victoire en mai dernier), et des privilégiés ayant assisté à la magnifique soirée du 11 octobre consacrée aux Mauvaises rencontres, en présence d’Anouk Aimée et Alexandre Astruc, je me fais un plaisir d’annoncer les séances suivantes :

- Les Mois d'avril sont meurtriers, en présence de Laurent Heynemann et Jean-Pierre Marielle, le mardi 6 décembre 2011, à 21h00 ;

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- Chagrin d’amour, de Franck Borzage, présenté par Patrick Saffar, en janvier 2012 ;

- Alamo Bay, de Louis Malle, présenté par Bernard Nave, en février 2012 ;

- La Jeune Fille, présenté par Vincent Dupré, en mars 2012 ;

- Fantôme à vendre, de René Clair, présenté par Prosper Hillairet, en avril 2012.

Cette manifestation est accompagnée par un jeu-concours permettant de gagner des places gratuites et des numéros de la revue Jeune cinéma.

Enfin, si l’état d’avancement de mes petits travaux de recherche en histoire du cinéma le permet, je présenterai moi-même en fin de saison l’un des films suivants :

- Le Secret du grand canyon, de Don Siegel (film sorti en France le 13 mai 1960) ;

- Le Chevalier sans armure, de Jacques Feyder (film sorti en France le 2 septembre 1937) ;

- Far-West 89, de Ray Enright (Return of the Bad Men, film sorti en France le 6 juillet 1949) ;

- La Femme en bleu, de Michel Deville (film sorti en France le 3 janvier 1973) ;

- La Belle de Rome, de Luigi Comencini (film sorti en France le 31 mai 1957) ;

- La Maison des perversités, de Noboru Tanaka (film de 1976 sorti en France le 6 juin 1990 ;

- Les Évadés, de Jean-Paul Le Chanois (film sorti en France le 17 juin 1955) ;

- Le Puritain, de Jeff Musso (film sorti en France le 13 janvier 1938) ;

- Brumes, de Howard Hawks (film sorti en France le 5 juin 1936) ;

- Compartiments de dames seules, de Christian-Jacque (film sorti en France le 1er février 1935) ;

- Gran Bollito, de Mauro Bolognini ;

- Liberté, mon amour, de Mauro Bolognini (Libera, amore moi).

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AA-AA

19 Septembre 2011, 23:02pm

Publié par Mister Arkadin

Dans le cadre d'"Images d'hier", programmation au Champollion à laquelle j'ai participé, va être présenté Les Mauvaises rencontres d'Alexandre Astruc, en présence du cinéaste et de son actrice, Anouk Aimée, le mardi 11 octobre à 20 heures. http://a4.sphotos.ak.fbcdn.net/hphotos-ak-snc7/303838_278607832152534_157137890966196_1215011_2045067275_n.jpgAvis aux amateurs (si je puis me permettre une autre allitération) !


 

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"RAW DEAL"

24 Août 2011, 23:05pm

Publié par Mister Arkadin

Raw Deal (« Marché de brutes »), Anthony Mann, 1948 ; scénario de Leopold Atlas et John C. Higgins ; photo de John Alton ; avec Dennis O’Keefe (Joseph Sullivan, dit Joe), Claire Trevor (Pattie, dite Pat), Marsha Hunt (Ann), Raymond Burr (Rick), John Ireland (Fantail)

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Une nouvelle occasion nous a été donnée par la programmation du câble de se rappeler qu’Anthony Mann n’est pas seulement l’auteur de quelques-uns des plus beaux westerns des années 1950. Mann est en effet loin de ne s’être illustré que dans le genre auquel il doit principalement sa notoriété. Sa carrière, relativement brève par rapport à d’autres classiques américains, mais plutôt féconde (35 films entre 1942 et 1961, puis trois jusqu’en 1968), comporte grosso modo quatre périodes correspondant à quatre genres bien distincts de la production hollywoodienne. Quelques chevauchements d’une période à une autre, et quelques parenthèses – telle la bio-americana « The Gleen Miller Story » (1954), également diffusée il y a peu sur le câble – peuvent évidemment être repérés, mais, schématiquement, voici comment la carrière de Mann se compose.

Une première période est consacrée à des comédies, assez légères dans l’inspiration et dans le ton, mais plutôt lourdingues dans l’exécution. L’année 1945 par exemple (avec les faiblards « Two O’Clock Courage » et « Sing Your Way Home », diffusés l’été dernier), prouve que Mann mit quelque temps à trouver ses marques.

