Mister Arkadin

Articles avec #critique - histoire

BAZIN DE NAVARRE

16 Janvier 2009, 11:39am

Publié par Mister Arkadin

Dans mon billet du 9 septembre dernier, je mentionne le cycle de projections « Le regard d'André Bazin », organisé à la Cinémathèque française, parmi les événements de l'histoire de la critique en France. Depuis, le cycle Francis Lacassin a rendu un peu moins exceptionnelle cette focalisation, voire cette glorification du point de vue d'un médiateur du cinéma, considéré comme aussi digne d'intérêt que l'œuvre d'un cinéaste. Loin de moi l'idée, par conséquent, de minimiser l'apport de Bazin à la pensée sur le cinéma. Celle-ci fait l'objet d'un travail de "redécouverte" bienvenu, notamment de la part de Hervé Joubert-Laurencin, dont le point d'orgue devrait être la mise à disposition sur le Net, dans le courant de l'année, de l'ensemble des articles de Bazin. Nul doute que cet "événement" doive être salué et ajouté à mon ébauche de liste.

Ne peut-on cependant éprouver quelque agacement à la lecture de la prose parasitaire que la promotion du grand Bazin engendre ? Je l'ai déjà noté à propos des Cahiers du cinéma, ici. Serait-ce faire injure à l'icône que de rappeler que la critique de cinéma en France ne lui doit pas absolument tout ? « Père fondateur de la critique de cinéma de France et de Navarre », écrit-on dans Télérama (1). La France n'est plus suffisante !

L'article est, sur le site de Télérama, accompagné de façon judicieuse par une nécrologie de Bazin par François Truffaut. La piété, quasi filiale, de celui-ci, honorable en tant que telle, et même assez touchante (voyez son hommage à "Apostrophes", un an avant sa propre mort), implique-t-elle que tout ce que la statue du Commandeur a proféré doive être pris pour argent comptant (cf. ses propos sur le cinéma anglais, dont des semi-habiles du genre des Inrocks ne sont pas encore revenus) ?


(1) « Redécouverte - Avez-vous lu André Bazin ? », par Jérémie Couston, Télérama, n°3078, 7 janvier 2008, p.43

L'année sera Bazin. Auteur de 2 500 textes sur le cinéma, André Bazin (1944-1958), père spirituel de François Truffaut et de la critique française, est déjà depuis novembre, 50e anniversaire de sa mort, célébré un peu partout. Notamment en ligne.

« André Bazin, comme les personnages de Giraudoux, était un homme d'avant le péché originel. Tout le monde le savait honnête et bon, mais son honnêteté et sa bonté surprenaient toujours tant elles se manifestaient pleinement. Parler avec lui, c'était comme pour un hindou se baigner dans le Gange. » L'hommage est de François Truffaut, « fils adoptif » d'André Bazin (1918-1958), le père fondateur de la critique de cinéma de France et de Navarre.

En novembre dernier, cinquante ans après sa disparition, Jeanne Moreau a prononcé ce vibrant éloge dans le cadre du colloque franco-américain « Ouvrir Bazin », coorganisé par les universités Paris-VII et Yale. A en croire Dudley Andrew, son biographe, il ne s'agit pas d'une commémoration mais plutôt d'une « émergence » : « Nous révélerons un Bazin qui continue d'émerger de son corpus », promettait l'universitaire. Et quel corpus ! En écrivant plus de 2 500 textes sur le cinéma entre septembre 1944 et novembre 1958, André Bazin est l'auteur d'une œuvre inégalée encore peu connue et quasi introuvable aujourd'hui (mis à part le best of Qu'est-ce que le cinéma ?). Grâce aux efforts de son plus rigoureux fan, Hervé Joubert-Laurencin, l'intégralité des archives baziniennes (dont des centaines d'articles de Radio-Cinéma-Télévision, ancêtre de Télérama !) devrait être disponible en ligne en 2009. En attendant, les conférences continuent à Paris jusqu'au printemps.


"Une année Bazin" : www.ac-paris.fr/portail/jcms/piapp1_62822/programme-une-annee-bazin - Le programme complet en PDF

Prochain rendez-vous : vendredi 16 janvier, "De Bazin à Jacques Rancière : critique et théorie du cinéma", Philip Watts, 16h-18h, INHA (Institut National de l'Histoire de l'Art, Galerie Colbert, 2 rue Vivienne, 75002 Paris), salle Walter Benjamin

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CINÉMA, POÈTE MALGRE LUI

7 Décembre 2008, 00:03am

Publié par Mister Arkadin

Je me suis réjouis que l'on retrouve plusieurs fois la signature d'Alain Virmaux dans le dernier numéro de Jeune cinéma. Même sur un sujet que l'on croit connaître, Monsieur Virmaux arrive à surprendre presque immanquablement par la justesse de ses analyses et par sa capacité à fournir au moins quelques renseignements que l'on peut être sûr de n'avoir jamais lus ailleurs. Il l'a surtout fait cette fois en m'apprenant l'existence du numéro 9 d'Aujourd'hui Jean Prévost (le bulletin des Amis de Jean Prévost, printemps-été 2008) sur les rapports de cet écrivain et du cinéma. Cette question m'intéresse depuis des années puisque j'avais consulté les chroniques cinématographiques que Prévost publia à partir de la fin des années 1920 (notamment dans les Nouvelles littéraires et la NRF) pour préparer mon ouvrage sur les origines de la critique de cinéma en France (plus de détails ici et ). J'y avais d'ailleurs cité les textes des pages 11 (passage sur Vuillermoz), 12 et 19 (à propos des controverses sur Charlot) du bulletin.http://www.zulma.fr/datas/images/personnes/personne_75.png

C'est donc avec ingratitude que je ne regretterai que la limitation du corpus, due à la minceur de ce bulletin, qui réussit tout de même, en vingt pages format A4, à présenter à la fois plusieurs textes de Prévost, un de Louis Daquin (sur son adaptation des Frères Bouquiquant) et des études d'Emmanuel Bluteau, Mireille Brangé et Michel Leforestier. La place étant limitée, il a fallu choisir. Espérons qu'un autre numéro d'Aujourd'hui Jean Prévost (1) ou un petit volume (encore faudrait-il trouver un éditeur courageux...) permettra de relire d'autres textes de Prévost sur le cinéma, parus notamment dans Le Crapouillot (dans les numéros spéciaux de 1927 et 1932) et dans Vu (numéro spécial de 1931 sur Charlot), ainsi que ceux parus pendant l'Occupation (« Le cinéma poète malgré lui », « L'avenir du cinéma »). Les fonds d'archives Jean Prévost (de la BnF et de Grenoble) comportent peut-être des inédits que l'on aurait plaisir à découvrir.

En attendant, je prends la liberté, afin de susciter la curiosité et l'envie de poursuivre le travail, de reproduire ci-dessous une longue étude de Jean Prévost parue à Lyon quelques mois avant son décès (texte que j'espère pouvoir reprendre dans l'anthologie dans j'ai déjà parlé ici).


(1) Ce bulletin confirme que les publications non cinématographiques, en particulier celles qui émanent des associations d'amis d'écrivains, sont une source essentielle pour l'histoire du cinéma. À signaler également dans ce domaine la parution récente d'un dossier sur le cinéma dans les Cahiers Marcel Aymé.

