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Site personnel de Pascal Manuel Heu, consacré à ses publications, au cinéma et à la critique. Page complémentaire : https://www.facebook.com/Mister-Arkadin-1041074065975069/
La bande-annonce du dernier James Bond, Quantum of Solace (quel titre étrange et du coup attirant !), qui passe déjà dans les salles de France et de Navarre alors que le film ne sort que fin octobre, ne laisse pas de m’étonner. Elle comporte son lot réglementaire de cascades, de bastons, de mines patibulaires (Mathieu Amalric n’y apparaît que fugitivement, bien qu’il soit l’attraction principale du film pour nous autres Français) et de répliques ayant nécessité le dur labeur d’un quarteron de dialoguistes à la créativité ébouriffante (« Il ne reste que trente secondes. [un temps de suspension] – Va falloir faire vite, alors… »). En revanche, quid de la James Bond girl ? Son occultation quasi complète dans la bande-annonce fait-elle partie d’un plan marketing qui m’échappe, alors même que les publicitaires ont annoncé depuis longtemps le choix de la ravissante Olga Kurylenko et l’exploitent abondamment ? À quoi sert que Bond brandisse avec autant de fierté son "gun" sur l’affiche si la girl en est absente ?!
Autre incongruité : Marc Forster. Le réalisateur de comédies, fantaisistes, puis plus dramatiques, et dans l’ensemble plutôt réussies, comme Neverland, L’Incroyable destin de Harold Crick et Les Cerfs-volants de Kaboul, est le dernier que j’aurais pressenti pour ce job.
Le titre, la girl, le méchant, le réalisateur, quatre raisons pour moi d’aller y voir, bien que je ne sois pas un grand fan de la série.
Complément (6 août 2009) : Faisant incidemment une recherche sur ce film, je me rends compte qu'il en existe une affiche où la "girl" est mise en vedette. Indiscutablement, ce blog a acquis une influence considérable, vu que même les responsables du marketting de blockbusters suivent mes prescriptions !
L’un des événements du festival de Cannes a été la projection hors compétition du documentaire qu’Emir Kusturica a consacré à son idole Diego Armando Maradona.
Le film sort en salles mercredi 28 mai. Le même jour, on peut se replier sur Arte, la meilleure chaîne de sport en France. Elle rediffuse en effet mercredi prochain Maradona, un gamin en or, sublime film de Jean-Christophe Rosé, peut-être le meilleur documentariste de sport, puisqu’il est également l’auteur de plusieurs autres remarquables documentaires sportifs diffusés sur Arte : L’Odysée du coureur de fond, de L’Équipée belle, le magnifique Les Rois du ring et de Pélé, Garrincha, Dieux du Brésil.
Les deux portraits de Maradona semblent se compléter, puisque l’un résulte de l’empathie du cinéaste yougoslave pour une personne avec laquelle il s’entretient et revisite sa vie autant que sa carrière et ses prises de position politiques, alors que l’autre est constitué uniquement d’archives, sans le moindre entretien avec Maradona (sinon provenant d’archives).
Si le film de Kusturica est aussi beau que celui de Rosé, il aurait mérité de lui valoir une troisième palme !
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À signaler en outre que Jean-Christophe Rosé est l’auteur du non moins intéressant pour nous autres cinéphiles Vittorio Mussolini, radiographie d'un Italien des années 30.
Pourquoi donc l’annonce de la sélection du Festival de Cannes est-elle encore attendue comme un événement et fait-elle l’objet d’un tel ramdam, avec conférence de presse en grande pompe, micros empressés et passage des président et délégué général dans tous les médias ? En attend-on encore vraiment quelque surprise que ce soit ? Quelque espoir d’un renouvellement ? Quelque espoir d’une audace de la part des sélectionneurs ?
1 792 longs métrages candidats, nous précise Le Monde d’aujourd’hui. Tout ça : cet énorme travail de visionnement par des petits comités de petits yeux au service des deux têtes pensantes de la direction du festival. Pour ça : un savant saupoudrage prévalant manifestement de plus en plus sur toute prise de risque.
Gilles Jacob prétend qu’avec l’arrivée de Thierry Frémaux au poste de délégué général, une « primauté » serait désormais « accordée à l’artistique » (toujours d’après Le Monde), les films « importants et novateurs » étant privilégiés. Force est de constater que ces derniers sont comme par hasard toujours réalisés par la petite série de réalisateurs ayant la carte auprès de ces messieurs.