Changement de registre radical peu après, avec notamment « Desperate » (1947), que Mann, d’après le Coursodon / Tavernier, considérait comme son véritable départ. Il est passé à de petits films noirs de bonne facture, dont les intrigues s’apparentent à celle du célèbre « Detour » d’Edgar Ulmer, puisque plusieurs de ses films racontent l’histoire d’un pauvre ère pourchassé, soit par la police, soit par des truands, et même par les deux à la fois la plupart du temps, mais bien plus sûrement encore par le mauvais sort, la poisse semblant le poursuivre de bout en bout. John Dahl est l’un des meilleurs représentants actuels de ce type de film noir (voir « Une Virée en enfer », récemment diffusé), sauf que ce qui nous est raconté aujourd’hui en 1h45 l’était dans les années 1940-1950 en 1h15 ! Le film le plus caractéristique dans cette optique est « Side Street » (1950), que l’absence de temps morts, de "graisse" serait-on tenté d’écrire, sans pour autant que soient négligées quelques pauses, rend assez palpitant. Deux remarques à propos de ce film. Premièrement, Mann réussit l’exploit de rendre Farley Granger supportable. Deuxièmement, il comporte un plan aussi xénophobe que possible, puisque, dans la première séquence, l’immigration est ouvertement désignée comme la cause des troubles à l’ordre public que connaissent les Etats-Unis.

Passons rapidement sur les troisième et quatrième périodes, celle des westerns vénérés à juste titre (dès son premier essai, « Winchester 73 », en 1950, Anthony Mann signe l’un des plus grands chefs-d’œuvre du genre) et celle des péplums (« Le Cid », « La Chute de l’empire romain »), à revoir en essayant d’oublier qui en est l’auteur pour les juger avec le moins de parti pris possible.

Et venons-en à la principale qualité de « Raw Deal », qui appartient à la seconde période décrite. Il est préférable de désigner ce film pour son titre original, non par snobisme, mais parce que « Marché de brutes » est une traduction non seulement inélégante, mais aussi assez peu fidèle, « Marché de dupes » convenant mieux.

Des brutes, il y en a certes à revendre dans le film de Mann, d’une violence assez inouïe par instants. La plus fameuse scène à cet égard voit Raymond Burr ébouillanter une femme qui a juste eu le malheur de l’agacer et d’être un peu maladroite à un moment où le moindre prétexte eût été bon pour qu’il se mette en colère. S’il est un film pour lequel on peut utiliser une fois de plus l’une des plus célèbres sentences d’Hitchcock sans crainte de la galvauder, tant elle fait l’objet d’un usage intensif, et parfois abusif, c’est bien celui-là : « Plus réussi est le méchant, meilleur est le film. » Le physique de Raymond Burr a suffi pour lui assurer une carrière riche en rôles de caïds aussi féroces qu’impitoyables (notamment dans « L’Or et l’Amour » de Jacques Tourneur). S’il a trouvé ici son meilleur emploi, c’est en premier lieu grâce au travail du chef opérateur John Alton, qui alterne très habilement sur lui plans américains et plans rapprochés, plongées et surtout contre-plongées, soulignant ainsi son imposante carrure et son impressionnante stature, Raymond Burr ne bougeant que très peu et gardant presque constamment un visage fermé, dur et impassible, d’autant plus inquiétant que le moindre de ses mouvements, le moindre de ses rictus prennent de ce fait une soudaine ampleur. L’autre élément rendant le personnage qu’il interprète (Rick) si réussi est à mettre à l’actif des scénaristes. Comme d’habitude, il inspire la peur à son entourage et à ses victimes ; il faut le voir se contenter de brandir un petit briquet pour menacer de torture une femme prise en otage ou encore l’allumer derrière un comparse et l’approcher de son oreille pour s’amuser à l’effrayer. Mais l’idée particulièrement astucieuse des scénaristes est de l’avoir rendu de plus en plus agressif à mesure que sa propre peur augmente. Car lui-même, d’abord si sûr de sa force et de son stratagème (après s’être arrangé pour qu’un complice – Joe – aille en prison à sa place, il s’arrange pour le faire s’évader afin que cet « ami » compromettant soit supprimé par la police ou par ses hommes de mains avant qu’il puisse arriver jusqu’à lui pour récolter l’argent promis d’après le marché conclu, le « marché de dupes » du titre), en vient à perdre sa belle assurance et toute sérénité au fur et à mesure que Joe s’approche du lieu de rendez-vous en se jouant tant bien que mal de ses poursuivants.

(texte rédigé les 16 février et 10 mars 2004, à l'occasion de la diffusion du film sur Cinétoile ; publié au préalable sur "Cine-Studies.net").