« Cinéma poète malgré lui », par Jean Prévost, Confluences, Lyon, n°20, juin 1943, p.495-500

Pour nous, nés avec ce siècle, le cinéma représente une part de nos espoirs qui n'est pas entièrement morte. Le laboureur jette un grain pour en récolter cent. L'artiste ou l'écrivain, au contraire, sur cent graines qu'il sème ou voit semer, s'estime heureux s'il peut en voir une seule échapper aux gelées, à la sécheresse, aux bêtes, et mûrir.

Je me rappelle avoir souvent débattu ces espérances sur l'art de l'écran, avec deux des hommes que je respectais et aimais le plus au monde : Alain et Georges Duhamel. Pour eux, le cinéma n'était qu'un fragment de ce vaste univers moderne tout standardisé, tout mécanique, qu'ils tentaient de rejeter en bloc. Et j'ai toujours été d'accord avec eux sur le fond des choses : tout le progrès matériel n'est rien, moins que rien, s'il n'est pas la condition d'un progrès spirituel. J'essayais de trouver dans quelles conditions le cinéma pouvait devenir une chance de progrès, d'art neuf. Je sentais qu'il est toujours vain de lutter contre l'inéluctable et que mieux vaut s'en servir - comme le skieur ou le plongeur ne doivent jamais contrarier le hasard qui le pousse en avant, - mais continuer l'élan toujours.

Nous nous flattions aussi, des amis comme Alexandre Arnoux ou moi-même, de deviner l'avenir d'un art neuf, d'être ceux qui, penchés sur l'épaule de Giotto, auraient pu deviner à l'avance Léonard de Vinci, Michel-Ange ou Raphaël.

Le cinéma n'a pas encore donné ses chefs-d'œuvre. Il n'a rien fait d'immortel ; il nous laisse toujours en attente. On peut déjà voir en quoi et pourquoi il ne nous a pas déçus.

Il y a un mot de Valéry (un diamant taillé dans les pierres d'Auguste Comte) :

- L'homme est stupide par ce qu'il cherche, et grand par ce qu'il trouve.

La peinture l'a vérifié autrefois. Elle a, pendant des siècles, essayé d'être la photographie, pour comprendre enfin, quand la photographie a existé, que peindre c'était créer. Le film, lui aussi, n'a donné naissance à un art qu'en ayant l'air d'oublier les prodigieux moyens qu'apportait sa machine.

Car on a bien cru, d'abord, que c'était une machine à montrer les choses en mouvement, et qu'il garderait toujours toute la puissance des choses elles-mêmes. A la fin du siècle dernier, à la présentation d'Un Train entre en gare, tous les spectateurs d'un mouvement instinctif, en voyant arriver sur eux la locomotive, reculaient vers le fond de leur siège. Et le cinéma en relief nous donne aussi, pour un quart d'heurs, les mêmes naïves émotions.

Dans les plus anciens films d'avant-guerre, on sent l'enivrement de cette puissance, le désir d'en abuser. Tout ce qui peut se montrer de plus effrayant, tout ce que le drame, le mélodrame ou le fait-divers ont d'horrible, toutes les émotions qui peuvent bouleverser l'homme jusqu'à la convulsion, y sont candidement étalés. Cette force était illusoire. Ces films n'ont pas ému longtemps. Aujourd'hui à peine s'ils nous font rire. En quelques séances, le naïf public avait pris l'habitude de l'image.

On s'aperçut bien vite que cet art de montrer avait d'étroites limites. Le truquage lui-même, après avoir un instant réussi, arrivait à faire douter des images prises sur le vif. On dut s'apercevoir, par exemple, que le cinéma ne peut pas donner l'impression de grandeur en photographiant de très grands objets. À l'époque du télé-objectif, je dis à René Clair :

- Vous aurez un sujet magnifique avec la Descente dans le Maëlstrom d'Edgar Poe. Le télé-objectif vous donnerait le gouffre.

- J'obtiendrais le même effet, me dit-il en riant, avec un tourbillon au fond d'une baignoire.

Ce qui poussait aussi le cinéma naissant à forcer l'expression des émotions, c'est qu'il se servait des acteurs et des gestes de théâtre. Un acteur de théâtre, obligé de faire comprendre, par ses gestes et son expression, ses émotions jusqu'à 50 mètres (distance du fond du poulailler) est obligé de forcer cette expression de la styliser. Son génie consistera à retrouver un naturel dans cette outrance inévitable. Au cinéma, au contraire, le spectateur est, par les gros plans, aussi proche qu'on veut de l'acteur. Vous découvrez l'outrance dans d'expression, plus nettement que dans la réalité.

Ni les metteurs en scène ni les acteurs ne réfléchissaient si loin. Je crois que ce qui a sauvé l'expression, dans les films, de l'imitation servile du théâtre, ce fut le caractère international du nouvel art. Le Français, l'Anglais, l'Allemand, l'Oriental peuvent bien subir les mêmes émotions, ils n'ont pas la même manière de faire les gestes. Le mouvement qui est dramatique pour l'un est bouffon pour l'autre. Et pourtant, il fallait vendre des films outre-mer. On s'aperçut bien vite que les acteurs les plus sobres de gestes étaient ceux qui rendaient le mieux leurs émotions contagieuses en tous pays. Le froid Anglo-Saxon ou l'Oriental impassible l'importaient haut la main sur les sociétaires de la Comédie Française. Le grand public français, au lendemain de la dernière guerre, eut, avec Forfaiture et le jeu de Sessue Hayakawa la révélation de cette sobriété.

Le cinéma muet se trouvait donc enfin mis sur sa vraie voie. Il comprenait les difficultés qu'il avait à vaincre. Il devinait que l'art ne consiste pas à montrer, mais à suggérer.

Le personnage de Charlot, malgré les outrances et les bouffonneries volontaires, est la plus sûre confirmation de cette tendance de l'art. Avec des gestes forcés, soulignés encore par les gros souliers ou la canne qui faisaient de ses membres comme des branches d'un sémaphore, Charlot semblait comique. Mais la vérité de son rôle, touchante, humaine, sentiment pudique de vagabond, cette fragilité invincible, aucun de ses gestes ne les exprimait, tout son rôle le suggérait. Il n'était pas comique et touchant, mais comique pour être touchant. Il niait le réel. Il symbolisait tout. Et la « danse des petits pains » au bout d'une fourchette (symbole élégant de ses illustres grands souliers), résume toute sa puissance, tout le sens de son art.

Chaplin, metteur en scène, eut quelques hasards qui firent beaucoup avancer l'art du film. Ces hasards ne pouvaient servir qu'un homme d'esprit. Dans l'Opinion publique (où il ne jouait pas), un acteur ne savait pas bien mourir. La chute de sa pipe, un peu de cendres sur le tapis, se trouvèrent faire l'affaire bien mieux que le cadavre. Pour filmer un départ, on manquait de wagon français : on se contenta de filmer l'ombre en marche du train partant sur le visage de ceux qui restaient, et l'effet se trouva plus puissant que celui du train.

