DANEY À TOUTES LES SAUCES
« où que l'on ouvre cet ouvrage, nulle trace d'une ligne mal écrite, d'un poncif critique, d'un paragraphe de remplissage. Daney était un cerveau en érection permanente, un bon et beau parleur, une fontaine jaillissante d'où coulaient en jets abondants concets et théories, humour et gravité, jeux langagiers et fluidité du verbe »
Serge Kaganski sur La Maison cinéma et le monde, tome 3, « Les années Libé 1986-1991 » (P.O.L., 880 pages), dans Les Inrockuptibles, 20 juin 2012, page 76.
Retrouvant, au hasard d'une opération de désherbage dans mes archives, la dernière liasse de papiers dithyrambiques suscités par tel ou tel événement commémoratif créé périodiquement autour de l'icône de la cinéphilie parisienne qu'est devenu Serge Daney, j'avoue être un peu surpris par la saillie, forcément géniale, jaillie de ce cerveau en ébullion qu'a choisie de mettre en exergue Libération dans la coupure ci-dessous. 30 % de cinéma en moins mis en rapport à 30 % d'idées lepénistes en plus, cela pouvait paraître bien vu en 1992 (cela pouvait aussi paraître déjà bien couillon...), mais deux décennies plus tard, alors qu'on célèbre la recrudescence des spectateurs dans les salles, sans pour autant que Libération se réjouisse franchement que les idées lepénistes aient décru d'autant, cela ressemble furieusement à un propos de comptoir, pouvant à la rigueur alimenter un papier vite torché, mais assurément pas un volume de pensées vouées à l'adoration des thuriféraires... Faut-il vraiment que Le Pen soit une obsession chez ces gens-là pour que soit conférée à cet aphorisme débile une allure de sentence testamentaire !
(Libération, 2-3 juin 2012 ; cliquer sur l'illustration pour l'agrandir)