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"CAPTIVE WILD WOMAN"

1 Août 2011, 23:03pm

Publié par Mister Arkadin

Captive Wild Woman, Edward Dmytryk, 1943, 65 minuteshttp://farm5.static.flickr.com/4036/4367334790_4585fca4bd.jpg

Pas un mot dans les dictionnaires sur ce superbe film fantastique, ni chez Tulard, ni chez Lamy et Rapp, ce qui ne surprend qu’à moitié, mais pas non plus chez un historien du cinéma autrement averti comme Lourcelles ; tout juste le si érudit tandem Coursodon / Tavernier l’a-t-il fait figurer dans la filmographie du réalisateur Edward Dmytryk. C’est probablement le nom de ce dernier, honni depuis quelque sombre histoire d’après la Seconde Guerre mondiale sur laquelle il est inutile de revenir ici, qui explique que Captive Wild Woman ne soit pas envisagé avec le même préjugé favorable que s’il était signé Browning ou Tourneur. Certes, l’hebdomadaire de programmes TV Télérama a daigné lui consacrer une colonne le 5 novembre 2003 (n°2808, p.107). Mais la caractérisation du genre (« tu m’aimes ? Oh ! guenon… ») de « cette petite série B speedée » trahit plus de condescendance pour un « nanar » que d’intérêt véritable.

Cette œuvre est pourtant digne des trois films auxquels elle fait immanquablement penser : Frankenstein, puisque l’impeccable John Carradine interprète un scientifique pris par l’ivresse de son savoir et obsédé par la volonté de créer une créature nouvelle par transfusion entre l’homme et le singe ; La Féline, la portée érotique du film étant renforcée par le choix d’une femme par le savant et par les métamorphoses qu’elle peut subir en fonction des événements ; Freaks, une grande partie de l’histoire se passant dans un cirque où les bêtes sont regardées et filmées avec le même respect que dans le film de Browning.

C’est toutefois d’un point de vue esthétique que Captive Wild Woman est le plus captivant. De très nombreuses scènes de domptage de grands fauves, parfaitement intégrées à l’intrigue et n’ayant par conséquent aucune fonction d’ornementation, sont également parfaitement intégrées au reste du film d’un point de vue chromatique. Rarement il aura été donné l’occasion de voir sur un écran des scènes aussi spectaculaires ne semblant absolument pas avoir été insérées avec maladresse entre deux scènes "normales". La continuité au niveau du grain des images, de leur vitesse de défilement, de la présence de l’acteur au milieu des fauves (qui, de ce fait, donne l’impression d’être réellement un dompteur professionnel risquant sa vie à tout instant), la virtuosité du montage n’ont, à notre connaissance, guère d’équivalent. Et les images de synthèse à la Jurassic Park ou à la Final Fantasy ont encore bien des progrès à faire pour arriver à un pareil résultat. L’émotion est à son comble quand la créature issue du croisement entre femme et singe, les autres protagonistes ignorant son origine, entre dans la cage pour sauver le dompteur blessé. Que la force du désir féminin s’exprime alors par l’acte de porter l’homme tombé au sol et en proie au danger, renversement du schéma habituel, ne le rend que plus prégnant.

(texte rédigé le 19 novembre 2003, à l'occasion du passage de ce film sur "CineClassic" ; initialement publié sur "Cine-Studies.net").

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"LE CRI DE LA VICTOIRE", RAOUL ET NOUS

27 Avril 2011, 23:05pm

Publié par Mister Arkadin

(à propos du film de Raoul Walsh présenté au Champollion, le 3 mai 2011,
dans le cadre du cycle "IMAGES D’HIER")

 