A ce moment, ce premier grand moment du film muet, tous les écrivains se sentirent comme remis en selle ; beaucoup se mirent à inventer de ces effets, à les organiser en scénarios. Pourquoi la plupart d'entre nous n'ont-ils jamais réussi à faire donner à leurs films le premier tour de manivelle ? C'est que l'écran subit une autre servitude que celle de son outillage. La servitude de l'argent, le besoin de plaire aux bailleurs de fonds, m'ont toujours, je l'avoue, rejeté vers la littérature, et je n'ai pas été le seul. Quand j'allais aux répétitions générales de René Clair, je regardais les dos redoutables des bailleurs de fonds, de distributeurs de films, de tous les obtus qui représentaient le goût du public et auxquels il fallait plaire. Le dandinement de leur râble, les secousses du rire au niveau de leur nombril, les gestes de ses doigts pareils à des harpons, me faisaient trembler pour René Clair. Incomparable équilibriste, il réussissait toujours à leur plaire, en se cachant de faire une œuvre d'art.

La seule fois, pourtant, qu'il put s'affranchir de l'esclavage de l'argent, dans « Entracte », il réussit l'une des plus belles expériences que l'art muet ait jamais faites. Le ralenti, ressource scientifique pour voir dans le détail un mouvement trop rapide (l'Institut Marey nous a montré jusqu'au trajet d'une balle de pistolet) devenait là l'un des plus parfaits instruments du rêve ; il délivrait l'acteur et le spectateur du poids de la matière, de la tyrannie du temps. Il nous faisait entrer dans le monde infiniment léger, dont les moments pouvaient se resserrer ou se dilater à notre guise. Par la variété et le rythme de ses prises de vue d'un même personnage, il arrivait à égaler les effets de la musique, à atteindre le rythme pur, qui fit oublier le travail des pieds et des jarrets, la danseuse elle-même. C'est là que j'ai compris le mot de Mallarmé devant une danseuse accomplie : « Ce n'est pas une femme et elle ne danse pas ».

Art de suggérer, finesse d'expression arrivaient à remplacer le langage. La science du rythme semblait enfin accomplir l'art nouveau, quand déferla la marée du cinéma parlant, qui semblait d'abord fait pour anéantir toutes les découvertes de l'art muet. Car ces découvertes ne semblaient faites à nos yeux, que pour remplacer la parole.

Dès le premier film parlant que je pus voir (c'était « La Mégère apprivoisée »), je cessai d'avoir peur. Je compris que la parole allait dispenser le film de toutes les corvées inévitables : de l'explication du sujet, des sous-titres, des lettres à lire, etc... Et je devinai aussi que la fortune du cinéma parlant serait d'être sobre de paroles ; que la voix, comme quinze ans plus tôt les gestes, cesserait de déclamer.

De même qu'il montre de tout près, le film désormais fait entendre de tout près. Il pourrait, s'il le voulait, nous faire entendre, comme dans « Le Cœur révélateur » d'Edgar Poe, ce rythme intérieur de l'homme, ces deux battements alternés « pareils au bruit d'une montre enveloppée dans du coton ».

Les moindres altérations de la voix et du souffle allaient donner à l'émotion plus de puissance que les cris.

Le texte allait pouvoir servir à un nouvel usage. Du moment que tout était facile à expliquer, on allait pouvoir poétiser. Tel a été, en effet, la seconde carrière de René Clair.

Je lui disais :

- Pourquoi ne mettez-vous pas en scène les comédies d'Alfred de Musset ? Cela vous ressemble par les sentiments, par la grâce, par le goût, par le style : c'est fait pour vous.

Mais René Clair a mis Labiche à l'écran, et il a eu raison. Peut-être a-t-il craint de braquer sur la poésie de Musset le gros œil vitreux du bailleur de fonds. Mais cette crainte l'a bien servi. En gardant l'intrigue et presque le texte de Labiche, il a donné aux images ces fines lumières, aux personnages cette touche délicate de ridicule, aux vêtements ce désuet délicieux que enchante le sens, qui nous emmène dans un univers plus limpide, plus léger, que jamais n'avait connu Labiche. Dans « Le Chapeau de paille d'Italie » ou « Les deux Timides », le texte est dépassé sans cesse ; parfois même l'émotion et la tendresse arrivent sans être attendues. Les « Noces de Figaro » chantées par Mozart, au lieu d'un vaudeville satirique, étaient devenues un poème d'amour. De même, René Clair a pris du Labiche et l'a amené au niveau de Musset.

Si le film a un avenir dans l'épopée, nous savons que c'est aux figurants qu'il le devra. A des figurants qui sauront jouer ensemble, qui croiront à leur art, et qui sauront tous éprouver en même temps les mêmes émotions. Le chef-d'œuvre du film épique, jusqu'à ce jour, c'est « Verts Pâturages ». Est-il besoin de dire que le texte, qui ne pouvait prétendre égaler la Bible, avait bien raison de se simplifier à l'extrême ? La plus belle scène de « Verts Pâturages » aurait été possible dans un film muet. C'est celle où Moïse, assis et aveugle, dit adieu à son peuple ; chacun à son tout lui pose la main sur l'épaule, et il caresse leurs mains doucement, jusqu'au moment où le vieillard, dépassé par tous, qui va mourir, pose enfin sur son épaule sa main solitaire - Image simple et poignante, qui mériterait d'être immortelle - mais le film, sauf les actualités, n'admet nulle part les morceaux choisis.

Que la tâche essentielle du cinéma ne soit pas de montrer, mais de créer, c'est ce que vient de créer, c'est ce que vient de prouver avec éclat la grande revanche du dessin animé sur le film purement photographique. Sans doute, il a fallu commencer au niveau des enfants ; mais ce n'est pas une mauvaise condition pour un art dans l'enfance.

J'ai parlé ailleurs de cette vie sans enfance qui a été celle de Walt Disney, du gosse de l'école primaire forcé de gagner sa vie, à 3 heures1/2 du matin ou à 10 heures du soir, en vendant des journaux. J'ai conté comment, à 15 ans, marchand de sucreries dans les trains, il avait fait faillite en mangeant son fonds ; comment en 1920, seules l'extrême économie de ce procédé, la facilité d'employer de vieux appareils, l'avaient d'abord amené, pour la publicité et pour des bandes à court métrage, au dessin animé. J'ai dit comment sa première invention, le lapin Oswald, lui avait été prise par de peu scrupuleux trafiquants. Et aussi comment s'étant fait un jouet d'enfant avec une petite souris grise, cette souris, d'abord Mortimer, puis rebaptisée Mickey, lui avait, après vingt-cinq ans de misère, apporté la fortune.

Ce qu'il faut répéter surtout, comme l'un des plus frappants caractère du génie de Disney, c'est le don qu'il a de traduire toute musique en dessins et en mouvements visibles. Dans ses premières Soties symphoniques, conçues au rythme des blues, au lieu de montrer des danseurs, il faisait danser des arbres, des maisons, des îles, tout l'univers. Quand Disney n'est pas enfantin, il a la sombre imagination du Nord. Aussi sa « Danse macabre », l'une des  plus anciennes Soties symphoniques, est-elle peut-être restée son chef-d'œuvre. Tous les os de notre squelette, jeu de dominos, jeu de piano, enfin jeu de jonchet, accompagnant la musique de Saint-Saëns. Cette musique lui facilitait la tâche : c'est l'une de plus mimiques et des plus visuelles qui soient. Inutile de parler ici de « Blanche -Neige », première ébauche de ce que sera l'opéra moderne. « L'Apprenti Sorcier » résume mieux Disney. Mickey y figure, de plus en plus simple de forme : suggéré, non montré. La terrible Aventure du manche à balai qui consent, sous l'incantation, à porter des seaux d'eau et qui ne sait plus s'arrêter et devient déluge, est aidée ici par la musique de Paul Dukas. Mieux qu'aucun documentaire, elle résume et symbolise le le drame du monde moderne, capable de déchaîner la machine et incapable de la dominer ; drame de la surproduction, de la crise, de la guerre peut-être.

