Mister Arkadin

"ANNALES DU CINÉMA FRANÇAIS. LES VOIES DU SILENCE 1895-1959"

22 Décembre 2013, 00:39am

Publié par Mister Arkadin

Le 13 mai dernier, j'annonçais que serait bientôt publiée, dans Livr'Arbitres (n°11, printemps 2013, p.8-9), une note de lecture sur le prodigieux ouvrage que Pierre Lherminier a publié il y a un an. Elle l'a été en juin dernier ; la voici ci-dessous.

Pour des étrennes, il s'agit assurément du suprême cadeau à faire à un ami cinéphile !


Pierre Lherminier, Annales du cinéma français. Les voies du silence 1895-1929, Paris, Nouveau Monde Éditions, 2012.

http://s1.lemde.fr/image/2013/02/14/534x0/1832947_5_f31d_couverture-du-livre-les-annales-du-cinema_5d3aec9358ae9ba427f38b50259b0aaf.jpg

À moins d’être adepte du sadomasochisme, il n’est guère d’occasion d’être saisi simultanément par une intense jubilation et par une légère sensation d’humiliation. C’est pourtant le délicieux alliage de sentiments qu’ont probablement connu tous les chercheurs en histoire en découvrant le monument érigé en l’honneur du cinéma français par Pierre Lherminier. Encore n’a-t-il pour l’instant paru que le premier tome, consacré à la période du Muet : 1136 pages bien tassées, merveilleusement illustrées et éditées (mention spéciale pour l’index thématique, denrée aussi rare que stimulante), dont on ne peut écrire qu’elles frôleraient la perfection, car elles y parviennent ! Aucun soupçon de remplissage, comme dans tant de "beaux livres", domaine dans lequel le cinéma n’est pas avare, hélas plus souvent pour le pire que pour le meilleur, y compris quand ils sont signés de noms réputés, dont on devine assez vite que la préoccupation principale est de faire fructifier leur entregent médiatique (par exemple Olivier Barrot dans son récent Tout feu tout flamme. Une traversée du cinéma français, hors de prix vu qu’il ne coûte que deux fois moins cher, pour cent fois moins de matière, et de bien moindre qualité). Pas de paresseuse compilation non plus, à la manière d’un Jean-Luc Douin (pour une série de dictionnaires : de la censure, du désir au cinéma, etc.). Non, de la jubilation pour des années de lecture et de contemplation, vous dis-je ! Mais pourquoi ai-je ajouté que l’ouvrage serait aussi quelque peu humiliant ? Qu’un homme seul, certes le plus grand éditeur de cinéma qu’ait jamais compté la France, ait pu réaliser un tel tour de force, une somme qui, à n’en point douter, fera encore date dans cinquante ans, sans qu’aucun spécialiste de toutes les abondantes questions dont il traite n’y trouve quasiment la moindre scorie, ne peut que vous faire vous sentir ignorant et velléitaire en comparaison… Vivement la suite !


PS : Le 28 mars 2009, j'avais émis quelques petites réserves sur un aspect mineur d'un précédent livre de Pierre Lherminier, au sujet de Delluc, Vuillermoz et des débuts de la critique de cinéma en France. Les Annales du cinéma français n'entretiennent plus aucune ambiguïté sur la question, puisque y est reproduite, sous le titre « Naissance de la critique cinématographique » (pages, 572-573), la chronique d'Émile Vuillermoz parue dans Le Temps du 23 novembre 1916, avec, dans le chapeau, la présentation suivante : « cette chronique d'Émile Vuillermoz peut être considérée comme le texte fondateur de la critique cinématographique dans la presse française ».