Mister Arkadin

LES CRITIQUES AUXILIAIRES DU MARKETING

22 Juin 2008, 06:32am

Publié par Mister Arkadin

Les publicistes du cinéma rivalisent d’ingéniosité pour embrigader les critiques dans la promotion de leurs films. Ainsi est-il devenu presque systématique que des phrases des comptes rendus soient habilement prélevées pour vanter les films dans les placards publicitaires paraissant dans la presse. C’est fait de façon si astucieuse que même une critique négative peut se transformer en éloge en sélectionnant tel bout de phrase tronquée ! Une analyse de ce phénomène mériterait un petit travail universitaire, tant cette pratique renseigne aussi bien sur la représentation que se font les gens de cinéma des goûts du public et de ce qui peut inciter ce dernier à se rendre en salles et sur le clivage existant entre différents types de cinéma selon qu’ils sont soutenus par telle ou telle partie de la presse. Pour tel type de film, seront convoqués Libé et Les Cahiers, pour tel autre Le Parisien et Ciné Live.

L’une des caractéristiques les plus fréquentes (et récentes ?) de ce type de marketing est que l’avis de la presse est convoqué avant même la sortie du film en salles. Quand celui-ci a déjà été montré dans un festival, on peut imaginer que cet avis a été prélevé au moment du compte rendu de Venise, par exemple, comme dans le placard publicitaire ci-contre (Télérama étant mobilisé pour Brokeback Mountain, y compris son Ulysse, alors que celui-ci ne se manifeste normalement qu’à la sortie des films). Mais, désormais, un film n’ayant pas été présenté en festival, tel Sagan, peut bénéficier des dithyrambes journalistiques avant même la publication des critiques, comme ce fut le cas sur le placard découpé dans Le Figaro du 9 juin 2008, soit deux jours avant la sortie du film de Kiane Kurys, alors qu’au moins deux des publications cités, Télérama et Les Inrocks, n’en avaient pas encore rendu compte. Comment les publicitaires du cinéma se procurent-ils les textes à paraître et pourquoi les journaux acceptent-ils d’être utilisés avant même que le public ait pu lire l’intégralité de leurs comptes rendus ? Ce n’est hélas, et paradoxalement, que l’un des signes de la perte de considération qui touche la critique française.