Le cinéma, sans doute, rapetisse tout ce qui est grand. Il lui suffit d'un homme de génie pour grandir ce qui est petit, pour faire de Mickey-la souris le symbole d'un monde.

L'art de l'écran n'a pas été tué par la parole. Il résistera à la couleur, il résistera aux reliefs. Et ce sera de la même manière. Il s'apercevra vite que, là encore, il est vain de tenter de produire et qu'il vaut mieux suggérer. L'effet criard des premiers films en couleurs se trouvera bientôt moins puissant que l'effet des nuances, que le camaïeu délicat dont pas un metteur en scène n'a encore fait l'essai. Et le relief lui-même, ce barbare, si l'on sait en adoucir les effets au lieu de les exagérer, deviendra une caresse pour les yeux.

Tout ce que nous avons vu, encouragé, aimé, ne sera donc plus qu'un art de précurseur ? Peut-être. Dans son roman sur le cinéma, « Adams », œuvre manquée mais pourtant grand poème, Clair concluait :

- L'œuvre du cinéaste est mortelle. La pellicule, hélas, se détache de son support de celluloïd.

Cet art a cherché, jusqu'à présent, tous les progrès techniques possibles, sauf la durée. Il la trouvera, par les jeux aveugles de l'ambition et de l'argent, dès qu'il l'aura méritée. J'attends patiemment la bande indestructible. Ma seule crainte est qu'elle ne devance le premier film qui méritera d'être immortel.

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ICART, "CINÉSCOPIE" ET LE "MÉDOC"

21 Octobre 2008, 00:12am

Publié par Mister Arkadin

Dans le dernier numéro de la « revue des amateurs de cinéma », Cinéscopie (n°11, septembre 2008), particulièrement riche (avec, entre autres, un portrait du peu connu Albert E. Christie, par Georges D'Acunto, et un reportage de Michel Gasqui à l’Institut Lumière de Lyon, ainsi que ma brève note de lecture sur Jean Brérault, que j’avais publiée au préalable ici), c’est le très bel hommage de Pierre Guérin à « l’ami Roger », le collectionneur, historien et archiviste du cinéma émérite Roger Icart, dont j’avais signalé le décès en juin dernier, qui a le plus retenu mon attention. D’autant que Pierre Guérin propose également une bibliographie qui confirme que l’œuvre d’Icart est loin de se limiter à l’exploration des films et de la vie d’Abel Gance.

Il est d’autant plus dommage que la collection de films et les archives de Roger Icart aient été éparpillées entre quelques bouquinistes et marchands toulousains, au lieu d’être recueillies par une institution patrimoniale. Aurait pu être créé un fonds Icart, particulièrement précieux pour les historiens du cinéma, en plus de contribuer à perpétuer la mémoire de son œuvre. La Cinémathèque de Toulouse aurait été le lieu idéal, vu les liens qu’avait entretenus Roger Icart avec celle-ci, vu aussi la richesse de son centre de documentation, à laquelle il n’était d’ailleurs pas étranger, et la qualité des conditions de conservation et de consultation qu’elle garantit. Ce n’est hélas pas la première fois, et sans doute pas la dernière, que les bibliothèque et vidéothèque, ainsi que les archives d’un grand cinéphile (ou d’un grand cinéaste, Abel Gance le premier !) se retrouvent dispersées dans la nature, voire disparaissent. Loin de moi l’idée d’incriminer tel ou tel, que ce soient les héritiers (dont ce ne peut être la préoccupation majeure au moment où le malheur les frappe), les conservateurs d’institutions cinématographiques (qui croulent sans doute sous le travail administratif que génèrent désormais ces grosses maisons, ce qui expliquerait leur manque de diligence) ou les bouquinistes (dont il serait malvenu d’assimiler l’opportunisme à de la cupidité, vu que c’est leur métier et que leur intervention permet parfois de sauver l’essentiel), voire les personnes qui sentent la mort venir, dont on peut aussi concevoir qu’elles n’aient plus alors le souci ou la force d’assurer la pérennité de leurs collections.

Je ne puis cependant que regretter de ne pas m’être montré quelque peu "charognard" en n'osant m'enquérir auprès de ses proches, dès l’annonce du décès de Roger Icart, de ce qu’allaient devenir ses archives. J’espérais, dans la nécrologie que j’ai publiée sur le présent site, que le manuscrit du dernier livre qu’écrivait Icart pourrait ressurgir un jour, au mieux sous forme de livre, ou au moins dans une série d’articles. Aurait été tout aussi indispensable la préservation des collections de publications anciennes, étrangères aussi bien que françaises, et pas seulement cinématographiques, mais aussi des notes et fiches que préparait Roger Icart pour la rédaction de ses ouvrages. Je me souviens par exemple avoir échangé des informations avec lui sur la critique de l’Occupation (lui pour son livre sur la période, moi pour l’anthologie que je prépare, déjà mentionnée ). Il m’avait, entre autres, donné copie de son inventaire des critiques cinématographiques publiées par Carlo Rim dans D.I. (Dimanche Illustrée, Marseille), hebdomadaire dont même la Bibliothèque nationale de France, si je ne me trompe, ne possède la collection. Combien d’autres inventaires, fiches d’information et revues de presse résultant d’une somme de travail et de connaissances considérable comprenaient les papiers de Roger Icart ? Quand on sait la richesse d’information et de documentation que contiennent certains fonds de critiques conservés à la Cinémathèque française ou au Département des Arts du Spectacle de la BnF, en particulier dans la collection théâtrale Rondel (je pense notamment au fonds Marcel-Lapierre), on ne peut que déplorer qu’un fonds Icart n’ait pu être constitué. Qu’en est-il des autres grands cinéphiles disparus cette année ? La mémoire de Lo Duca, de José Baldizzone, de Henri Agel (et de sa femme Geneviève, toujours bien vivante, si mes informations sont exactes) et de Claude Baignères, ainsi que l’histoire de la cinéphilie, ne mériteraient-elles pas que leurs archives puissent être consultées par leurs successeurs en cinéphilie et par les historiens de la culture ?

Francis Lacassin avait pour sa part pris soin de déposer une bonne partie de ses archives à l’Institut Mémoires de l’édition contemporaine. Sage précaution ! Les collections de l’Imec concernent essentiellement les « principales maisons d'édition », les « revues » et « différents acteurs de la vie du livre et de l’édition ». Ne serait-il pas plus que temps que les historiens, chercheurs en cinéma, amateurs éclairés et cinéphiles s’associent, par exemple sous l’égide de l’Association française de recherche en histoire du cinéma (Afrhc), pour créer un Institut similaire, une sorte d’institut "Mémoires de l’édition et de la documentation cinématographiques" ("Médoc") (1) ?