Presence-du-cinema--13--Raoul-Walsh.JPGQuand Le Cri de la victoire sortit dans trois salles parisiennes, le 1er juin 1955, Raoul Walsh n’était, aux yeux de la plupart des cinéphiles, qu’un réalisateur hollywoodien parmi tant d’autres, ne se distinguant guère que par sa longévité et par son habilité à « traiter les grands espaces, les bagarres viriles et les amours brutales » (Cahiers du cinéma, noël 1955, « Situation du cinéma américain »). Bien qu’un film sur la guerre du Pacifique, sujet sur lequel il s’était déjà illustré, semblât particulièrement propice au déploiement des qualités reconnues à Walsh, plusieurs critiques, et non des moindres (André Bazin dans Le Parisien libéré et Jean Thévenot dans Les Lettres françaises) le passèrent sous silence, alors même qu’ils rendirent compte le même mois de deux autres films représentant l’armée, 08-15 et Les Gaietés de l’escadron, dont on a peine à imaginer qu’ils pouvaient soutenir la comparaison. Si le trio Chabrol/Doniol-Valcroze/Truffaut (respectivement dans les Cahiers du cinéma, France-Observateur et Arts) sut déceler que Le Cri de la victoire était bien plus qu’un film de série, ils auraient fait ricaner s’ils y avaient vu la patte d’ « un immense cinéaste », « dont certains films valent très largement les tragédies de Shakespeare », ainsi que Michel Mourlet a récemment pu qualifier Walsh sur une radio culturelle, le plus sérieusement du monde et sans provoquer la stupeur de quiconque. C’est qu’entre-temps, les Mac-Mahoniens, dont Mourlet entretient vaillamment le souvenir, ont érigé Walsh au rang des maîtres vénérés, au sein de leur fameux quatuor (Lang-Losey-Preminger-Walsh). Le n°13 de Présence du cinéma (mai 1962), tout simplement intitulé « Raoul Walsh », assura la consécration de leur idole. On notera cependant qu’aucun des six critiques du mouvement[1] appelés à désigner ses « six meilleurs films » ne mentionna Le Cri de la victoire. Il est presque surprenant qu’ils n’aient pas saisi l’occasion de faire la nique à la frange la plus "progressiste" de la critique, qui s’était, en pleine Guerre froide, déchaînée contre un film-sergent-recruteur de l’armée américaine. Donnons une idée de la violence des controverses suscitées alors par le cinéma en citant deux descentes en flamme parues au moment de sa sortie : « Tous les mensonges de la propagande figurent dans cette chronique des exploits d’un bataillon de "marines". Le sergent Flick dissimule un cœur d’or sous sa tunique de brute, le colonel est le père du régiment et le prestige de l’uniforme fait tomber les filles, belles comme la nuit et pures comme le jour, dans les bras de Croquebol. […] malades ou blessés, [ils] ne rêvent qu’à retourner en première ligne pour étriper du Jap… avant que la bombe atomique se charge du travail en gros. La censure accorde sans difficulté le visa à ce genre de film obscène » (Le Canard enchaîné) ; « du début à la fin, une exaltation constante du dressage à la prussienne qui réduit l’individu au niveau d’un robot dressé pour la bagarre. C’est l’apologie du dur, du bagarreur sportif telle qu’elle s’étalait sur les affiches des recruteurs de la sale guerre. Et comme l’armée américaine a largement participé à la réalisation de cette bande, on conçoit dans quel but elle a pu être conçue. Ainsi, les moyens spectaculaires mis en œuvre et le talent de certains acteurs ne peuvent supprimer la répulsion du spectateur devant cette basse propagande guerrière qui démontre que le superman yankee est bien le frère jumeau des SS » (L’Humanité).Le-Cri-de-la-victoire---5.jpg

A contrario, Michel Marmin voyait en 1970 dans cette « chronique de l’apprentissage de la guerre » montrant « le maniement des armes, les marches répétées de cinquante kilomètres, les exercices inlassablement recommencés, les pieds ensanglantés, les courbatures, le poids du fusil et du sac », « mais aussi la joie collective, l’amitié, les farces, les chants de marche, les longs repos silencieux, l’échauffement fraternel des corps », « de belles et graves leçons qui s’incrustent dans le chair le cœur, de réels et profonds enseignements enregistrés, selon la belle expression de Charles Péguy, dans "la mémoire des muscles et des cuisses" ». La « courte séquence » de débarquement et de charge, « qui dépasse peut-être en violence et en beauté Objective Burma et The Naked and the Dead », lui inspirait la conclusion suivante : « Battle Cry, c’est aussi une ouverture sur l’héroïsme. » On mesure à quel point un changement d’époque a bouleversé le paysage idéologique en lisant sous la plume de Pierre Giuliani, en 1986, que le propos de Walsh, dans Le Cri de la victoire, n’était « de magnifier ni la guerre, ni l’esprit guerrier, encore qu’il soit toujours très sensible à l’esprit de corps. Au contraire, la guerre et l’armée sont montrées antagonistes de la vie, même s’il y a de la vie dans ce qui lui est étranger, même si elles permettent les apprentissages d’où naîtront la capacité que chacun a de vivre et la fatalité que chacun peut avoir de mourir. Guerre et amour, la même carte et les mêmes failles : blessure, mutilation, mort. Entre les deux, essayer de survivre si cela se peut. » Que de circonvolutions pour que le film d’un réalisateur devenu intouchable ne soit pas taxé de militarisme ! Notre attention est désormais attirée par le soin, et partant le temps (justifiant une durée inhabituelle pour un "film d’action" de l’âge d’or hollywoodien), que Walsh prend a décrire ses personnages, leurs relations et les drames intimes qui se nouent, davantage que par la description de la vie militaire, et plus encore l’action proprement dite, les batailles étant réduites à la portion congrue.Le-Cri-de-la-victoire---1.jpg

Grâce à "Images d’hier", nous pouvons aujourd’hui nous faire notre propre opinion sur ce film rarement projeté sur grand écran. À vous de le juger sur pièce et d’assurer la réputation du Cri de la victoire, dans le sens qu’il vous plaira, pour que l’œuvre de Walsh persiste à vivre dans les mémoires cinéphiles !


