Mister Arkadin

ALFRED : JALONS D’UNE CONSÉCRATION

17 Janvier 2011, 00:04am

Publié par Mister Arkadin

J’ai mentionné ici quelques sujets revenant perpétuellement dans l’édition française. Si Truffaut est le grand homme en ce qui concerne les Français, Hitchcock l’est assurément en ce qui concerne les étrangers. Aussi suis-je un peu dubitatif en lisant un peu partout en ce moment (1) que la biographie de Patrick McGilligan serait "définitive". Ne savait-on pas déjà à peu près tout de ce qui nous est pour l’instant révélé (2) ? Dès lors, qu’est-ce qui empêchera de refaire le coup dans quelques années ? En attendant, après les recettes de cuisine d’Alfred, après telles ou telles pièces de ses archives et "tout, vous saurez tout sur…", parions sur l’ingéniosité des éditeurs pour varier la sauce à l’infini.

J’y irais bien de ma petite contribution, moi aussi. Je prends date dès aujourd’hui, tout en sachant que je ne mettrai sans doute pas à exécution ce projet avant plusieurs années. Il s’agirait de revenir sur la réception des films d’Alfred Hitchcock et sur l’idée selon laquelle sa consécration comme Auteur serait l’œuvre des critiques de la Nouvelle Vague. Non que je la croie fondamentalement fausse, mais elle mériterait peut-être d’être affinée. Que Jacques Mandelbaum puisse écrire, dans Le Monde, que le « premier des jalons » de la consécration d’Hitchcock, « élevé » « au rang d’artiste » par « la cinéphilie française », « avant d’autres », fut Le Cinéma selon Hitchcock de François Truffaut en 1966 montre en tout cas que ce travail ne serait pas totalement inutile. Dommage, à tout le moins, si peu de temps après la mort de Claude Chabrol, et pas si longtemps après celle d’Éric Rohmer, d’avoir raté l’occasion de rappeler qu’ils furent aussi d’excellents critiques, leur Hitchcock, de 1957, demeurant l’une des plus remarquables analyses film à film de l’œuvre d’un cinéaste.

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Pour ne pas subir, toutes proportions gardées, les déboires que connaît actuellement Patrick Poivre d’Arvor, je m’empresse de noter pour finir qu’au moins deux ouvrages anglo-saxons ont déjà en partie balisé le terrain :

- Robert E. Kapis : Hitchcock : The Making of a Reputation, University of Chicago Press, 1992 ;

http://www.hitchcockwiki.com/mediawiki/images/e/ec/0226424898.jpg

- Vest (James M.), Hitchcock and France : The Forging of an Auteur, Prager, Westport, 2003.

Le second n’apporte cependant aucun élément vraiment neuf et son investigation reste limitée presque exclusivement aux années 1950, l’emploi dans le titre du terme "Auteur", et non "Author", annonçant d'ailleurs clairement la focalisation sur la consécration française d’AH. Espérons que le premier remonte plus haut, à la période anglaise d’AH, dont trois films furent diffusés en France. Était-il alors uniquement cantonné au rang d’habile technicien, voire de "maître du suspens" ?


Notes :

(1) Une page complète aussi bien dans Le Figaro (3 janvier) que dans Le Monde (4 janvier) pour un livre qui ne devait paraître que le 12 janvier 2011 – cela confirme que Tavernier cinéphile enthousiasmant et heureux éditeur chez Actes Sud pour l’Institut-Lumière a plus la cote que Tavernier cinéaste…

(2) « Le méconnu du Nord Express », titre L'Express le 2 février 2011 (p.104-105). Sur le mode "On le sait..." / "On le sait moins...", Éric Libiot y livre des infos qui seraient les unes des confirmations, les autres des révélations, ou à tout le moins des faits peu connus. Bizarrement, elles ne sont pas plus les unes que les autres des révélations.