(1) Les professeurs Marc Cerisuelo et Hervé Joubert-Laurencin ont créé, au sein de l’Université de Paris VII, un groupe de recherche Documents et Ecrits de Cinéma : Littérature, Interprétation, Critique (DECLIC), qui, en plus de séminaires sur le sujet, se proposait de constituer des archives de la critique de cinéma. Je ne crois cependant pas qu’à part la gestion d’un fonds André-Bazin et des collections de l'association « L'Image et la Mémoire », ce groupe ait entrepris la collecte, aussi systématique que possible, de fonds d’archives cinéphiliques.

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LES TRICHEURS

17 Octobre 2008, 23:05pm

Publié par Mister Arkadin

Le Monde du 14 octobre a repris, dans sa rubrique « Il y a 50 ans dans "Le Monde", des extraits de l’article qu’avait publié Jean de Baroncelli sur Les Tricheurs de Marcel Carné. L’article est mesuré, à l’image de ce probe critique : « Le résultat est curieux, parfois maladroit, parfois déplaisant, mais toujours attachant. » On est loin de l’opprobre qui entoure ce film, symbole de la "qualité française" honni et mis à bât par la Nouvelle vague. Un livre publié chez L’Harmattan voici trois ans (1) proposait une étude comparative entre Les Tricheurs de Carné et Les Cousins de Chabrol, en insistant sur leur représentation de la jeunesse d’alors, bien entendu à l’avantage du second, mais de façon relativement honnête.

Oserais-je rappeler que j’avais mentionné Les Tricheurs dans un questionnaire cinéphilique à la question « Quel mauvais film que vous avez toutes les raisons de détester, voire de mépriser, ne pouvez-vous vous empêcher d’aimer quand même ? » ? Aggravons mon cas. En ces temps de célébration de Jacques Prévert, que ce soit par une exposition à la Mairie de Paris (à partir du 24 octobre) ou par un ballet s’inspirant des Enfants du paradis à l’Opéra de Paris, je n’apprécie pas moins (quoique pas beaucoup plus…) les films de Carné qu’il a tournés sans Prévert (L’Air de Paris par exemple). Et parmi ceux qu’ils ont signés ensemble, c’est le plus décrié, Les Portes de la nuit, que je choisirais si je décidais d’en revoir un. Le plus ironique est que je pense être loin d’être le seul dans ce cas !



(1) Alexandre (Jean-Lou), Les cousins des tricheurs. De la « qualité française » à la Nouvelle Vague, Paris, L’Harmattan, octobre 2005, 238 p.

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"LA REVUE FONDÉE PAR ANDRÉ BAZIN"

30 Septembre 2008, 10:33am

Publié par Mister Arkadin


"On ne prête qu'aux riches", d'après le dicton. Est-il vraiment besoin d'attribuer à un personnage dont l'importance pour la critique cinématographique française est constamment rappelée par la tribu (tous les mois dans les "Cahiers" cette année) des mérites qui reviennent à d'autres, contribuant ainsi à rejeter ces derniers dans les oubliettes de l'histoire ? Essayez donc de trouver sur Internet des photos de Lo Duca, Jacques Doniol-Valcroz et Léonide Keigel, les fondateurs des "Cahiers du cinéma". Après une demi-heure de vaine recherche, vous vous rabattrez comme je viens le faire sur la couverture d'une revue confidentielle consacrée au premier, dont j'ai parlé ici, et sur une affiche d'un film du second.
Soyons honnête : j'aurais pu scanner la photo des cinq rédacteurs des Cahiers du cinéma publiés aujourd'hui en page 39 de Libération. "Les rédacteurs des Cahiers en 1987", légende approximativement le journal, alors qu'il s'agissait d'une réunion, autour de son directeur, d'anciens de la revue (Toubiana et Daney, Doniol-Valcroze, Rohmer, Narboni). Tout est d'ailleurs approximatif, écrit plus rapidement encore qu'un blog et d'intérêt on ne peut plus limité dans cette double page de "Gros plan sur les Cahiers du cinéma", "la revue fondée par André Bazin". Article à l'image de ce canard moribond.

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QU’EST-CE QUI FAIT ÉVÉNEMENT DANS L’HISTOIRE DE LA CRITIQUE ?

8 Septembre 2008, 23:05pm

Publié par Mister Arkadin

Décembre 1895 ; 23 novembre 1908 ; 23 novembre 1916 ; 14 janvier 1919 ; 1927 ; 1928 ; 1931 ; 1937 ; 21 octobre 1942 ; janvier 1954 ; mai 1997 ; 10 août 2005 ; 27 août 2008 ; 11 septembre 2008.

Cette suite ne constitue pas, avec retard, le quiz cinéphilique de l’été. Il s’agit juste de quelques dates essentielles de l’histoire de la critique, les premières qui me sont venues à l’esprit en me demandant ce qui avait fait événement dans ce domaine (les événements correspondant sont précisés à la fin de ce billet). Certaines sont incontestables, ou devraient l’être, d’autres plus subjectives. On pourrait certainement en trouver plusieurs autres. Tout cinéphile en trouverait sans doute qui n’ont d’importance que pour lui ou qui ont de l’importance pour tel ou tel groupe de cinéphiles seulement, qui ne concernent que tel ou tel pan du cinéma. Ainsi, aux yeux de Jean-Baptiste Thoret (« Mauvais genres », France Culture, 26 octobre 2007), la présence en une de Libération du film de George A. Romero Land of the Dead, le 10 août 2005, constitue-elle une date dans l’histoire du cinéma et de la critique, en tant que moment clé de basculement dans l’évolution de la reconnaissance d’un « mauvais genre », presque le signe quasi ultime de la légitimation intellectuelle du film d’horreur.

D’autres événements concernent la reconnaissance de la critique de cinéma elle-même (la première chaire universitaire de critique cinématographique, le premier mémoire universitaire consacré à un critique de cinéma, la première thèse, par exemple). J’en ai évoqué une dans la nécrologie de Pierre-André Boutang, au sujet de Serge Daney. Toujours à propos de ce dernier, j’ai consigné vendredi dernier un fait qui est sans doute passé assez inaperçu, alors même qu’il me paraît digne d’être considéré comme un événement dans l’histoire de la critique de cinéma en France. Il s’agit de la diffusion, ce jeudi 11 septembre 2008, dans le cadre d’« Une vie, une œuvre » (10h00 à 11h00 (1)), sur France Culture, d’une émission de Gilles Lyon-Caen (réalisée par Dominique Costa) sur « Serge Daney (1944-1992), le ciné-fils » (avec Serge Bozon, cinéaste, Emmanuel Burdeau, critique aux Cahiers du cinéma, Marie-Anne Guérin, écrivain et critique de cinéma, Noël Herpe, professeur à l’Université de Caen et critique de cinéma). Il est très rare qu’ « Une vie, une œuvre », émission historique de France Culture présentant des portraits d’artistes (des écrivains le plus souvent), consacre l’un de ses numéros à une personnalité de cinéma. Ce n’était arrivé que quatre fois depuis 2002 (d’après le site de la chaîne). Nul doute que Daney aurait apprécié la compagnie d'Andreï Tarkovski (16 mars 2003), de Jean Eustache (29 juin 2003),  de Rainer Maria Fassbinder (14 décembre 2003) et de John Ford (31 janvier 2008). Quatre cinéastes (2).   Sauf erreur (je n’ai pas vérifié dans les programmes antérieurs à 2002), c’est donc la première fois qu’un critique de cinéma fait l’objet d’une émission dans le cadre de la prestigieuse série « Une vie, une œuvre ». J’y vois une certaine forme de consécration du cinéma, reposant sur l’idée qu’une pensée riche et complexe peut s’élaborer à partir d’une réflexion sur le cinéma, Daney ayant écrit sur bien d’autres sujets, mais l’ayant toujours fait à partir de son expérience de cinéphile.

