Mister Arkadin

TÉLÉRAMA BON ENFANT

8 Juin 2008, 07:01am

Publié par Mister Arkadin

L’hebdomadaire Télérama s’efforce tant bien que mal de faire oublier son passé de journal distribué dans les paroisses ou à la sortie de la messe – on se demande bien pourquoi, mais il semble que cela sied mieux à son statut actuel de journal des Chrétiens libérés de gauche "tu-sais-c’est-pas-si-facile". Ne figure plus, par exemple, à la fin des fiches de présentation des films, la cote morale de "Chrétiens-médias". Et il y est de bon ton de ne plus y paraître effarouché par les représentations un peu poussées de la sexualité. Ainsi Pierre Murat a-t-il pu faire l’éloge, au "Masque et la Plume" qui faisait le bilan du dernier festival de Cannes, de Serbis, dont des séquences seraient tout bonnement pornographiques, alors même qu’il n’est que de consulter son Guide du cinéma chez soi pour constater que les films de cul ne sauraient être recommandés d’ordinaire. Gageons qu’à sa sortie en salles, de doux euphémismes et périphrases seront employés pour décrire le film. C’est ainsi que fut traité en juillet 2004 Quoi ?, dont j’avais regardé le début malgré la mauvaise réputation de ce film réalisé par Polanski en 1972. La semaine précédente, Télérama avait loué « cette inimitable ambiance d’orgie sexuelle bon enfant si typique de l’époque » (et que les critiques de ladite époque – une Claude-Marie Trémois sans doute – avaient dû trouver extrêmement vulgaire). Dès lors, pourquoi fut-il écrit que les premiers agresseurs de l’héroïne « s’emmêlent, s’entretripotent par erreur et finissent par se taper dessus », alors que la cause de leur discorde est que l’un d’eux, ayant cassé ses lunettes, se trompe de derrière et entreprend de sodomiser l’un de ses comparses ?!


Complément (18 juin 2011) : la volonté de se démarquer du passé chrétien de Télérama est encore plus marquée dans les propos des rédacteurs qui l'ont quitté. Jean-Luc Douin se signale par exemple, dans un compte rendu du Dictionnaire des films français pornographiques et érotiques (Le Monde, 9 juin 2011, p.20), en invitant les lecteurs à se gausser ("se délecter", écrit-il en se voulant ironique) des cotations de la Centrale catholique, celles-là même qui figuraient dans Télérama alors qu'il y collaborait encore.