La sélection francophone est à cet égard symptomatique, comme l’année dernière (Breillat, Honoré et je ne sais plus trop qui, si mes souvenirs, non des films, aussi vite oubliés qu’à moitié vus, mais de la sélection, sont bons). Au reste, pourquoi donc penser que le cinéma français aurait besoin de renouvellement, voire de découvertes, alors que nous disposons de cinéastes aussi immenses que Desplechin et Garrel, qui feront encore une fois s’extasier les gazettes qui font la mode (Les Cahiers, Les Inrocks, Libé, Le Monde) ?
Avions-nous déjà été gratifiés d’une sélection aussi paresseuse ? Même la section "Un certain regard" n'annonce rien de bien excitant. C'est donc vers des inconnus qu'il faudra se tourner. Mais ceux-ci sont bien rares en compétition, où l'on nous refourgue les vieux habitués ou semi-habiles surcotés, souvent bien fatigués, quoique leur persévérance nous vaille encore parfois quelques fulgurances et quoiqu’on serait prêt à tout leur pardonner tant ils nous ont déjà donné (Wenders, Egoyan voire Eastwood, les Dardenne, Depardon et Soderberg), et les jeunes habitués, fatigués avant même d'être vieux et dont on n’attendait déjà plus grand-chose après les premiers films (Michel Gondry, Nuri Bilge Ceylan, Jia Zhangke, Charlie Kaufman – ce dernier comme cinéaste après avoir signé quelques scénarios aussi indigents que prisés des snobs).
Pas plus d’audace hors compétition ou en séances spéciales, avec, c’est selon, les surévalués ou légèrement dévalués Allen, Ferrara, Wong Kar Waï, Spielberg. Restent Giordana et Kusturica, qui semblent eux aussi avoir leur(s) chef-d'œuvre(s) derrière eux.
Bref, même si quelques pépites se cachent sans doute dans le lot (à l’instar du Coen de l’année dernière), cela va roupiller dur sur la Croisette : bon courage aux festivaliers !
« Le film le plus réac et fachô de tous les temps », promet Claude Lelouch pour la suite de L'Aventure c'est l'aventure, qu'il prépare actuellement. Cette auto-dénonciation provocatrice mérite d'être entendue sur la longueur pour en comprendre le sens, quelque chose me disant que les dix mots que j’ai prélevés de son entretien avec Yves Calvi (1) risquent d’être mal interprétés… Mais je n’ai pu résister à l’envie de la livrer à la sagacité des internautes, dans le prolongement de mes récentes notes sur le marketing du cinéma. Voilà au moins une manière pour le moins originale de renouveler la promotion d’un film !
Notes, informations et liens complémentaires :
(1) France Inter, "Nonobstant" du 24 janvier 2008 ; émission pouvant être écoutée quelques jours encore ici ou être récupérée là.
- Un beau livre sur Claude Lelouch : Claude Lelouch mode d’emploi
- Un petit extrait de L’Aventure c’est l’aventure TCM diffuse en ce moment l’un des plus beaux films de John Huston La Nuit de l’iguane. L’occasion de revoir la magnifique Keborah Kerr, disparue il y a peu.
Prochaines diffusions : 30 janvier, à 16h15 ; 2 février, à 12h20 ; 5 février, à 16h00.
Revue de presse : « 4O Jours de Moussa Dagh : Nouvelles intimidations turques », Les Nouvelles d’Arménie Magazine, n°137, janvier 2008, p.15 (http://www.armenews.com/article.php3?id_article=36519)
(voir également : http://www.gamkonline.com/detail.php?r=0&id=6243&l=fr)
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- J’ai publié en 2005 une analyse du film ayant le premier contribué à établir la réputation d’acteur engagé de George Clooney : « Les Rois du désert : peut-on rire de la guerre en Irak ? », Le Cinéma et la guerre (dir. Hervé Coutau-Bégarie / Philippe d'Hugues, Paris, Commission Française d’Histoire Militaire / Institut de Stratégie Comparée / Economica, p.177-184).
- J'ai déjà évoqué le projet "Musa Dagh" de Stallone dans une analyse de son dernier Rocky Balboa : "Les défis de Sylvester Stallone", Jeune cinéma, n°310/311, été 2007, p.94-97 ; article repris ici.