Ce 11 septembre là ne fera sans doute pas l’objet de rétrospective chaque année. Je prends le pari qu’il sera tout de même un jour considéré, dans le petit milieu de la cinéphilie et des études sur le cinéma, sinon comme un événement d’importance capitale, du moins comme un "marqueur" significatif de la reconnaissance du cinéma en France.


Note et compléments :

(1) La durée de l’émission a récemment été réduite d’une demi-heure, comme si une heure suffisait à faire le tour d’une œuvre… Si même France Culture ne fait plus confiance à la capacité d’attention de ses auditeurs, ne seront bientôt plus diffusés partout que des vignettes sonores, des clips ou des "tubes" (comme l’on dit sur Radio classique).

(2) Deux autres cinéastes, Jacques Demy et Robert Altman, ont fait l'objet d'une émission, depuis, respectivement par Simone Douek, le jeudi 6 octobre 2008, et par Virginie Bloch-Lainé et Gilles Davidas, le samedi 26 juillet 2009. Et, depuis que l'émission a pris le nom « Le Mardi des auteurs », Luchino Visconti a été honoré le 3 novembre 2009, Joseph L. Mankiewicz le 8 décembre 2009 et Jean Renoir le 23 février 2010. L'émission a ensuite repris le nom « Une vie, une œuvre » et elle continue à célébrer des cinéastes : « Carl Dreyer : De "Vampyr" à la résurrection, la passion du cinéma » (par Fabrice Midal et Céline Ters, le 30 janvier 2011), Ernest Lubitsch (par Christine Lecerf), Éric Rohmer (par Hélène Frappat, le 3 novembre 2012), Chris Marker (1er décembre 2012, par Véronique Bloch-Lainé), Yasujirô Ozu (9 mars 2013, par Michel Pomarède), Walt Disney (15 juin 2013, par Barbara Turquier), François Truffaut (13 janvier 2015, par Mathilde Wagman), Buster Keaton (23 janvier 2016, par Françoise Estèbe), Akira Kurosawa (27 février 2016, par Perrine Kervran). Les acteurs ne sont pas en reste : Simone Signoret (21 septembre 2013), Charles Trenet (18 janvier 2014), Stanley Kubrick (par Alexandre Vuillaume-Tylski, 2019 ; rediffusée le 19 mars 2022).

Compléments : 

(16 novembre 2009) : j'apprends, grâce au merveilleux "groupe d'échanges sur les émissions de France Culture" (ANPR), qu'une émission avait été consacrée à Michelango Antonioni en 2001.

(1er avril 2013) : de 1984 à 1993, aucune émission n'a été consacrée à un cinéaste, sinon Pier Paolo Pasolini (le 14 juin 1990, plus en raison de son oeuvre littéraire cependant)[merci à la liste ANPR pour cette précision].

P.S. : Serge Daney a longuement parlé de Nuit et Brouillard comme d’un des films qui l’ont fait entrer en cinéphilie. Le documentaire d’Alain Resnais aurait également provoqué l’entrée en politique de certains, tel Pierre Lellouche, d’après ce qu’il a déclaré au début du « Rendez-vous des politiques » (France Culture, samedi 6 septembre 2008).


Présentation de l’émission sur le site de France Culture :

« Le cinéma est le lieu du père, à condition qu’il n’y soit pas, même si on passe sa vie à le chercher dans le monde entier, dans toutes les langues et dans tous les films » (Serge Daney).

Serge Daney a été collaborateur des Cahiers du cinéma, avant d’en devenir rédacteur en chef dans les années 70, puis responsable des pages cinéma et éditorialiste de Libération. Auteur d’une production critique massive, il fut aussi le fondateur de la revue de cinéma Trafic, avant que la maladie ne l’emporte, en 1992.

À partir de 1968, Serge Daney s’éloigne de la salle de cinéma, et voyage, principalement dans le tiers-monde. Ces années-là, où Daney construit un dialogue tendu entre les films et le monde, marquent une période méconnue de l’œuvre. Avec cet homme de cinéma aux multiples formes d’écritures, s’est posé, dès son premier texte sur Rio Bravo écrit à 18 ans, la question du « comment vivre avec les images ». Qu’est-ce que le « je » du spectateur ?

Il s’agit ici de confronter sa cinéphilie - qui s’enroule autour du texte de Rivette sur Kapo de Pontecorvo et s’achève avec Shoah de Lanzmann -, à une réflexion globale, qu’il esquissa pendant trente ans, contribuant à faire de l’exercice journalistique, un véritable art littéraire. En écrivant pêle-mêle sur Carl Lewis ou les gays aux J.O. de 1984, le bassin de John Wayne ou la publicité (sans y souscrire), il a envisagé la critique non pas comme un métier, mais comme un sport. Pour lui, la cinéphilie mimait le tennis : les films le regardaient, il leur renvoyait des balles.

Le petit garçon qui s’identifiait à son petit frère de La Nuit du chasseur de Laughton ou du Moonfleet de Lang s’est inventé « un destin plus vaste », pour reprendre la formule de Thierry Jousse, par-delà la transmission d’un savoir. « Le cinéma, pour moi, c’est l’enchaînement, plus ou moins réussi, de trois moments : voir-parler-écrire ». Plus qu’un passeur, Serge Daney était un griot.

(Lecture par Emilie Transente)


Quelques dates de l’histoire de la critique française (ébauche de chronologie) :

Décembre 1895 : premiers comptes rendus de films dans la presse

23 novembre  1908 : compte rendu de l’Assassinat du duc de Guise, par Adolphe Brisson, dans le quotidien Le Temps

24 mars 1909 : publication du premier "manifeste" pour la critique cinématographique, signé Marc Mario, dans Kinéma

17 octobre 1913 : lancement de la première page spécialement consacrée au cinéma dans la presse française, dans Le Journal

23 novembre 1916 : lancement de la première chronique régulière de critique cinématographique indépendante, par Émile Vuillermoz, dans Le Temps

14 janvier 1919 : lancement par Louis Delluc de sa chronique quotidienne de critique cinématographique dans Paris-Midi

1927 : publication posthume d’un recueil de textes sur le cinéma du critique et théoricien Ricciotto Canudo, L’Usine aux images (textes réunis et présentés par Fernand Divoire, Genève / Paris, Office central d’édition / éd. Chiron)

1928 : création de l’Association amicale de la critique de cinéma pour soutenir Léon Moussinac, auquel l’industriel du cinéma Jean Sapène a intenté un procès pour avoir abusé, dans L’Humanité, du droit de critique

1931 : jugement dans le procès Moussinac-Sapène considéré comme fondamental dans la reconnaissance du droit de critique en matière de cinéma

