Mister Arkadin

VALSE AVEC L’AVOCAT DE LA TERREUR

17 Juillet 2008, 01:21am

Publié par Mister Arkadin

Ari Folman s’est-il vraiment montré audacieux en exposant et explorant, dans Valse avec Bachir, le malaise qu’il éprouve en se remémorant les massacres de Sabra et Chatila, auxquels il assista passivement, sans se rendre réellement compte de ce qui se passait ? Ne serait-ce pas un moyen pour Israël de se dédouaner, de minimiser son degré d’implication et la culpabilité de ses dirigeants, de son armée et de ses soldats, en plaidant l’irresponsabilité, à tous les sens du terme ? Ayant fait l’éloge du film au dernier "Libre journal du cinéma", je pense qu’il s’agit d’un mauvais procès. D’abord parce qu’un film israélien ne peut qu’être d’une certaine façon juge et partie à ce sujet et que Folman s’en sort de ce fait aussi bien que cela lui était possible. Ensuite parce que le parallèle qu’il établit entre Sabra et Chatila et la Shoah, à travers la comparaison des gestes et attitudes d’un enfant du ghetto de Varsovie et de rescapés libanais, me paraît aller assez loin dans l’introspection sincère et sans tabou.

 

 

Aussi bizarre que puisse paraître ce rapprochement, cela m’a rappelé L’Avocat de la terreur, le film de Barbet Schroeder sur Maître Jacques Vergès. Schroeder n’a pas osé pousser son portrait de Vergès jusqu’aux dernières années. Cela le dispense de traiter correctement la question du terrorisme palestinien contre Israël, juste évoquée. Mais l’on sent bien que Schroeder est gêné par le propos véhiculé par son film, qui laisse penser qu’il considère que Vergès, après des débuts exemplaires, s’est fourvoyé – thèse communément admise. On le sentirait presque prêt à se demander si ce n’est pas son admiration pour le défenseur des terroristes du FLN lors de la guerre d’Algérie, au nom de la Cause et du principe de la fin qui justifie les moyens, qui entre en contradiction avec son sionisme et son aversion pour le terrorisme qui touche Israël. Schroeder ne se demande-t-il pas in fine si ce n’est pas Vergès qui est resté fidèle à ses principes alors que lui-même les fait varier selon l’opportunité, selon les circonstances, qui ne devraient pas primer sur les principes ? Une fois que l’Etat d’Israël, de part la colonisation de territoires palestiniens, se voit confronté à des problèmes similaires à ceux que rencontra l’Etat français lors de la décolonisation, Shroeder est amené à reconsidérer, sinon ses idéaux de jeunesse, au moins les prises de position qui en ont résulté. De la même manière, étant confronté à la question de la complicité d’Israël dans un massacre de populations civiles, on sent Folman prêt à reconsidérer la question de la complicité des Etats qui ont collaboré avec l’Allemagne, et à plus forte raison des alliés, dans la mise en œuvre de la Solution finale, à tout le moins leur passivité et leur incapacité à en prendre conscience à temps et à l’entraver.