SOURCES

 

Réception

- Baroncelli (Jean de), Le Monde, 9 juin 1955, p.12

- G.B. (sans doute Gilbert Bloch), L'Humanité, 11 juin 1955, p.2

- Chabrol (Claude), « Raoul », Cahiers du cinéma, n°49, juillet 1955, p.51-52

- Chazal (Robert), Paris-Presse l’Intransigeant, 4 juin 1955, p.10

- Chauvet (Louis), Le Figaro, 6 juin 1955, p.10

- Doniol-Valcroze (Jacques), France-Observateur, n°276, 23 juin 1955, p.30

- Lisbona (Joseph), Cinéma 56, n°9, février 1956, p.90

- Néry (Jean), Franc-tireur, 10 juin 1955, p.2

- O’Picratt (sans doute Pierre Laroche), Le Canard enchaîné, 8 juin 1955, p.4

- Truffaut (François), Arts, n°520, 15 juin 1955, p.6

Les Écrits de Paris (François Le Grix), Hommes et mondes (François-Régis Bastide), Les Lettres françaises (Georges Sadoul, Jean Thévenot, etc.), La Nouvelle Nouvelle Revue Française (François Nourissier), Le Parisien libéré (André Bazin, André Lafargue), Revue des deux mondes (Jean Fayard), Rivarol (B. de Garambé, Gilles Martain) et Les Temps modernes (Raymond Borde et Colette Audry) n’ont pas rendu compte du film.

 

Autres comptes rendus d’époque

- L'Aurore, 4 juin 1955 [Revue de presse BiFi]

- France-soir, 9 juin 1955 [Revue de presse BiFi]

- Les Nouvelles littéraires, 16 juin 1955 [Revue de presse BiFi]

- Radio Cinéma Télévision, 19 juin 1955 [Revue de presse BiFi]

- Mon Film, n°470, 24 août 1955, p.3, film raconté, Jeanne R. Morland [Index Calenge]

 

Textes ultérieurs

- Cahiers du cinéma, tome IX, n°54, noël 1955, « Situation du cinéma américain », « Dictionnaire des réalisateurs américains contemporains », p.61.

- Marmin (Michel), Raoul Walsh, Paris, Éditions Seghers, coll. « Cinéma d’aujourd’hui », 1970, p.36-38 ; Raoul Walsh ou l’Amérique perdue, Coulommiers, Éditions Dualpha, 2003, p.56-58

- Dutourd (Jean), « Le patriotisme des autres », France Soir, 22 janvier 1974, rubrique Télévision ; repris dans Cinq ans chez les sauvages, Paris, Flammarion, 1977, p.157-159

- Giuliani (Pierre), Raoul Walsh, Paris, Éditions Edilig, coll. « Filmo-14 », 1986, p.136-137

- Coursodon (Jean-Pierre) et Tavernier (Bertrand), 50 ans de cinéma américain, Paris, Nathan, 1991, tome 2, p.950

- Brion (Patrick), Le Cinéma de guerre. Les grands classiques américains : Des « cœurs du monde » à « Platoon », Paris, Éditions La Martinière, 1996, p.228-231

- Skorecki (Louis), Raoul Walsh et moi, Paris, Presses Universitaires de France, 2001

- Tulard (Jean), Guide des films, Robert Laffont, mars 2002, tome 1, p.738 (***)

- Moreau (André), Le Guide Cinéma, "Télérama", Hors Série, édition 2009, p.396 (TT)Le-Cri-de-la-victoire---4.jpg


[1] Marc C. Bernard, Jean Curtelain, Jacques Lourcelles, Michel Mourlet, Pierre Rissient, Jacques Saada, « Les six meilleurs films de Raoul Walsh », Présence du cinéma, n°13, mai 1962, p.33. Jacques Lourcelles a retenu vingt-deux films de Raoul Walsh dans son Dictionnaire du Cinéma. Les Films (Robert Laffont, coll. « Bouquins », 1992), mais pas Le Cri de la victoire.

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