1937 : création du prix Louis-Delluc par un groupe de critiques, en opposition au Grand Prix du cinéma français

21 octobre 1942 : « Le Tribunal de l’Actualité cinématographique » (ou « Le débat sur les films qu’on projette »), à la Radiodiffusion Nationale, première émission de débats critiques (réalisée par Robert Beauvais, dans le cadre de « L’Actualité cinématographique » avec la collaboration de Maurice Bessy) - parmi les participants : Lucien Rebatet et Émile Vuillermoz

Janvier 1954 : parution de l’article de François Truffaut « Une certaine tendance du cinéma français » dans le numéro 31 des Cahiers du cinéma

Mai 1997 : parution d’un ouvrage du syndicat français de la critique de cinéma sur son histoire, La Critique de cinéma en France. Histoire. Anthologie. Dictionnaire, dir. Michel Ciment / Jacques Zimmer (Ramsay Cinéma)

10 août 2005 : une de Libération sur le film de George A. Romero Land of the Dead

27 août – 1er décembre 2008 : « Le regard de Bazin », cycle de projections à la Cinémathèque française, dans le cadre de l’ « Histoire permanente du cinéma » - le cahiertocentrisme de la Cinémathèque s'est confirmée par la programmation d'un cycle « Serge Daney, 20 ans après » du 20 juin au 5 août 2012

11 septembre 2008 : émission « À voix nue » de France Culture sur le critique de cinéma Serge Daney

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FLORILÈGE SKORECKI

22 Mars 2008, 00:01am

Publié par Mister Arkadin

 

Il y a un an, Louis Skorecki quittait Libération, où il avait tenu pendant des années la chronique quotidienne « Le Film » de la page « Télévision ». À l’occasion de cette anniversaire, voici un petit florilège de ses fameux aphorismes :Louis-Skorecki.jpg

 

« Avant le cinéma, il y a toujours le cinéma. » (7 octobre 2004).

 

« La nouvelle vague n'a pas produit grand-chose de nouveau. » (8 novembre 2004).

 

« On reconnaît le cinéphile à son sourire idiot. » (9 novembre 2004).

 

« La dernière chronique de Skorecki vaut cent fois le dernier Godard. » (25 novembre 2004).

 

« Aimer Rambo, c'est un signe de distinction. » (29 novembre 2004).

 

« Quand le cinéma précède le cinéma, c’est la preuve qu’il existe encore en tant que "cinéma". » (1er décembre 2004).

 

« Il faut d'abord admirer le jeune Ford (surtout la trilogie Will Rogers) et pas le vieil homme bougon que quelques chefs-d'oeuvre complaisants (L'homme qui tua Liberty Valance, la Prisonnière du désert) ont imposé au monde des bobos et des gogos. » (6 décembre 2004).

 

« C’est un film qui rime avec lui-même. – Tu peux t’expliquer ? – Non. » (10 janvier 2005).

 

« Qu’est-ce qui est le plus important au cinéma ? - Le cinéma. - C’est quoi, le cinéma ? – Ben, c’est le cinéma. » (12 janvier 2005)

 

« Tu crois qu’on les apprend par cœur, tes chroniques ? – On devrait. » (3 mars 2005).

 

« Ah ah ah, Skorecki. C’était le bon temps. Qu’est-ce qu’il devient ? – Il travaille en usine. » (8 juillet 2005).

 

« Je n'aime pas le cinéma. Depuis quand au juste ? Dix ans, vingt ans, je ne sais plus. Je sais comment ça s'est passé mais pas quand. Ce n'est pas tant que les films devenaient mauvais (ils le devenaient), c'est que les spectateurs de cinéma, joyeux festivaliers et crétins à temps plein, devenaient eux aussi de plus en plus mauvais. S'il y a une chose dont je suis sûr, c'est que je ne faisais pas partie de ce monde, et qu'il faisait encore moins partie du mien. J'ai cessé de faire des films, j'ai surtout cessé d'avoir le désir d'en faire. Dans ces conditions, dira-t-on (on me l'a souvent dit), pourquoi continuer à écrire sur le cinéma ? C'est qu'écrire et aimer sont deux choses différentes. Le seul grand théoricien français du cinéma, qui n'est ni André Bazin, ni Serge Daney, mais Jean-Pierre Oudart, ne s'est jamais intéressé qu'à la peinture. Personne n'a jamais moins aimé le cinéma que lui. Ce n'est pas comme s'il avait un jour cessé de l'aimer, il ne l'a jamais aimé. » (27 janvier 2005).

 

« Ils sont combien, à ton avis, les grands cinéastes qui ne sont pas des crapules ? […] Il faut être dur pour faire du cinéma. » (8 mars 2005)

 

« La télévision et le cinéma, c'est pareil. Il n'y a que les crétins pour ne pas s'en rendre compte. » (11 mars 2005)

 

« Plus un film est beau, plus il s'oublie vite. » (11 avril 2005)

 

« - Du téléfilm filmé ? - C'est ça. Aucun relief. Pitoyablement plat. Empesé, amidonné. - C'est souvent bien, ça. - Quand c'est Resnais, oui. - Tu aimes Resnais maintenant ? - I Want To Go Home, surtout. - Mais c'est raté. - C'est ça qui est bien. » (26 avril 2005)

 

« Eastwood, c'est juste un connard d'amateur de jazz. » (28 avril 2005)

 

« Drôle d'objet, aurait-il dit. Une manière de film pédé hétérosexuel, si vous voyez ce que je veux dire. » (sur Falbalas, 2 novembre 2005)

 

« Le cinéma d'aujourd'hui, que vous l'aimiez ou pas, s'appelle télé-réalité. » (12 janvier 2006)

 

« Je n'aime pas le cinéma. » (26, 27 et 30 janvier 2006 ; 8 février 2006)

 

« Le seul grand théoricien français du cinéma, qui n'est ni André Bazin, ni Serge Daney, mais Jean-Pierre Oudart, ne s'est jamais intéressé qu'à la peinture. Personne n'a jamais moins aimé le cinéma que lui. Ce n'est pas comme s'il avait un jour cessé de l'aimer, il ne l'a jamais aimé. » (27 janvier 2006)

 

« Quand les spectateurs deviennent mauvais, le "cinéma" se met entre guillemets. » (8 février 2006)

 

« Sait-on encore, en ces temps de fétichisation de l'image, cette pute qui n'a pas grand-chose à voir avec le cinéma, que c'est la parole qui le fonde, le cinéma ? Sait-on que la télévision, c'est le cinéma parvenu à ses fins, et qu'un Maigret avec Jean Richard vaut un Murnau ? » (13 mars 2006)

 

« Les Cahiers avaient aimé, j'étais interdit d'avis contraire. Dans les endroits chic, on parle de doxa. Je dirais plutôt connerie. Sans guillemets ? Oui. » (27 mars 2006)

 

« John Ford est le cinéma. » (18 avril 2006)

 

« Merci, John Wayne, d'être ce que tu es. » (25 avril 2006)

 

« Embrasser Cary Grant sur le menton, ça doit donner de sérieux frissons. » (26 avril 2006)

 

« la cinéphilie, un truc bête et aventureux qui a viré en abrutissement marchand » (7 juillet 2006)

 

« [le] Patrice Chéreau italien, Franco Zeffirelli » (13 juillet 2006)

 

« Les films sont faits pour être vus et oubliés. » (30 août 2006)

 

« Rendre un idiot intelligent, c'est une définition comme une autre du cinéma. » (31 août 2006)

 

« oublier les films de Duvivier, c'est un crime. » (12 septembre 2006)

 

« J'explore la tombe de Lang et j'y trouve le corps nu de Christophe. Bizarre, non? » (2 octobre 2006)

 

« Les Juifs, ça fait toujours sale. Ils sont toujours en trop. » (24 octobre 2006)

 

« le surestimé Monsieur Klein (1976), qui est d'une démagogie sans nom. » (26 octobre 2006)

 

« Ne pas oublier que le cinéma (celui de Pagnol, de Renoir, de Ford, de Welles) n'est que du théâtre filmé. Et rien d'autre. […] Cinéma et théâtre, c'est pareil. Tout le reste est littérature. » (8 novembre 2006)

 

« Le devenir-Barbie de Brisseau vaut largement le devenir-barbant du cinéma. » (3 janvier 2007)

 

« Brisseau est le dernier critique de cinéma. Il y avait Skorecki, mais il arrête. » (15 février 2007)

 

« Le plus beau Vigo, disait-on, même s'il est signé Christian-Jaque. […] Vigo est un mauvais cinéaste, un cinéaste désuet. » (sur Les Disparus de Saint-Agil, 19 février 2007)

 
 
 
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Notes, liens et informations complémentaires :

 

- Skorecki (Louis), Les violons ont toujours raison. Chroniques cinéma / TV. 1998-1999, PUF, octobre 2000 ; Dialogues avec Daney et autres textes, PUF, mars 2007.

 
- Le blog (musical) de Louis Skorecki.
 

- 17 chroniques de Louis Skorecki, notamment de films d’Hitchcock.

 

- Le journal d’un cinéphile où il est très fréquemment question de Skorecki : http://zohiloff.typepad.com/kuhe_in_halbtrauer/

 

- La version longue d’un entretien avec Skorecki paru dans Les Inrockuptibles.

 

 

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LA CRITIQUE DE CINÉMA SOUS L’OCCUPATION

18 Janvier 2008, 22:01pm

Publié par Mister Arkadin

Halimi---Douy.jpgÉnième rediffusion sur Ciné Cinéma Classic, à partir de ce week-end, d’un documentaire réalisé en 2003 par le prolifique André Halimi, qui continue d’exploiter le filon des turpitudes françaises sous l’Occupation, en s’en prenant cette fois à la critique de cinéma. Il porte sur son sujet un regard finalement étonnamment indulgent, vu surtout qu’il n’évoque pas tant les critiques que l’un d’eux seulement, le plus sulfureux, l’auteur des fameuses Tribus du cinéma et du théâtre, Lucien Rebatet, qui officiait dans Je Suis Partout.

 

Ce documentaire se focalise tellement sur Rebatet qu’il aurait pu s’intituler « François Vinneuil critique de cinéma sous l’Occupation », aucun autre nom de critique de l’époque n’étant mentionné (seul Jacques Siclier citant les cotes de la Centrale catholique affichées dans les églises) et tous les extraits de presse lus et montrés à l’écran provenant de sa chronique « Sur l’écran » de Je Suis Partout. Rebatet---signature.jpgAinsi, tous les passages où l’un des historiens interrogés par Halimi (Philippe d’Hugues) parlait d’autres critiques (Audiberti, Brasillach, tribuscinema.jpgFrank, Régent, notamment) ont-il été coupés au montage. Quasiment aucune recherche documentaire n’ayant été effectuée, le réalisateur en ait réduit à compiler des images d’archives archi-connues, censées restituer le "contexte", accompagnées de quelques entretiens avec divers "experts" et témoins.

 

Loin de moi l’intention de nier l’importance du critique que fut Vinneuil durant l’Occupation. Ce serait particulièrement mal venu de ma part, vu que je participe actuellement, avec Marc Laudelout, à l’édition d’un recueil des textes de Vinneuil préparé par Philippe d’Hugues, à paraître dans le courant de l’année. Mais en faire l’unique figure mémorable de l’époque contribue à accréditer l’idée reçue selon laquelle les années 1930 et 1940 furent des trous noirs dans l’histoire de la critique française. Il n’y aurait quasiment rien eu entre la première période de La Revue du cinéma dirigée par Jean George Auriol (le tournant des années trente) et la seconde (l’après-guerre), qui préfigure son héritière, Les Cahiers du cinéma, dont les historiographes veillent jalousement sur l’histoire sainte. Or, rien n’est plus faux, comme nous essaierons de le montrer dans l’histoire/anthologie des écrits de cinéma parus pendant l’Occupation que nous préparons également.

 

 

Liens et informations complémentaires :

 F.-Holbane---CM-630001.jpg
- Fiche technique du documentaire de Serge Halimi
 

- Alain Riou, « Demandez le programme », Le Nouvel Observateur (supplément « TéléCinéObs »), 14 juillet 2007 :

 

« […] pas grand-chose aujourd'hui, mais un intéressant magazine, « la Critique de cinéma sous l'Occupation », d'André Halimi (à 19 h 45, sur Ciné cinéma Classic). C'était le temps des Brasillach, Bardèche, Rebatet, ordures morales, qui n'ont, hélas, pas dit que des bêtises sur le plan esthétique, car la vie est compliquée. De bons témoignages de spécialistes, et de belles réflexions. »

 

- présentation du film sur le site de Ciné Cinéma :

 

Pour rendre compte de la critique cinématographique pendant l'occupation allemande ce film s'appuie sur l'histoire du cinéma en France au cours de ces années. Au tout début de l'Occupation, la production française est à l'arrêt et seuls les films allemands occupent les écrans. La critique se penche alors immanquablement sur ces films produits par l'occupant. Les oeuvres envoyées en France par les Allemands sont majoritairement des policiers ou des films musicaux. Rares sont les films politiques, en dehors de quelques exceptions notables, parmi lesquelles "le Juif Süss". Dès que la production française redémarre, la critique ne s'intéresse plus qu'à elle.

 

L'exil et la discrimination ont contraint nombre de professionnels du cinéma au silence. Ces années de guerre verront donc l'émergence de nouveaux cinéastes - Becker, Bresson, Autant-Lara - dont la critique - y compris celle de la presse la plus collaboratrice - saluera le travail.
Si les critiques semblent parfois pouvoir faire leur métier avec une certaine indépendance, les journalistes de "la Gerbe" ou de "Je suis partout" par exemple, notoirement pro-allemands, fondent le plus souvent leurs critiques sur des propos antisémites et xénophobes. Ce film présente notamment de longs extraits d'articles du tristement célèbre Lucien Rebatet, surnommé alors "le Führer de la critique cinématographique".

 

Pour rendre compte de l'ambiguïté de cette période, ce document recueille les témoignages des historiens, Pierre-Marie Dioudonnat, Philippe d'Hugues et Pierre Darmon, le critique Jacques Siclier, le réalisateur Jean Delannoy, l'auteur Pierre Barillet, les acteurs Jean Desailly et Simone Valère, le chef décorateur Max Douy.

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